Project Mémoire

Guy Robitaille

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Guy Robitaille
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Guy Robitaille en pleine démonstration d'entraînement des troupes de ski à Valcartier au Québec en 1941.
Guy Robitaille
Historica-Dominion Institute
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Les médailles de Guy Robitaille, la plus voyante (à gauche) est la Croix Militaire qui lui a été décernée pour « un acte d'audace exemplaire durant les opéractions actives contre l'enemi».
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Guy Robitaille (à gauche) à l'École de ski n˚13 à Valcartier au Québec, en compagnie du major-général Thomas-Louis Tremblay et du lieutenant-colonel Georges Vanier (à droite), lequel est par la suite devenu Gouverneur Général du Canada.
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Guy Robitaille lors d'un événement du Projet Mémoire au centre de santé des anciens combattants Perley Rideau à Ottawa le 9 juin 2011.
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Citation à la Croix Militaire décernée à Guy Robitaille pour ses actions en Sicile en 1943.
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J’ai pensé à décamper de là où j’avais été blessé en premier et retourner immédiatement à mon point de départ. Mais j’ai dit, non, non, je vais me prendre une balle dans le dos. Si vous vous prenez une balle dans le dos, votre fierté disparaît. Vous n’avez pas rempli votre mission. Vous devez mener et mener jusqu’au bout.

Premièrement, à l’école, on avait un membre du Royal 22e Régiment qui nous faisait la gymnastique à l’école au printemps. Et je me souviens d’un gars du nom de Gravel, le Sergent Gravel qui appartenait à la force permanente des Van Doos (surnom du Royal 22e Régiment), qui nous faisait faire des pyramides en cours de gymnastique. Ça m’impressionnait beaucoup, je n’avais jamais vu ça. Le gars m’a vraiment regardé comme un soldat de profession et j’ai dit, bon sang, je crois que je devrais être soldat. Et c’est à ce moment-là que j’ai pris la décision de m’orienter vers l’armée. Alors je suis allé voir le commandant du Régiment de Lévis (régiment de réserve local) qui était commerçant à cinq minutes de chez moi. Il était allé à l’école avec mon père, il me connaissait, il connaissait la famille, il connaissait tout le monde là-bas. Alors je lui ai dit, j’ai dit, j’aimerais rejoindre le Régiment de Lévis. Oh, a-t-il dit, tu as 18 ans, j’ai répondu, presque Monsieur, presque. J’avais 16 ans et demi. Et bien, a-t-il dit, je ne sais pas trop, a-t-il dit, je vais essayer de te trouver un boulot là-bas. Alors il a dit, présente-toi au Régiment le 9 ou le 19 avril 1937. Et au printemps 1938, il a fallu que je commence la formation de sous-officier à Valcartier (Québec), l’entraînement des sous-officiers. Encore une fois, j’étais assujetti au niveau d’instruction des officiers des Van Doos ainsi qu’au niveau des sous-officiers brevetés. Et je pense que je m’en suis bien sorti, ça m’intéressait, j’étais motivé, pas de doute là-dessus. Bon, en tout cas, on est montés jusqu’au front (en Italie après avoir été envoyé de son régiment pour servir avec le Royal 22e Régiment), on a débarqué le 10 juillet 1942 (1943). Quelqu’un est venu de chez le commandant et il a dit, le patron veut te voir. Alors je suis allé au régiment, et j’ai découvert que le quartier général régimentaire et l’adjudant étaient là-bas, il a dit : « le Colonel (Paul-Émile) Bernatchez veut te voir, et le voilà avec ses binocles sur le nez, qui regarde une carte et (inaudible). Et il me parle, sans même me regarder en face. Et il me raconte que je vais emmener mon peloton faire une patrouille du côté de l’ennemi là-bas à quatre ou cinq kilomètres de là et voir s’ils occupent une colline. Bon en tout cas, j’ai été sélectionné pour m’y rendre et parce que je connaissais le terrain, où aller, alors ils m’ont mis à nouveau en peloton de tête. Alors j’étais déterminé. On a vu l’ennemi, au sommet de la colline, courir avec des mortiers dans les bras, des obus de mortiers (les mortiers sont des armes qui tirent des obus explosifs à vitesse réduite sur une trajectoire courbe en cloche). Et j’avais parfaitement conscience des mortiers à cette époque et alors c’était une colline et il nous fallait trouver un endroit pour nous poser et nous préparer à commencer. Alors on a avancé et puis la rive de la rivière s’amenuise petit à petit et quand elle était pratiquement parallèle au lit de la rivière, j’ai fait stoppé le peloton à cet endroit, alors nous étions, disons de ce côté-ci plutôt que de celui-là. Et alors c’est là que j’ai attendu. En tout cas, comme j’étais déjà sur la droite, il (un autre commandant de peloton) a dit, tu y vas en premier sur la droite et l’autre aura une bonne protection, c’est moi qui m’occupe du groupe d’appui immobile. Mais un groupe d’appui immobile n’est pas inactif, il est actif, il essaye de pousser l’ennemi à lui tirer dessus plutôt que sur l’autre gars, celui qui est en mouvement. Donc j’étais doué pour le travail que j’avais et on a commencé par traverser la rivière vers, avait une barrière à passer, une voie de chemin de fer à traverser et puis on est arrivés au pied de la colline, à l’endroit où les allemands se trouvaient. Et bien sûr ils m’ont gaulé à une certaine distance de là. Et puis j’ai été blessé, une balle dans la jambe gauche, l’os ne s’est pas cassé. Et puis j’ai été blessé au bras et à la poitrine, vous savez. Et là c’était fini pour moi. Alors il y a autre chose qui s’est passé c’est à dire que vous ne perdez pas forcément conscience mais vous commencez à vous occuper de vous-même, à vous surveiller. En tout cas, je savais que si je restais là où j’avais été blessé, je n’en aurais pas pour longtemps et puis le mortier, la fumée du mortier de 10 centimètre c’est du phosphore (un élément chimique qui a une réaction à l’air très importante) et un champ avec du blé de cette hauteur, ça fait brûler le champ. Le vent venait dans ma direction alors si j’étais resté là où j’étais, j’airais été, à mon insu, j’aurais été victime de la fumée et de l’incendie à cause de ce blé. Voyez ? Alors il fallait que je me déplace à un autre endroit qui avait déjà brûlé complètement. Alors je me suis déplacé d’un endroit possible près de moi brûlé par la fumée et le mortier et vais dans un, mais un des problèmes ici c’est que si le feu a déjà nettoyé tout le blé dans le secteur, la pierre sur le sol s’est réchauffée sous l’effet de la chaleur. J’ai eu quelques brûlures sur le dos. Et puis le, pas de doute il me fallait un traitement médical. J’ai pensé à décamper de là où j’avais été blessé en premier et retourner immédiatement à mon point de départ. Mais j’ai dit, non, non, je vais me prendre une balle dans le dos. Si vous vous prenez une balle dans le dos, votre fierté disparaît. Vous n’avez pas rempli votre mission. Vous devez mener et mener jusqu’au bout. Alors ils sont venus près de moi et on a tenté de me mettre des pansements d’urgence sur la poitrine et la jambe et quand j’ai réalisé que les gars étaient autour de moi, je les ai renvoyés dans la zone de combat. Et puis je suis resté dans le champ jusqu’à environ 9 heures le lendemain matin et quatre gars portaient un brancard pour moi. Ensuite on m’a transporté un peu plus loin et ce sont ceux qui m’ont amené au poste de secours régimentaire.