Pour le témoignage complet de M. Bridge, veuillez consulter en bas.
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Transcription
Toute la guerre je l’ai passée avec les Argyll et les Sutherland Highlanders, qui sont partis pour la France en juillet 1944 et là-bas j’ai découvert la triste réalité de la guerre, avec beaucoup d’horreur, choqué et incrédule. J’étais le numéro deux sur une mitraillette Bren. Mon copain, lui, était le numéro un. Il transportait la Bren ou on partageait la charge. Moi j’avais un fusil. On a fini la campagne de Normandie. On est remonté et on a fait la bataille sur la Seine, en traversant du côté de Elbeuf, et on est monté en Belgique, près de Bruges et là c’est devenu très moche, vraiment moche n’est-ce pas, à Moerbrugge.
On n’a pas recommencé à bouger avant le 14 octobre et on nous a reçu l’ordre de traverser le canal Léopold (en Belgique) à l’extrémité est. Et on l’a fait sans problème, on a traversé sur un pont cassé alors qu’on était à pied. Et on a traversé et puis avancé sur la route jusqu’à une petite ville du nom de Watervliet. Et on a dû passer la nuit là.
Pendant la nuit, les allemands nous ont attaqués et ils tiraient des fusées éclairantes et on n’arrivait pas vraiment à les voir. Ça a été une nuit très effrayante. Les obus, des balles qui volaient dans tous les sens et des obus. Et on était dans une maison qui longeait la route qui était à peu près sûre. Mais le lendemain matin, quand le jour s’est levé, ils ont commencé un bombardement d’artillerie, les allemands ont fait ça. Ils avaient des gros canons qui étaient sur la côte et qui avaient fait demi-tour. Ils étaient là-bas pour protéger les côtes. Et les gros boulets ont commencé à atterrir tout autour de notre maison et un boulet a touché la maison, juste de l’autre côté de la route par rapport à nous et nous a carrément complètement déglingués. Et voilà, le boulet suivant est tombé tout près de la maison où on se trouvait et je regardais par la fenêtre et l’explosion m’a fait tomber, inconscient plus ou moins, m’a étourdi. Et je me suis aperçu que je ne pouvais pas me lever. Je n’étais pas touché physiquement, mais j’étais tellement terrifié et sous le choc que je ne pouvais rien faire, que je ne pouvais pas bouger. C’était horrible comme sentiment.
Ce docteur du poste régimentaire de secours, il m’a envoyé à l’hôpital dans le service de psychiatrie. D’autres blessés y sont allés aussi bien sûr, là-bas, pour des soins médicaux, moi j’y suis allé pour des soins psychiatriques. Et il a été décidé que je n’étais plus apte pour être sur les lignes de front, et croyez-moi, ça m’a soulagé parce que je ne pense pas que j’aurais pu survivre à ça encore une fois. Très peu de temps après cet épisode, notre unité a été déplacée et elle a traversé Anvers et est remontée dans l’estuaire de l’Escaut. Et nombre de mes amis là-bas sont devenus des victimes. Et j’ai pensé, bon sang, j’aurais pu être l’un d’entre eux si on ne m’avait pas déclaré inapte au combat.
J’ai porté cette croix pendant des années. Je pense que ça ne me quittera jamais. Alors ils m’ont placé dans un camp d’attente. Il y avait beaucoup de gens dans le même état, à ma grande surprise. Et ils ont fait de nous une compagnie de travail. On sortait et on creusait des tombes ou on sortait et on chargeait des camions avec des munitions et des choses comme ça, dans la région d’Anvers. Et cette compagnie de travail où on m’avait affecté, s’est déplacée à Nimègue, en Hollande, là-haut dans la saillie de Nimègue.
En 1944 juste au moment de Noël, j’ai été affecté à la 3rd Division Mobile Laundry and Bath Unit. On m’avait confié le magasin. Ils étaient situés autour de Nimègue, à deux pâtés de maisons du pont de Nimègue. Et vous pouvez avoir une idée des conditions là-bas. La ville avait été tellement bombardée, les immeubles s’étaient écroulés et il y avait constamment des tirs d’obus sur la ville, sur l’île et de l’autre côté de la rivière. Et j’ai servi là jusqu’à la fin de la guerre.