Project Mémoire

Edward Alden Jesseman

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Edward A. Jesseman
Edward A. Jesseman
Edward Jesseman en uniforme, à Hilnersum, Pays-Bas, 1945.
Edward A. Jesseman
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Télégramme annonçant la blessure d'Edward Jesseman en Allemagne, 1945.
Edward A. Jesseman
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Certificat de décharge d'Edward Jesseman, avril 1946.
Edward A. Jesseman
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Certifical médical d'inaptitude d'Edward Jesseman, 10 octobre 1940. C'est le papier de rejet qu'a reçu Edward lorsqu'il a voulu s'enrôler dans l'armée pour la première fois.
Edward A. Jesseman
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Edward A. Jesseman
Il m’appelle : « Ed! », je lui réponds : « Oui? ». Il me dit : « Sais-tu que tu es devenu père? », « Non », je dis. Je n’avais pas encore reçu mon courrier, mais voilà qu’en traversant le bois, je rencontre mon beau-frère.
Le 8 mars, j’ai été légèrement blessé par shrapnel, en Allemagne. J’ai été hospitalisé et quand je suis sorti de l’hôpital, la guerre était presque finie. Je ne suis donc pas retourné me battre. Mais l’histoire que je dois vous raconter, c’est que le 8 mars, quand j’ai été blessé, mon ami, Edwin Johnson, a été tué à côté de moi, seulement à quelques mètres. C’est pour dire à quel point la bataille était proche, on a été bombardé aux obus de mortier durant environ une demi-heure, peut-être plus, et avant que je me réveille de l’anesthésie, à l’hôpital qui était à Tilburg, en Belgique, mon frère – je ne sais pas comment il savait où me trouver – était à mon chevet, avant que je me réveille. Après, on s’est rencontré plusieurs fois parce qu’il était signaleur, il avait sa propre jeep, il se déplaçait beaucoup. En fait, il se garait derrière l’hôpital, et moi, puisque je pouvais marcher, je montais dans sa jeep, j’enlevais la chemise d’hôpital et j’enfilais ma tenue de combat, et on allait partout en Belgique et en Hollande, c’était tout à fait illégal. J’espère que les autorités ne vont pas l’apprendre, elles pourraient le renvoyer en prison par ma faute. Puis, on revenait à l’hôpital, on se garait à l’arrière, je remettais ma chemise d’hôpital et je retournais au pavillon, personne n’avait remarqué quoi que ce soit. Ce petit manège a duré deux semaines. J’ai fait une autre rencontre, mais cette fois-ci, c’était juste après la guerre. Je voyageais avec un groupe d’hommes, on était à l’arrière d’un camion, on n’était pas loin d’Apeldoorn, près de Nijverdal, dans le nord de la Hollande, enfin au nord-est d’Amsterdam. On traverse le bois, et on tombe sur un corps de cornemuses, et ce gars me crie quelque chose et devinez qui c’était. Le frère de ma femme. Il m’appelle : « Ed! », je lui réponds : « Oui? ». Il me dit : « Sais-tu que tu es devenu père? », « Non », je dis. Je n’avais pas encore reçu mon courrier, mais voilà qu’en traversant le bois, je rencontre mon beau-frère. Une autre fois, après avoir avancé dans des champs, on est tombé sur cette maison et cette ferme, et on les a saisies. Pour je ne sais plus quelle raison, je suis descendu au sous-sol qui était en fait une cave à légumes. Et là, il y avait environ huit civils allemands. J’ai pointé les marches d’escalier pour leur dire de monter et de sortir. Et j’ai remarqué que sur l’étagère, il y avait quatre rangées de fruits en conserve, de confitures, de gelées, il y avait des pêches, des cerises, enfin, vous comprenez ce que je veux dire. Nous, ça faisait un bail qu’on n’en avait pas mangé. J’ai donc pris un pot, je crois que c’étaient des pêches, je ne me souviens plus. Mais ça s’est su, et ce gars, il descend à la cave et il remonte, et quand il remonte, il tient quatre ou cinq pots. Mais on partait le lendemain matin, et lui, il avait creusé une tranchée de tir en face de la maison, à environ une centaine de pieds. Je n’ai pas pu le prévenir. Et voilà que ce bouc ou ce bélier – je ne me souviens plus – arrive par-derrière et lui donne un coup de cornes dans les fesses, tous les pots de conserve ont volé en éclat et se sont cassés. On avait donc saisi cette ferme, et au coin de la grange, il y avait une cage en barbelés. Et au beau milieu de cette cage, il y avait un beau gros œuf d’oie. Je me suis dit : « Oh, j’aimerais bien manger cet œuf au petit déjeuner. » Mais je n’osais pas y toucher parce qu’il aurait pu dissimuler une mine, et de toute façon, dans quoi est-ce que je l’aurais mis? C’est une autre chose, je ne me souviens pas, sauf une ou deux fois peut-être, je ne me souviens pas d’avoir mangé. Et je sais parfaitement bien que je n’ai jamais, jamais eu la possibilité de me laver ou de changer de vêtements.