Transcription
Notre travail c’était de déterminer exactement où se trouvaient les canons, où était l’ennemi, et quelle était la ligne de tir. On est partis en Europe au tout début de 1945. On est allé sur la ligne en France à Lemberg, en janvier 1943. On nous a finalement affectés à la 3ème armée, qui était sous le commandement de Patton (Général Patton), la 3ème armée de Patton, et c’est là qu’on a servi jusqu’à la fin de la guerre le 7 mai 1945. La division dit qu’elle a tiré le dernier coup des alliés sur le front est le 7 mai à 3 heures de l’après-midi. À ce moment-là, la 71ème (division d’infanterie) était celle qui était le plus loin à l’est de toutes les unités alliées sur front est.
Il n’y avait pas d’antisémitisme flagrant. On savait que vous étiez juif, comme on savait que les irlandais étaient des irlandais et qu’un polonais était un polonais, et ainsi de suite. Cependant, c’était un groupe de gens très cultivés et ça paraissait bien fonctionner. On avait les grandes fêtes qui étaient célébrées à la synagogue de Augsbourg, qui est l’une des rares synagogues qui subsistait en Allemagne. Elle était construite en pierre et ainsi de suite. Quand ils lui ont mis le feu, l’intérieur a brûlé, mais l’extérieur et le sol, et les murs tenaient debout.
La chose principale au sujet de la 71ème et les juifs c’est que la 71ème a libéré Gunskirchen Lager en Autriche. Gunskirchen était un camp annexe de Mauthausen (camp de concentration). A ce que je comprends il servait à la détention des juifs hongrois ou quelque soit le terme approprié. Mais ils s’en sont pris à eux plus tard que certains autres pays et on les a jetés dans, ce groupe a été largué dans la région de Mauthausen. Et simplement mis dans un camp de fortune et parqués pour qu’ils ne puissent pas s’échapper et laissés sans rien. Un de mes amis qui était dans le camp, m’a dit en substance que si ça avait duré trois jours de plus, on les aurait tous retrouvés morts. Mais le 71ème est arrivé, ils ont libéré les prisonniers.
Plus tard, il y a eu toutes sortes d’arrangements administratifs qui ont été faits, mais Dieu sait que nous n’étions pas impliqués dans tout ça. On a laissé une partie de l’infanterie. Je suis passé près du camp en camion en fait, mais j’étais au milieu d’un convoi de l’artillerie de campagne et moi je ne suis pas sorti, ça n’a pas été possible. Vous pouviez voir les prisonniers à l’extérieur qui déambulaient et nos gars qui commençaient à entrer. J’ai cru comprendre que nos gars ont tué un des gardes et que les prisonniers ont tué un des gardes. C’est tout ce que j’ai fait à Gunskirchen moi personnellement.
Je ne savais pas ce qui se passait. Vous voyez un tas de gars, un tas de gens avec des uniformes rayés qui marchent alentour. Je conduis ce camion de trois quarts de tonne ; et je m’évertue à rester dans le convoi et à ne pas être trop près, et pas être trop loin derrière. Je me souviens d’un des gars dans le camion qui a dit, Iverson, ce sont les tiens. Et ça a été, je pense, la première fois qu’il m’est venu à l’esprit que c’était un camp de concentration et que ça avait un rapport avec les juifs. Il y avait un tas de, tout le monde savait que ça existait, mais comme pour beaucoup de choses, vous ne pensez pas, hé, je suis ici, c’est moi ça. C’est comme pour la balle qui est toujours pour le voisin ; ça ne va jamais m’arriver à moi. Et je crois que comme j’avais d’autres responsabilités ce choc là est resté figé sur le moment. Et c’est seulement plus tard que j’ai réalisé ce qui s’est passé.