Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Le soldat Bernard Marquis, Tokyo, février 1952. "Après avoir vécu 11 mois au front à la Guerre de Corée et avoir reçu seulement deux douches durant ces 11 mois, je suis sur le chemin du retour de la Corée au Japon. Après avoir été débarassé du linge sale que j'avais sur le dos et avoir pris une bonne douche, on m'a habillé avec du linge neuf. Après je me suis rendu au studio pour prendre cette photo dont le flash fonctionnait avec de la poudre noire."
(Avec la permission du Projet Mémoire/Bernard Marquis)
"Je me rappelle Dextraze avait dit avant qu’on ait traversé le 38e parallèle : « Si vous voulez déserter, je vais être en arrière avec mes 50 millimètres puis je vais vous tirer. »"
Transcription
Moi je me rappelle le major Gauthier, il nous avait dit quand on a décidé qu’on allait en Corée, parce qu’il y a été une secousse [un moment] qu’on n’y allait pas [M. Marquis servit avec le 2eBataillon du Royal 22eRégiment], MacArthur [le général américain Douglas MacArthur, le commandant des forces des Nations-Unies en Corée] était rendu en Mandchourie et […] Là, quand ils ont décidé qu’on y allait là, le major Gauthier nous avait fait une assemblée pis il nous avait dit : « Les boys, vous venez de finir votre entrainement, vous allez trouver que c’est plus facile à l’action que l’entrainement que vous venez de finir ». Ça, c’est des choses que je n’oublierais pas. Même si t’es jeune, tu penses que lui il a de l’expérience puis il sait ce qu’il dit. Bien j’imagine qu’il y avait toujours des petits meetings de temps en temps. Je me rappelle Dextraze [le lieutenant-colonel Jacques Dextraze, le commandant du 2eBataillon du Royal 22eRégiment] avait dit avant qu’on ait traversé le 38eparallèle : « Si vous voulez déserter, je vais être en arrière avec mes [mitrailleuses] 50 millimètres [calibre .50] puis je vais vous tirer. » Ça, je me rappelle de ça, un petit meeting qu’il avait fait. Mais non, on a appris à mesure qu’on avançait sur les montagnes. On a commencé avant Séoul puis on marchait sur les montagnes. De temps en temps, bien il y avait, on pourrait, dire un sniper [tireur embusqué] ou un« gorilla » ou quelque chose qui était habillé en civil. Il tirait quelques coups et blessait quelqu’un et/ou le tuait. Il n’était pas trouvable, après il disparaissait. C’est arrivé plusieurs fois en montant de même. Entre la [colline] 355 et la [colline] 227, ç’a été pas mal plus sévère. Le lieutenant me dit : « Va trouver les deux, bien Laflamme, eux autres, je peux les nommer ils sont morts tous les deux. Laflamme puis Paquette, il dit, va trouver Laflamme puis Paquette », parce que j’étais avec le lieutenant [Mario] Côté, mais moi vu que j’étais tout seul, il y a trois pelotons, alors j’étais dans le peloton du milieu, avec le lieutenant Côté. Quand mon commandant m’a dit va trouver le lieutenant Coté, une fois que je l’ai vu il m’a dit : « Tu vas t’en aller coucher avec Paquette et Laflamme parce qu’ils ont un assez grand dugout [abri souterrain] pis ils ont de place pour toi. J’ai dit : “C’est bien correct”, je suis allé les trouver. Puis apparemment, on avait entendu dire qu’à quatre heures ou cinq heures [le soir] les Chinois avaient laissé savoir, les Nord-Coréens avaient laissé savoir qu’on allait y gouter. Qu’ils allaient nous bombarder. Comme de fait, à quatre heures juste ou cinq heures, ç’a commencé pis ça tombait beaucoup. Et je ne serais pas surpris qu’il y ait de nos mortiers qui sont tombés sur nous autres aussi. Ça faisait du “pitaillage” [bombardement] pas mal. Quand ç’a commencé, comme de fait, j’ai dit aux deux autres, on était étendu sur nos lits à terre si tu veux, pas des lits, mais à terre. Puis on jasait, comme de raison, pis quand ç’a commencé, moi, j’ai toujours été curieux de nature, je suis sorti dehors dans la tranchée. La tranchée est là, la porte dudugoutest là, et puis ledugoutest ici. Je suis sorti dans la tranchée pour voir ce qui se passait, pis là ça tombait là. Ça fait que là, les autres ils étaient Bren Gunners [servants de fusils-mitrailleurs Bren], ils sont montés sur la tranchée. Moi, je me suis assis à côté d’eux autres sur une boîte de munition. J’ai dit : “Je vais charger des magasins [chargeurs]». Ce n’était pas ma job mais j’ai dit : “Je vais charger des magasins”. Une boîte de munition, j’ai chargé un magasin, peut être deux, je ne sais pas ou un et demi. Je ne sais pas ce qui est arrivé, je me suis réveillé après. J’étais garroché [projeté] sur le mur, j’étais sans connaissance, peut-être assommé, ou sans connaissance je ne sais pas. Ça devait plutôt être assommé par le blast [l’explosion d’un obus]. J’étais le dos, assis à terre, le dos au mur. Qui était de ce côté-là, mettons que la tranchée est là. Et puis j’ai entendu quelqu’un se plaindre […] Moi, je me suis tâté, je ne voyais rien. Pour commencer, la boucane [fumée], je ne voyais rien. Je me suis tâté un peu. J’ai dit : “Aussitôt que je vais voir clair, je vais aller vous aider.” Quand j’y ai été, ils étaient morts tous les deux. Pis, moi, je n’avais pas une égratignure. D’après moi, l’obus est tombé sur ces deux-là, puis c’est eux autres qui ont empêché leblastde me... Bien, ça m’agarroché, mais je n’ai rien reçu de…. Ah ben là, je suis parti à courir, apparemment ça tombait chaque bord de moi. Puis les gars, pour aller trouver le lieutenant Côté. Et puis j’ai dit au lieutenant Côté : “J’ai deux blessés et puis j’ai besoin d’aide.” Il a envoyé quelqu’un avec moi, je ne me rappelle pas de son nom. Et puis, quand on est arrivé là, il n’y avait rien à faire. Je n’ai pas les qualifications pour dire qu’ils étaient morts, mais ils n’étaient pas en vie d’après moi. J’ai fait le mieux que j’ai pu, puis là j’ai retourné avec le lieutenant Côté. Laflamme et Paquette, le 24 novembre 1951 [les soldats Léonard Laflamme de Montréal et Albert Paquette de Longueuil]. Les Chinois, ils ne sont pas venus à l’entour de nous autres. Il y avait la [colline] 355 qui était là, nous on était ici et les Chinois sont venus comme ça puis ils ont essayé de venir comme ça de la 355. Parce que les Américains [du 2eBataillon du 7eRégiment d’Infanterie] s’étaient sauvés. Moi, je n’en ai pas vu de Chinois en tout cas. J’ai entendu des bombes tomber, ça, ça tombait beaucoup. La compagnie D, le commandant c’était le major [Réal] Liboiron. Le peloton qui a été évacué c’était celui du lieutenant Mc Duff, moi j’étais avec celui du lieutenant Côté.
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