Project Mémoire

Hal Foster

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Insigne du 9e Bataillon d’infanterie légère de Durham, de la 7e Division blindée appelée les Rats du désert, septembre 1944. Hal Foster a servi dans les Rats du désert dans le cadre du projet Can-Loan, qui consistait à « prêter » des officiers canadiens à l’Armée britannique.
Article du Sunday Dispatch du 8 avril 1945 rapportant que la stratégie des derniers mois du conflit européen a permis d’isoler les armées d’Hitler dans quelques zones d’Allemagne.
Hall Foster et Bill Hannah lors d’un dîner commémorant le Can-Loan donné à l’hôtel George de Vancouver, en Colombie-Britannique, le 11 novembre 2002.
Soldats de la filiale 15 de la Légion royale canadienne à Abbotsford au défilé du 50e anniversaire du Jour J. Hal Foster est photographié à droite.
Titre d’un article du Sunday Dispatch du 8 avril 1945 rapportant que Field-Marshall Montgomery et les Rats du désert se trouvent à moins de 250 kilomètres de la capitale allemande et qu’ils approchent de Bremen.
Nous avons perdu les trois quarts de ces hommes, qui s’étaient courageusement illustrés à mon avis.
Je m’appelle Hal Foster. J’ai servi dans le groupe Can-Loan, d’abord comme lieutenant, puis comme capitaine en Normandie et comme commandant d’une compagnie d’infanterie. Peu de gens savent vraiment ce qu’était le projet Can-Loan. Pour résumer, disons que l’Armée britannique avait perdu beaucoup d’officiers après avoir combattu dans le monde entier au début de la guerre. Et comme il restait aux Canadiens quelques « surplus », on a décidé d’en envoyer un bon contingent dans les unités britanniques pour participer à l’assaut contre l’Europe envahie. Et il est plutôt intéressant de voir combien d’hommes y sont allés. Certains qui partaient du Canada avaient déjà été en Europe, assez peu en fait, et d’autres se trouvaient en Europe avec l’Armée canadienne au début de la guerre. En tout, 623 officiers d’infanterie et 50 ordonnances s’y sont retrouvés en avril 1944, soit un total de 673 officiers. Nous avons perdu les trois quarts de ces hommes, qui s’étaient courageusement illustrés à mon avis. Parmi eux, 40 ont eu la Croix militaire dont l’une avec agrafe, plus une Croix du service distingué, un Membre de l’Ordre de l’empire britannique, une Silver Us Medal, quatre Croix de Guerre… et un membre du Order of Bronze Dutch. Ceux qui se portaient volontaires devaient revenir au rang de capitaine et surtout de lieutenant. Je crois qu’il y avait un capitaine pour 10 lieutenants. Certains majors et colonels redevenaient même capitaines pour se joindre au projet Can-Loan et partir en mission. Et je suis fier de dire que j’étais l’un d’eux, car nous formions un groupe extraordinaire. Nous nous sommes rendus à bord du Liberty à moins de deux kilomètres des côtes françaises. Notre plage était celle de Gold Beach, et c’est dans l’eau que nous perdu le plus grand nombre d’hommes. Nous sommes débarqués à plus d’un kilomètre au large des côtes. Et le LST, c’est-à-dire le chaland de débarquement d’infanterie, nous a emmenés aussi loin qu’il le pouvait, sans doute à une centaine de mètres de la rive, peut-être 50, et nous avons avancé dans l’eau à partir de là. Puis nous sommes aussitôt tombés sur ce qu’on appelle des mines S, qui étaient des obus enfouis dans le sable avec des fils-pièges. Et quand nous les frappions du pied en courant, eh bien, je crois qu’elles étaient réglées d’une certaine manière car elles explosaient en nous frappant l’arrière-train. Mais elles ont aussi mis plusieurs gars hors de combat. Puis nous sommes tombés sur de grosses armes antichar qui ressemblaient à de grandes défenses d’éléphant, recourbées… et enfouies dans le sable. Et c’étaient des tanks. Nous avons évidemment passé notre chemin car nous n’avions aucun tank. Nous tentions simplement d’avancer pour que les tanks puissent entrer. Les tireurs d’élite britanniques y sont finalement arrivés et les tanks on pu passer. Et nous avons ensuite rencontré deux rangées de barbelé circulaire sans avoir s’il était électrifié, mais nous ne pouvions traverser sans aide. Avec des charges Bangalore, qui sont des cylindres de deux mètres avec des explosifs, nous avons vite ouvert le feu sur les casemates allemandes au-dessus de nous. Et ces types sont venus avec leurs charges Bangalore et ont fait dans les barbelés un trou assez grand pour nous laisser passer. Évidemment, nous sommes ensuite tombés sur les casemates. Il y en avait trois je crois sur notre front, mais les cuirassés faisaient feu dans leur direction et en ont touché deux. L’une restait active et nous devions continuer de tirer pour avancer et rejoindre les tranchées qui les bordaient. Nous y sommes parvenus, et c’est en lançant des grenades d’où nous étions, juste au-dessous des casemates, que nous avons fait nos premiers prisonniers. Ce jour-là, notre but était de franchir ce bourbier pour nous rendre à Bayeux, qui se trouvait je crois à une douzaine de kilomètres dans les terres.