Joy Loveridge (Source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Joy Loveridge (Source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Joy Loveridge s'est enrôlée dans les Auxiliaires féminins de l’Armée de l’air britanniques (WAAF) en 1939, quelques semaines après la déclaration de la Deuxième Guerre mondiale. Elle servit comme commis de l'armée de l'air britannique (RAF) à Station Debden, dans l'Essex. Une fois là, la bataille d'Angleterre faisait rage et la station fut l'objet de fréquentes attaques aériennes. Elle rencontra son mari Doug, un navigateur de l'Aviation royale canadienne (ARC) et elle démisisonna de la WAAF afin de partir avec lui au Canada. Cependant, elle joignit les rangs de la Service féminin de l’Armée canadienne (CWAC) lorsqu'il fut déployé en Angleterre. Elle retourna travailler à Londres où elle apprit que l'avion de Doug fut abattu et porté manquant à l'appel. Ce n'est que plus tard qu'elle apprit que Doug fut fait prisonnier. Ils se retrouvèrent plus tard et retournèrent au Canada en 1946.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Contenu sensible : Cet article contient du contenu sensible que certaines personnes peuvent trouver dérangeant ou offensant.

Joy Loveridge
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Démobilisation du Service féminin de l’Aviation royale de Joy Loveridge le 10 février 1943.
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Joy Loveridge et son mari Doug Loveridge, un navigateur dans l'ARC.
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Joy Loveridge et son frère devant leur maison de famille en Angleterre. Quand cette photo a été prise, Joy Loveridge s’était engagée dans le Service féminin de l’Armée canadienne et était repartie en Angleterre. Son frère avait été blessé en France, alors qu’il servait dans l’Armée britannique.
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Joy Loveridge (devant, rangée de gauche) participant à une garde d’honneur. Betty, la jeune mariée, perdit son mari quand son avion a été abattu. Son mariage avec le capitaine de l’armée a malheureusement été de très courte durée, car il s’est fait tuer six mois plus tard.
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Livret de solde de Joy Loveridge à l’époque où elle servait dans le Service féminin de l’Armée canadienne.
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Lieutenant Joy Loveridge (1er rang à l’extrême gauche) et les Cadets de l’Aviation royale du Canada, 259e Escadron, photo prise à la base des Forces canadiennes Kamloops en Colombie britannique en mai 1982.
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Le certificat de démobilisation du Service féminin de l’Armée canadienne de Joy Loveridge.
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Joy Loveridge devant le baraquement où elle habitait quand elle servait dans le Service féminin de l’Armée canadienne à Dundurn, Saskatchewan en 1944.
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Joy Loveridge (deuxième en partant de la droite) et d’autres femmes du Service féminin de l’Aviation royale montant un spectacle de French cancan pour remonter le moral des troupes sur leur base.
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Et quand je suis arrivée à la porte, elle m’a accueillie en personne, m’a amenée dans la pièce, m’a fait asseoir, elle m’a offert du thé et des biscuits préparés sur un plateau, alors j’ai su que quelque chose n’allait pas. Elle m’a dit que mon mari et son équipage n’étaient pas rentrés de leur 29ème vol en Allemagne, qu’ils avaient été portés disparus. J’étais complètement désespérée et j’ai pleuré toute la nuit.

Transcription

Le 27 août est le jour de mon anniversaire et j’avais mis de côté le colis que mes parents m’avaient envoyé pour pouvoir l’ouvrir ce jour-là. Il était près de mon lit. Cependant, le 26 août, en entendant les sirènes [annonçant le raid aérien] et imaginant que c’était encore un exercice d’entraînement, j’étais tranquillement en train de fermer le classeur à tiroirs à clef quand les bombes ont commencé à tomber. Je suis sortie du quartier général en courant comme une dératée jusqu’à l’abri le plus proche et me suis faufilée dedans. Quelqu’un ma tirée à l’intérieur en fait. Cet après-midi-là, beaucoup de bombes sont tombées.

Après ce raid, notre commandant WAAF nous a rassemblées sur une sorte de colline verte dans le camp, et on est restées assises là un moment en état de choc. J’ai demandé à un des soldats qui enlevait des débris du côté des quartiers pour les couples, qui servaient à la RAF,* s’il pouvait chercher mon colis d’anniversaire. Miraculeusement, il a retrouvé mon colis tout aplati et j’ai réussi à en extraire une robe d’intérieur en soie légère, déchirée et dans un drôle d’état. Mais le reste était complètement inutilisable. Nous étions loin de penser que c’était le début d’une longue série de raids.

Nos pilotes étaient en permanence impliqués dans des combats tournoyants désormais et ils étaient complètement épuisés. Les jeunes pilotes, qui avaient 19 ans et seulement une dizaine d’heures d’entraînement derrière eux, ne faisaient pas le poids face aux pilotes expérimentés de l’armée de l’air allemande. Un de nos pilotes, qui avait seulement 19 ans, a réussi à sauter de son appareil. Mais pendant sa descente, des pilotes ennemis l’ont mitraillé. Il était mort en arrivant sur le sol. Cet acte cruel nous a tous rendus furieux, en particulier les pilotes.

On avait l’impression d’assister à des funérailles de manière quotidienne. La fanfare partait en tête en jouant une marche funèbre lente, le cercueil suivait, puis le commandant et les membres de l’escadron. On sortait du quartier général et on restait au garde-à-vous pendant que le cortège passait. On était tous très affectés par tout cela. À mesure que le cercueil avançait et alors que j’étais au garde-à-vous, je trouvais de plus en plus difficile de contenir mes larmes, particulièrement les fois où il s’agissait d’un pilote à qui j’avais parlé la veille.

Je suis partie au Pays de Galles comme « ACW », Aircraftwoman, et j’en suis sortie avec le grade de caporal et j’ai été affectée au College Magdalen à Oxford.** Après Oxford on m’a envoyée à Cheltenham [Gloucestershire, Angleterre] et ensuite, alors que j’étais devenue sergent, on m’a affectée à Andover [Hampshire, Angleterre] où j’ai rencontré mon mari qui était un navigateur de la RCF, de l’ARC je devrais dire, navigateur à Andover.

Il attendait qu’on le renvoie au Canada pour y subir une opération du dos à l’hôpital de Christie Street [Toronto]. Avant même qu’il parte au Canada pour cette opération, nous étions mariés. Et en mars 1943, je suis arrivée à Halifax au Canada, et après son opération du dos mon mari est devenu instructeur à London en Ontario et pour finir on l’a renvoyé en Angleterre pour continuer son service de navigateur sur des bombardiers.

Pendant ce temps, je suis restée au Canada. Et même si j’étais heureuse et que je vivais dans la famille de Doug, d’une certaine façon je me sentais complètement perdue. Alors un jour, alors que je travaillais dans le bureau de recrutement à Saskatoon [Saskatchewan], j’ai décidé de m’engager dans le CWAC. Je me suis enrôlée à Regina [Saskatchewan] et on m’a envoyée à Kitchener [Ontario] pour suivre l’entraînement de base.

Après la formation, on m’a envoyée à Dundurn en Saskatchewan. J’ai rencontré des jeunes canadiennes formidables et je suis sentie canadienne immédiatement. Après les six mois de service à Dundurn, on m’a annoncé que j’allais être affectée en Angleterre.

Le 5 mars 1945, jour de l’anniversaire de mariage de mes parents, ils se sont arrangés pour me retrouver sans un restaurant à Londres. On a passé un très bon moment ensemble et je leur ai dit au revoir à la station de métro et suis rentrée dans la grande maison où j’étais en garnison, où nous étions logées.

Quand je suis arrivée, les filles m’ont dit que notre commandant voulait me voir. On a toutes trouvé que c’était un peu bizarre. Et quand je suis arrivée à la porte, elle m’a accueillie en personne, m’a amenée dans la pièce, m’a fait asseoir, elle m’a offert du thé et des biscuits préparés sur un plateau, alors j’ai su que quelque chose n’allait pas. Elle m’a dit que mon mari et son équipage n’étaient pas rentrés de leur 29ème vol en Allemagne, qu’ils avaient été portés disparus. J’étais complètement désespérée et j’ai pleuré toute la nuit.

Après des semaines sans nouvelles l’espoir s’est affaibli, en particulier quand le jour de la Victoire en Europe est arrivé, le 8 mai, et qu’on était toujours sans nouvelles. Deux jours après le jour de la Victoire en Europe, j’ai reçu un appel, un message d’un officier de l’ARC disant qu’il avait vu Doug et les membres de l’équipage en marche, en Allemagne. J’étais tellement excitée et j’ai pris contact avec toutes les mères des membres de l’équipage, leur ai envoyé des télégrammes quand la nouvelle est arrivée.

Et ensuite, j’ai reçu un coup de téléphone de Doug, qui m’appelait de la base de la RAF à Tangmere dans le Sussex [Angleterre] pour dire qu’ils étaient tous sains et saufs et qu’ils avaient participé à une marche très dangereuse. Avec son équipage, ils sont très vite repartis au Canada, et j’ai suivi à bord d’un navire de troupes deux mois plus tard, travaillant dans le bureau sur le navire qui s’appelait le [SS] Île-de-France.

Je suis finalement arrivée à Regina où j’ai été rendue à la vie civile et j’ai retrouvé Doug, mon mari. On a vécu à Saskatoon et ensuite à Penticton en Colombie Britannique, où on a élevé trois garçons et une fille. J’ai retrouvé l’uniforme une fois encore en servant pendant dix ans comme adjudant du 259e escadron des Cadets de l’air de Penticton.

*Royal Air Force

**Université d’Oxford, Angleterre