Après avoir été affecté à quelques unités de réserve, je suis à passé à l’unité de Heaton Park près de Manchester. Plusieurs gars se sont retrouvés là et, à tous les jours, les gars se mettaient en rang pour recevoir les nouvelles sur qui serait envoyé en formation avancée au Canada ou en Rhodésie. J’avais entendu parler du Canada à l’école. Je connaissais la rivière Fraser et ses saumons. Et, je connaissais les montagnes Rocheuses. Et, je savais qu’il faisait très froid au Canada et c’est à peu près tout ce que je savais. En tous cas, j’ai abouti à bord d’un navire de transport des troupes. C’était le (HMS) Queen Elizabeth, peint en motif de camouflage gris, comme un navire pour les troupes. Nous avons traversé l’Atlantique en juin 1943, en zigzagant tout le long pour éviter les sous-marins. J’ai beaucoup souffert du mal de mer tout au long du parcours. Nous sommes éventuellement arrivés à Winnipeg où j’ai suivi une formation à l’École d’observation aérienne. J’ai fais des travaux avancés en salle de classe et ensuite j’ai commencé mon entraînement de pilotage à bord de l’avion d’entraînement Avro Anson.
Et, nous faisions sans cesse le tour de Winnipeg, nuit et jour. La nuit, nous pouvions voir la ville au loin, à travers la brume; elle s’illuminait comme un coussin à épingles scintillant. La ville était toujours en vue. Et nous continuions toujours à faire le tour de la ville. Nos pilotes n’étaient pas des pilotes intelligents en uniforme d’aviation. C’était des pilotes de brousse qui portaient des chemises careautées et des casquettes de baseball et qui, certains d’entre eux, fumaient des petits cigares puants dans le cockpit.
Je sais bien qu’ils s’ennuyaient à mort lors de l’entraînement. Nous étions sensés calculer l’heure estimée d’arrivée à une destination quelconque sur notre parcours. Mais, je crains, que je n’étais pas très efficace. Je n’étais pas assez vite ; c’est comme si ma pensée ralentissait dans les airs. Je finissais par passer un bout de papier au pilote qui lui, me regardait, retirait le cigare de sa bouche et me disait en grognant, ‘’Eh, p’tit gars, on a dépassé Carberry il y a déjà 10 minutes.’’ Et, après une petite discussion amicale avec l’instructeur, on m’a renvoyé du programme. Je m’y attendais. Et, j’ai été envoyé dans une unité de réserve à Brandon (Manitoba), une autre unité de réserve, celle-ci pour le personnel volant qui avait coulé leur cours. Il y avait des pilotes et autres tous rassemblés et mis en disponibilité pour les transferts. Évidemment, il y avait un temps d’attente de neuf mois pour le cours de cibleur de bombes et on n’allait quand même pas me laisser éplucher des patates pour huit ou neuf mois alors, on m’a transformé en artilleur aérien.
Beaucoup de controverses existent sur oui ou non, nous aurions dû nous en tenir à la Convention de Genève. La Bretagne et le Canada aussi, je suppose, ont été des signataires de cette entente dans les années 1920. Mais, à ce moment là, les bombardements, c’étaient purement théorique. Il n’y avait pas de guerre en cours. Je me suis débattu avec cette question pour plus de 60 ans. J’ai écouté les critiques et tous les arguments pour et contre. Et, je crois fermement qui si nous avions agit en règle avec la Convention de Genève, il n’y aurait tout simplement pas eu de bombardement des villes allemandes. Toutes les manufactures d’armes étaient situées dans ou autour des grandes villes. Et, les résidences des travailleurs étaient situées autour des manufactures. Il était donc impossible de bombarder les manufactures sans toucher aux résidences des travailleurs, sans toucher au peuple allemand. La même situation s’était produite en Angleterre lors du bombardement des villes britanniques par la Luftwaffe. Nous savions pertinemment bien qu’il y aurait des dommages collatéraux.
Et, bien sûr, l’Allemagne, Hitler, ne pouvait envoyer que 200 avions à la fois lors du blitz parce que c’est tout ce qu’il avait à sa disposition en fait de bombardiers. Lorsque notre tour ’est venu, nous pouvions balancer un tonnage de bombes dix fois plus grand sur les villes allemandes qu’ils avaient lancé sur nos villes. Plusieurs m’ont dit par la suite qu’on aurait du lancé le même nombre de bombes comme si c’était un match de hockey avec le même nombre de joueurs de chaque côté et avec un arbitre qui décerne des pénalités. Ce qu’ils oublient c’est que la guerre, et spécialement la Deuxième Guerre mondiale, c’était une question de vie et de mort, une question de survie. C’était eux ou nous.
Alors, j’étais et je suis toujours en faveur du fait que les Alliés ont ignoré la Convention de Genève. Si nous n’avions pas bombardé les villes allemandes et les manufactures d’armes, toute leur production en tanks, en avions, en navires et en sous-marins aurait fait que la guerre aurait pris un tout autre tournant.
Honnêtement, je crois que parfois, pour venir à bout d’un grand mal, il faut choisir un moindre mal. La guerre, ce n’est pas noir et blanc, c’est un dégradé avec beaucoup de gris. L’idéalisme n’y a pas sa place et la moralité non plus. Il est idiot et stupide de chercher la moralité dans la guerre parce que la guerre est amorale. La guerre, c’est le mal. Tuer, c’est mal. Mais parfois, on n’a pas le choix, on doit faire le mal. La Bretagne, particulièrement sous Winston Churchill et les Alliés n’étaient pas prêts à tout risquer pour respecter la Convention de Genève.