Né à Toronto, enrôlé à Toronto. À l’âge de 16 ans en fait, j’ai un peu triché [rires]. Je n’étais pas sensé être dans l’armée mais j’y suis entré quand même. Ils ne se sont pas rendus compte de l’écart d’âge, donc je m’en suis tiré plus ou moins jusqu’au moment d’aller outre-mer en 1939. À ce moment-là je faisais partie de la 2e compagnie du parc du Génie du Corps royal du génie canadien. Bien sûr, quand il a fallu signer mon enrôlement définitif en 1940, ils ont découvert mon âge et j’ai dû quitter l’armée. Je me suis retiré pendant un an environ.
Comme je n’ai pas réussi à obtenir le consentement parental, j’ai raconté des blagues [rires] et j’ai pu revenir en 1940. Je suis resté jusqu’à la fin de la guerre, en 1946. Ils n’ont pas découvert ma différence d’âge pendant tout ce temps donc j’ai pu m’en tirer. Je me suis enrôlé de façon définitive avec le régiment Lincoln et Welland d’Hamilton ou de Niagara-on-the-Lake. C’est là que j’ai commencé mon entraînement.
Le régiment Lincoln et Welland était un régiment d’infanterie. On a fini par être impliqués dans l’avancée vers le nord. Comme je l’ai dit, j’ai atterri à Caen et j’ai fait un peu d’entraînement là-bas. De là, de France, on est allés en Belgique, puis en Hollande. Je faisais partie du peloton antichar. On devait traîner un canon de 6 livres [canon antichar britannique] et un porte-mitrailleuse Bren avec nous et on a remorqué ça dans toute l’Europe. Je ne sais pas si vous connaissez le canon de 6 livres. On le tirait avec une remorque et le porte-mitrailleuse Bren avait un attelage qu’on accrochait au canon, et partout où on allait, le canon et la remorque allaient aussi. Si vous aviez un travail à faire, par exemple essayer de se débarrasser de certains chars, c’est le canon de 6 livres qu’ils envoyaient pour faire le travail.
On était dans un emplacement, on devait se disperser et partir et mon sergent, qui était le commandant de notre canon antichar, était hollandais. On se préparait à partir ce jour-là quand on a vu un Allemand mort étalé sur le canon. Je ne sais pas ce qui est arrivé au soldat mais on l’a enlevé de là et on l’a laissé sur place. On devait partir. La bataille faisait rage autour de nous et on n’avait pas le temps de s’arrêter et de penser. On ramassait son fusil et on partait.
C’était la nuit et bien sûr [?] ils allaient et venaient en nous bombardant. Et bien sûr, il s’est avancé jusqu’au canon et il a été abattu. Je ne sais pas ce qui allait se passer mais on ne s’arrêtait pas pour penser ou poser des questions. Il était là et il n’aurait pas dû être là. On pouvait les voir à distance vous savez, c’était un endroit boisé. Juste au crépuscule, on pouvait les voir bouger de l’autre côté. Donc on a dû mettre une garde en place pour faire la patrouille de nuit, pour les surveiller, pour qu’ils n’essaient pas de nous avoir. Malheureusement, je pense qu’il ne s’est pas rendu compte qu’on était réveillés. Quand il a essayé de prendre le canon, il a été abattu. On était là-bas pour une raison et les risques de se faire tuer étaient grands et c’était la même chose de leur côté.
C’était en Hollande et il s’est trouvé que le commandant adjoint de mon régiment avait fait partie des Argyll and Sutherland Highlanders [of Canada, Princess Louise’s Reserve Infantry Regiment]. Bien sûr, ils avaient une fanfare, un corps de cornemuses qui m’intéressait. Je lui ai demandé si je pouvais être transféré chez les Argylls. C’était vers la fin de la guerre et on ne faisait pas grand-chose. Il m’a dit : « laisse-moi m’en occuper, je vais voir si je peux te faire transférer ». C’est ce qu’il a fait et j’ai été transféré. À cette époque les Argylls étaient à Berlin. Ils étaient classés dans la Brigade [Infanterie] de Berlin. Eh bien, j’avais été tambour pendant, je pense qu’on peut dire la période détendue, la période d’entraînement à Niagara-on-the-Lake. Bien qu’on n’était pas reconnu comme corps de cornemuses, notre colonel, le colonel Bewer, était un Écossais et il voulait une fanfare. Comme il nous restait des fonds, ils nous ont acheté des instruments, les cornemuses et les tambours. Et bien sûr on avait aussi des gens capables de nous donner des leçons, c’est comme ça que je suis entré comme tambour et que j’ai fini sergent d’état-major dans la fanfare [rires].
On a vu passer beaucoup de cornemuseurs, celui dont je me souviens en particulier, c’est notre cornemuseur-major, John Wakefield. Comme je l’ai dit, on a dû s’arrêter de jouer vers 1942 parce que c’est le moment où ils ont décidé d’envoyer le régiment en Europe ce qui voulait dire qu’on était en premier des soldats d’infanterie et en second un corps de cornemuses. On a perdu nos instruments jusqu’à la fin de la guerre, mais pour moi elle était presque terminée à Berlin. J’ai pu demander au colonel d’être transféré là-bas vu qu’il avait été un Argyll et qu’il était devenu le colonel de notre régiment. Il avait été le commandant adjoint dans les Argylls. Donc quand l’occasion s’est présentée, je lui ai demandé si je pouvais être transféré et il l’a fait aimablement. En tout cas, ça m’a plu.