J’étais de retour à Brockville [Ontario] avec mon unité et puis ça a changé et on nous a envoyé à Prince George en Colombie Britannique. Ils étaient très inquiets à propos de la possibilité d’une invasion japonaise à ce moment-là, alors ils avaient d’autres unités alignées le long de la côte et ils voulaient que la défense soit plus dense, alors ils nous ont envoyés à Prince George. Ca s’est passé en 1942 et il faisait tellement chaud là-bas et c’était tellement dur de dormir dans des tentes où on mangeait du sable, et on dormait avec et puis on le buvait aussi. Alors on en avait vraiment marre de ce régime là.
Une annonce avait été affichée sur le tableau nous offrant l’occasion de nous joindre à une unité qui venait des Etats-Unis pour former une unité des forces spéciales. Et dix-neuf officiers de mon unité du moment avaient eu le courage de se rendre au centre médical pour avoir une chance de sortir de cette saleté de sable et rien d’autre. Ca nous avait pris de, je crois que j’étais arrivé à 7 heures du matin et vers 4 heures de l’après-midi seulement, on m’avait dit d’attendre. Et ça c’était une bonne chose, car j’avais pu m’asseoir et boire un verre d’eau. J’étais le seul des 19 officiers à être sélectionné. Il y avait cinq médecins qui vous examinaient de la tête aux pieds et s’assuraient que vous étiez en bonne forme.
On était à Helena dans le Montana. Il y avait un endroit où ils avaient prévu d’assurer l’entraînement du 1er Détachement du Service Spécial. Il y avait à peu près 250 à 300 canadiens, certains étaient officiers, une certaine quantité d’hommes étaient les premières unités là-bas. Et je veux expliquer de manière catégorique que le film « La Brigade du Diable » [1968] qui a été tourné à Hollywood est exagéré à l’extrême et complètement faux quand il montre des images de brutes américaines en train de s’arracher les oreilles avec les dents et d’être aussi mauvais que possible, au moment de la rencontre avec le groupe canadien. Mais la partie qui est vraie c’est qu’on n’avait pas de fanfare avec nous, il n’y avait pas de musique et c’est très différent de la version hollywoodienne. Les américains n’ont pas aimé le film et nous on ne l’a pas aimé non plus, qu’ils disent qu’on nous avait maltraités et qu’ils étaient trop violents et qu’ils sortaient tout droit de prison pour aller dans les camps des forces spéciales. Tout ça ce n’était pas vrai. Ce qui s’était vraiment passé c’est que notre unité avait été séparée, les officiers avaient été mis à l’écart du groupe, les officiers canadiens je veux dire, les hommes avaient été remis aux mains de groupes américains qui devaient s’assurer qu’ils arrivent à temps pour le repas car on avait sauter les repas dans les trains. Vous ne mangiez pas trop dans le train. Et ils avaient faim et tout le monde avait faim.
On avait mis les officiers en rang. Je crois qu’on avait entre 12 et 15 officiers avec nous. Les officiers américains étaient plus nombreux, une vingtaine une quarantaine peut-être, quelque part entre les deux. On s’était approchés, un peu comme ce qu’on voit dans une rencontre de hockey, où à la fin du jeu, ils s’approchent et se serrent la main et bien c’est ce qu’on avait fait. On échangeait nos noms avec les amis mais personne ne se souvenait de qui était qui de toutes façons. Et puis c’était terminé. On nous avait emmenés au mess des officiers, qui n’était rien de plus qu’une autre tente. On avait pris une bière et ça nous avait bien détendus et on avait fait connaissance avec quelques officiers qui allaient devenir nos amis après.
J’avais été choisi pour être moniteur de saut [expert en saut qui forme les parachutistes] et en même temps, et je devais m’occuper de commencer une compagnie. La compagnie devrait être composée de 80 hommes. Et puis il y avait trois moniteurs de saut et deux avions. On en avait seulement un de plus et on travaillait très dur mais je faisais sauter un groupe de 24 hommes, on commençait à 7h30 du matin et on finissait vers midi à l’heure où le vent se levait. Donc on a fini par avoir 80 hommes bien entraînés et de ces dix là dans la section, il y avait 1 commandant et 10 hommes, et chacun d’eux avait une spécialité comme le fusil, un autre pouvait être un bombardier, un autre savait faire autre chose. Et il y avait dix ou douze trucs qui pouvaient donc être mis en pratique, s’il était sniper professionnel alors on le prenait comme sniper. A ce moment là on en était arrivé au point où on pouvait mettre en place une unité de bataille autour de ce 1er détachement du service spécial.