Quand les allemands ont touché la voie ferrée, ils en avaient après la voie ferrée, mais la bombe est allée derrière les rails. Et moi j’étais dans la maison de mon père et de ma mère. Et on n’avait pas pu atteindre l’abri souterrain, alors on s’est abrités dans la chambre du fond. Et je venais de donner naissance à Jeffrey, il avait trois mois à ce moment-là. On est tous restés ensevelis sous les décombres pendant un certain nombre d’heures, je ne sais pas huit ou neuf heures peut-être. Mais Jeffrey, le bébé, il ne s’en était pas sorti, il était mort.
Après ça, mon père et ma mère sont montés à Preston dans le Lancashire au nord de l’Angleterre pour vivre avec ma sœur aînée. Et moi je suis partie vivre chez mon frère dans le Surrey. Mon frère avait une cordonnerie et il était aussi pompier bénévole. Quoiqu’il en soit son atelier de cordonnier avait été bombardé. Alors on l’avait embauché à plein temps chez les pompiers. Il avait deux enfants et on les a évacués à Londres et dans les alentours avec tous les autres enfants. Alors, j’ai quitté les magasins de l’armée et de la marine pour aider à la collecte d’argent en faveur des enfants qui avaient été évacués.
J’ai trouvé un travail dans les autobus, conductrice d’autobus, mais après deux jours, je ne pouvais plus supporter le mouvement ni les émanations. Alors je suis allée trouver l’inspecteur et lui ai dit « Je démissionne. » Bon, a-t-il dit, « Vous ne pouvez pas démissionner en temps de guerre, alors vous allez devoir aller en prison. » Alors je leur ai dit que ça m’était égal et ils m’ont renvoyée chez moi. Bon, deux jours plus tard, quelqu’un a frappé à ma porte et c’était quelqu’un du gouvernement et il m’a dit de me présenter à cette adresse. Il s’est avéré que c’était un immeuble quelconque du côté de Marble Arch. Je me suis présentée là et un garde armé m’a escortée jusqu’au cinquième sous-sol. C’est tout ce que je peux dire à ce propos. J’étais vraiment nerveuse à ce moment-là parce qu’ils m’avaient fait signer tous ces papiers et avaient dit que si je m’avisais d’en parler à quiconque, mes amis ou ma famille, je serais jugée pour trahison et exécutée en raison de la loi sur les faits de guerre [ War Mesures Act]. Ensuite, on m’a escortée jusqu’à un endroit sous haute surveillance, on a pris mes empreintes digitales et on m’a donné un badge de sécurité. Et après, une double porte à l’épreuve des bombes s’est ouverte et on m’a conduite à mon espace de travail. Ce que j’ai vu ce jour-là, je n’en ai jamais parlé à personne, pendant toutes ces années jusqu’à ce que Keith me demande mon numéro d’ancien-combattant l’été dernier. Vous voyez, on ne m’en a jamais donné un. J’ai pensé que c’était pas grave d’en parler après 60 années parce que tout le monde est sans doute mort à présent.
On m’avait enrôlée dans les services secrets et je travaillais avec cinq autres femmes à l’approvisionnement des navires de la marine marchande avec toutes les denrées nécessaires comme la nourriture, les vêtements, les couvertures etc. pour la flotte britannique toute entière. La raison pour laquelle c’était tenu sous le sceau du secret c’était parce que je connaissais la position exacte de chaque navire faisant partie de la marine anglaise. Mon travail c’était d’organiser le planning des livraisons de chacun des navires marchands à chacun des navires de guerre. C’était comme dans les films, il y avait un grand tableau noir à un bout de la pièce et plusieurs personnes recevaient les informations sur la position des navires qui à leur tour rendaient compte à d’autres personnes qui bougeaient des maquettes de bateaux et sous-marins en bois sur une maquette à l’échelle de la Manche et de l’océan Atlantique. Il y avait toujours des huiles dans la pièce et beaucoup d’action quand ils étaient au milieu d’une bataille. Ce qui était triste c’était, qu’on savait avant tout le monde quand un bateau avait coulé. Je rentrais à la maison tous les soirs et je devais mentir à propos de mon travail de secrétaire qui était rasoir, et je changeais toujours de sujet quand quelqu’un s’y intéressait de trop près.