Project Mémoire

Estelle Aspler

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Une page de l'habillement Estelle Tritt Aspler Ruth et de la déclaration du matériel, le suivi des différents éléments qu'elle avait été délivré. 1944.
Estelle Tritt Aspler Ruth et d'autres de # 18 Hôpital général canadien (CGH) économisant le bois pour les foyers. 1944.
Estelle Tritt Aspler Ruth photo avec ami AW Lindsay dans Bayeaux.
Estelle Tritt Aspler Ruth, à Ottawa, 1994. Aspler a été invité à déposer une couronne au Monument commémoratif de guerre à l'honneur les femmes juives qui ont servi dans les Forces canadiennes.
Armée de terre canadienne document octroi Estelle Tritt Aspler Ruth permission de Voyage à Londres pour la fréquentation des «services spéciaux juif." Mai 1944.
« Le Jour J, on a entendu des avions voler toute la nuit et au bout de quatre ou cinq jours, on a reçu les premiers blessés. »

Transcription

Estelle Ruth Tritt Aspler. J’ai été infirmière militaire au grade de lieutenant, de 1942 à l945. Je me suis rendue en Angleterre avec un agent de l’Hôpital général du Canada no 18. Nous avons été affectés à différents hôpitaux canadiens. Nous avons soigné une division Highland ayant contracté le paludisme. Ils venaient du Moyen-Orient et d’Italie. Les soldats avaient reçu des médicaments antipaludiques lorsqu’ils étaient au Moyen-Orient, mais lorsqu’ils sont partis en congé, ils ont cessé de les prendre. Les parasites étaient encore dans leur système et ils ont développé le paludisme. Et nous avions des unités entières dans nos quartiers. On pouvait faire l’appel nominal. Ils étaient tous là. Le soir du jour J, nous pouvions entendre les avions passer dans le ciel à toute heure de la nuit. Après quatre ou cinq jours, nous avons commencé à recevoir des hommes qui avaient été blessés le jour J. Mais ils étaient passés d’un hôpital à l’autre avant que nous les recevions. Nous sommes partis pour la France et nous y sommes arrivés le 14 juillet. Nous sommes allés à l’extérieur de Dieppe. On a demandé à certains d’entre nous de se réinstaller à Bruxelles. Puis de Bruxelles à Anvers. L’infirmière en chef MacDonald nous a demandé de porter notre tenue de combat, ce que nous avons fait. L’infirmière en chef Schaffner nous a accueillis au quartier général de l’armée à Bruxelles, choquée de nous voir en tenue de combat. Après tout, on n’aurait pas porté de pantalon à Toronto ou à Montréal. Une autre infirmière juive m’accompagnait, Anne Chapman. Partout où j’allais, je cherchais des gens partageant ma religion et qui avaient vécu des moments difficiles. À Anvers, j’ai trouvé un petit groupe de personnes qui s’étaient réunies, des survivants pleurant leurs disparus. Un homme qui avait été embarqué et envoyé dans un camp de travail, et qui avait réussi à s’en échapper, a tout simplement constaté que son épouse et ses enfants n’étaient plus. Des bien tristes histoires. J’ai passé quelques jours de congé à Paris. J’y ai rencontré une communauté juive. Ils tenaient une fête pour les enfants et les personnes qui les avaient abrités. Et là encore, on entendait les histoires de personnes qui avaient été sauvées par des amis, des voisins ou de parfaits étrangers. Anne et moi avons trouvé les familles qui avaient survécu, dans le souterrain, avec l’aide de voisins. Et nous y avons passé la première nuit du Séder. Nous nous sommes rendus dans le lieu exigu qu’ils utilisaient comme synagogue. Nous y avons trouvé des compatriotes de l’Armée canadienne, des Français, des Polonais. Ils s’y étaient réunis. La petite communauté a ramené quelques garçons avec eux à la maison, et nous sommes allés avec une autre famille. Et à la table, il y avait un rabbin qui venait de l’Allemagne. Il avait travaillé dans le souterrain et semblait présenter des symptômes de la tuberculose. Un jeune homme d’environ 18 ou 19 ans, que les Hollandais voulaient enrôler dans l’armée pour l’envoyer dans les Indes orientales. Il ne savait pas s’il voulait s’enrôler ou plutôt essayer de retrouver ses parents qui avaient été expulsés. Et il y avait deux plus jeunes, quatorze et quinze ans, qui refusaient de parler allemand. Ils ne parlaient que le néerlandais. C’était une soirée bien singulière.