On est partis pour libérer la ville de Deventer [Hollande]. On est partis au combat et l’idée c’était d’y aller à 3 heures du matin. Il faisait plutôt sombre et un peloton est, à l’évidence, parti dans la mauvaise direction et, bien sûr, c’était peut-être nous qui étions partis du mauvais côté, mais je sais qu’on devait prendre ce pont, et je sais que je suis arrivé sur le pont et on était censé s’arrêter là.
On devait avoir un peloton d’un côté de la chaussée et un autre peloton de l’autre côté de la chaussée, et moi je suis arrivé de mon côté de la chaussée et mes gars, et dans le noir j’ai cru voir nos gars de l’autre côté. Seulement, ce n’était pas les nôtres ; c’était des Allemands. Immédiatement, c’est devenu apocalyptique, vous savez, on a eu deux de nos gars qui ont été blessés, et un autre tué – le reste de mon peloton, qui est là-dedans… leurs noms se trouvent là dessus, dans ce truc.
Et on s’est fait prendre sur ce pont, mais le pont en question était en briques, vous savez, ce n’était pas un pont en métal du tout, c’était un pont en brique et mortier et les Allemands avaient en quelque sorte mis un truc en dessous, ils l’avaient fait sauter et il y en avait de gros morceaux dans l’eau juste là, et puis il fallait sauter d’un tas de briques à l’autre, et là, ils nous ont faits prisonniers. Ils nous ont emmenés là-bas et ils nous ont mis derrière une haie, il y avait un champ. En Hollande, on aurait dit qu’il y avait des tranchées déjà creusées partout où on allait, c’est que les Allemands les avaient fait creuser par des gens, comme ça quand ils passaient par là, ils pouvaient sauter dedans comme ça.
Donc il y avait des tranchées derrière cette haie et ils nous ont ramenés et j’ai dit : « Oh là, là ! Ils vont nous descendre. » Je regardais ces tranchées étroites et là je me suis dit : « C’est là-dedans que je vais finir. » Mais ils nous ont rassemblés tous ensemble et juste après ils nous ont emmenés dans la ville. Ils ont interrogé M. Fox là-bas – c’était la première fois qu’il participait à un combat alors il n’y connaissait pas grand-chose, et il comptait sur moi pour lui montrer parce que j’étais chef de section et il avait été… J’étais seulement caporal. Mais lui comme il était sergent, il avait un grade plus élevé que le mien.
En tout cas, ils l’ont pris et l’ont interrogé, je suppose, et ensuite il est ressorti, et puis ça a été à mon tour d’y aller. Ils vous posaient toutes sortes de questions et il était vif l’Allemand, quel qu’il soit, il me regardait et il a dit : « Aah, le Queens Own Rifles, hein! » « Oui, excellent régiment ». Et il m’a cité tous les endroits où le Queens Own Rifles s’était trouvé, et ceci depuis la France jusqu’à l’endroit où on se trouvait en Hollande.
Oui, alors le matin… quand ça s’est éclairci le matin, les Allemands nous ont fait traverser la ville de Deventer pour… on a marché, et marché, et marché encore, et pendant qu’on repartait derrière les lignes à pied, on a vu leurs véhicules, nos avions les avaient mitraillés avec des roquettes, nos [appareils] Typhons ils avaient des roquettes sur leurs ailes. Quand ils voyaient un véhicule allemand, et bien il était cuit, c’était foutu pour lui, et ils étaient complètement grillés quand vous les regardiez ; juste un morceau de ferraille carbonisée, vous savez.
Et nos avions volaient, ou commençaient à survoler les alentours, et ils avaient tellement peur de nos avions, ils étaient terrifiés, je pense, et ils couraient se cacher, vous savez. Et on les regardait en rigolant, et on pensait : « Ce sont les nôtres là-haut, ils font leur boulot » et c’était les Typhoons et les Spitfire.