Ils ont décidé d’envoyer une trentaine d’entre nous, officiers, sergents et simples soldats, dans les Coldstream Guards (Coldstream Regiment of Foot Guards) en Angleterre pour s’entraîner avec les blindés, le 21ème régiment de blindé canadien (Governor’s General’s Foot Guards). Et je n’oublierai jamais le morse, à essayer de me le coller là-dedans. On s’est débrouillés et on a fini notre entraînement et le régiment est allé là-bas en novembre. On a eu nos chars, des (M4) Sherman (véhicule américain blindé à chenilles), mais pendant que j’étais en Angleterre, je me suis entraîné sur un Ram (véhicule blindé de construction canadienne à chenilles), comme chauffeur, mitrailleur, chef de char et opérateur radio avec le poste (radio MK III N°) 19 dans chacun d’eux.
On est arrivés en France à Cologne (Boulogne-sur-Mer) et à partir de là, on s’est battus, en France se sortir de la bataille a été terriblement difficile. Et notre char a été heurté. Major Laidlaw a été le premier à être atteint et il a été tué, et son opérateur radio s’est fait tué lui aussi ce jour-là. Et puis le lendemain matin, juste au lever du jour, le 88 (mm, canon antichar allemand) a frappé juste devant l’artilleur, dans l’anneau de tourelle, ça a tout bloqué. Et le chauffeur, Jimmy Webb était là en dessous et il n’arrivait pas à sortir. Mais j’ai bougé les munitions, quand je me suis réveillé après le choc, j’ai bougé les munitions, j’ai fait monter Jimmy dans la tourelle et on s’est échappés par la tourelle ; et on avait parcouru une vingtaine de mètres quand le deuxième coup a atteint les munitions et ça a tout sauté. On est restés dans des tranchées allemandes et tout ce qu’on avait comme protection c’était des grenades œuf (manuelle à fragmentation).
Le lendemain on a retrouvé nos régiments et on m’a mis dans un autre char. Jimmy et le chauffeur la même chose pour eux ; et on a avancé, et certains jours il faisait soleil et d’autres il y avait plein des nuages. Mais on a continué la traversée de la Belgique et de la Hollande on a eu plein de bon jours et aussi plein de mauvais, et on est arrivés à la frontière hollandaise en Allemagne, on s’était servis de nos chars pour l’artillerie au dessus de l’eau. Puis ils m’ont mis dans un 17 livres (canon de campagne) comme opérateur radio. C’est là que j’ai dû me servir du morse. J’étais assez confus parfois, mais on a continué et à travers la boue et on s’est embourbé plusieurs fois ; et les allemands avaient, fait tomber des arbres en travers, des deux côtés en travers de la route. Il fallait rester en dehors des routes, et de temps en temps, on n’y arrivait tout simplement pas.
On a bien trouvé en Hollande une ville très amicale et elle était en ruines. Et on s’est retrouvé avec des tireurs embusqués dans les clochers des églises. J’assurais le contrôle du char, je m’occupais des leviers hauteur et profondeur ; et un jour j’ai manqué un tireur isolé qui se trouvait en haut d’un arbre et il a descendu notre commandant. Notre petit commandant gardait son couvercle ouvert ; il aurait dû être fermé. L’artilleur était la seule personne à avoir un télescope, les autres avaient des périscopes. Alors je suppose que vous ne pouviez pas voir grand-chose. Avec un télescope, vous pouviez tout surveiller. Mais le jour où le tireur embusqué a descendu Fritz Palmer, on était sur trois chars allemands et c’était sous ma responsabilité, sa perte en tout les cas.
Date de l'entrevue: 8 novembre 2010