Project Mémoire

Ed M Green

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Edmund M. Green
Edmund M. Green
Ed Green (à gauche) et deux autres camarades attendant l'embarquement pour l'Extrême-Orient, août 1945.
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Ed Green et son équipage originel, automne 1944, Écosse.
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Carnet de bord d'Ed Green montrant un crash et un atterrissage d'urgence.
Edmund M. Green
En dernier ressort, j’ai tiré sur le câble d’ouverture du parachute, le petit parachute attaché au parachute principal et qui était tendu par un ressort. Il est sorti d’un bond, s’est positionné dans le sillage et m’a aspiré vers l’extérieur.

Quand me suis engagé dans l’armée de l’air, la RCAF le 15 février 1943, j’ai fait mes classes au dépôt n°1 de Toronto. Après avoir eu plusieurs affectations de formations techniques, j’ai été envoyé à l’école de tir n°3 à Macdonald dans le Manitoba, où j’ai reçu mon insigne de mitrailleur de bord le 26 novembre 1943.

Après être arrivé outre-mer, j’ai eu mon premier poste dans la 19ème Unité d’entraînement opérationnel à Kinloss en Ecosse où je me suis présenté en avril 1944. A l’ unité d’entraînement opérationnel, j’ai rejoint l’équipage de l’officier de bord Cliff Wenzel, un pilote qui en était à sa deuxième affectation dans les opérations. Le deuxième mitrailleur de notre équipage était le sergent de section Charlie Goodman qui était originaire de Windsor en Ontario.

Après avoir terminé l’entraînement avec l’Unité d’entraînement opérationnel sur un avion Whitley, l’équipage a continué avec une unité de conversion, une HCU, à Marston Moor et a poursuivi l’entraînement sur des bombardiers Halifax. C’est là-bas qu’on avait trouvé notre mécanicien de bord Burt Oldham. Après avoir fini l’entrainement sur le nouvel appareil, notre équipage a rejoint l’escadron 78 et le groupe de bombardement n°4, et s’est retrouvé sur la base de Breighton dans le Yorkshire.

Notre deuxième opération qui a eu lieu le 23 octobre était un vol de nuit à Essen. On était 1055 avions au total pour exécuter le raid aérien le plus important jusque là sur cette ville. Depuis la tourelle centre-supérieure qui se trouvait juste à l’arrière des ailes et qui pouvait pivoter à 360°, je surveillais les chasseurs ennemis, les autres avions et tout ce qui présentait de l’intérêt pour le chef. Tous les deux avec le mitrailleur arrière, on était les paires d’yeux supplémentaires du pilote.

Au dessus des villes très fortement défendues comme Essen, ce qu’on pouvait voir était effrayant, tout particulièrement les derniers instants du passage de bombardement. Le viseur de lance-bombes voulait obtenir une bomme image de la cible pour trouver le point de visée, pendant que Wenzel s’efforçait tant bien que mal de maintenir l’assiette du Halifax. Il y avait de nombreuses projecteurs qui parcouraient le ciel à la recherche des avions à signaler à leurs chasseurs. Pendant tout ce temps, les tirs anti-aériens étaient intenses.

Les allemands envoyaient aussi des fusées éclairantes qui planaient dans le ciel comme de la lave en fusion. Les équipages appelaient ça des épouvantails. Des bombardiers étaient touchés et certains explosaient, on voyait souvent les équipages sortir des avions en détresse et descendre en parachute dans la zone de la cible. J’avais le cœur sur les lèvres à chaque passage de bombardement.

Sur le retour de notre deuxième expédition, un moteur interne a pris feu quand on survolait la mer du Nord. L’avion avait reçu un éclat d’obus qui venait de la défense anti-aérienne quand on était pas loin de la cible. Wenzel a réussi peu ou proue à contrôler l’incendie pendant qu’on se préparait à un atterrissage en catastrophe sur l’aérodrome de Woodbridge près de Ipswich.

Ensuite, l’aile gauche à pris feu et Wenzel après avoir reçu la confirmation par le navigateur qu’on survolait bien les côtes anglaises, a donné l’ordre d’évacuer. Mon parachute était dans un casier près de la porte latérale. Quand je suis arrivé là, notre mitrailleur arrière avait des difficultés à sortir de l’avion. On avait un moteur et une aile en feu, ainsi qu’une hélice qui ne pouvait pas être entravée et qui battait comme un moulin à vent. On pouvait à peine se tenir debout dans l’avion.

Après avoir aidé le mitrailleur arrière à sortir, j’ai eu des problèmes avec mon parachute ventral. J’avais des difficultés à le détacher de mon harnais. En jetant un regard sur le fuselage j’ai constaté que le reste de l’équipage était parti. L’avion était sur pilote automatique et tombait. J’étais coincé à la porte arrière et la situation commençait à être désespérée.

En dernier ressort, j’ai tiré sur le câble d’ouverture du parachute, le petit parachute attaché au parachute principal et qui était tendu par un ressort. Il est sorti d’un bond, s’est positionné dans le sillage et m’a aspiré vers l’extérieur. Une des boucles m’a frappé dans la mâchoire, l’autre dans la tête près de l’œil. Heureusement pour moi, Wenzel faisait très attention à ce que nos harnais soient attachés bien serré, pour éviter d’être éjecté du harnais. La porte de sortie m’a arraché quelques lambeaux de peau entre les jambes et sur l’épaule. Mes pieds ont heurté la queue de l’appareil et j’ai perdu mes bottes d’aviateur.

Pendant la descente, alors que l’avion était en train d’exploser, je regardais tout autour les débris s’éparpiller sur une zone très étendue. Mon souci alors c’était de savoir si j’allais atterrir en plein milieu de ces débris, mais le vent m’a poussé au-delà des flammes. J’ai touché le sol si violemment que j’ai bien cru m’être brisé le dos. J’ai réussi à me débarrasser de mon parachute, et puis j’ai attendu qu’on vienne à ma rescousse en compagnie de Charlie Goodman, qui avait atterri pas très loin de moi.

Pendant qu’on attendait les secours, une bombe V1, qui avait Londres pour cible, n’est pas tombée loin et a explosé entre Charlie et moi. J’avais un sifflet accroché au col de mon uniforme et je sifflais sans relâche. Ca a aidé les secours à me retrouver dans cette nuit sombre et humide. On m’a emmené dans la base de l’armée de libération américaine à Debach dans le Suffolk. Frank Sonoski, notre opérateur radio, m’a rejoint un peu plus tard et en le voyant j’ai dit, quel endroit épatant. Des cigarettes américaines et du whiskey à gogo.

Comme je ne voulais pas inquiéter ma mère, je ne lui avait pas parlé de l’évacuation de l’avion ni de mon séjour à l’hôpital. En janvier 1945, elle m’a envoyé un extrait du journal le Lindsay Daily Post daté du 20 janvier 1945 qui disait, avec les canadiens qui sont outre-mer, l’évacuation d’un bombardier en perdition, dans la nuit pluvieuse et dans le brouillard anglais ils ont échappé de peu à la mort après l’explosion d’une bombe V1, voici ce qui est arrivé au sergent Ed Green originaire de Lindsay et au sergent Charles Goodman de Windsor en Ontario.