Il y avait plein d’avions dans le ciel. Bon, on ne pouvait en voir aucun parce que les hublots étaient trop hauts et le seul moment que j’ai reconnu, c’est quand on a vu les éclairs lancés par les canons antiaériens quand on est passés au dessus des côtes françaises. Je pense que c’est ce qui faisait peur aux pilotes. Ils étaient aussi inexpérimentés que nous. Le jour J il faisait nuit noire, et certains gars sont partis et c’est la lune qui les a éclairés pour atterrir. Mais il faisait nuit noire, et j’ai pensé, bon sang je vais devoir atterrir bientôt. Et juste après j’ai touché le sol.
Je me souviens que j’étais à peu près à une dizaine de kilomètres environ de là où j’étais censé être. Je ne le savais pas sur le moment, mais je suis arrivé dans le champ, et j’ai enlevé mon parachute et j’ai couru jusqu’à la bordure du champ. J’ai regardé à travers un buisson, et j’ai regardé à travers la haie. J’ai vu cette piste et j’ai avancé ; il n’y avait personne. J’espérais tomber sur deux des gars du groupe (1er bataillon de parachutistes du Canada)… non, pas un bruit.
Je suis allé me présenter au quartier général, et j’ai dit que j’étais un petit peu en retard, mais que j’avais été décalé et que je m’étais perdu. Ils ont dit, bon vas rejoindre ton peloton. Alors il n’y a que quelques gars du peloton qui creusent à la bordure du champ, et j’ai choisi un emplacement, et puis un ordre est arrivé comme quoi je devais partir pour trouver les allemands. Alors je suis parti et j’ai traversé un champ en suivant le long de la haie qui courait le long de là où j’avais décidé d’installer ma tranchée, et puis je me trouvais le long de ce champ et il y avait un buisson sur la droite. J’ai dû enjamber un de nos gars. Il avait (été descendu) par un sniper et il avait un trou de balle juste là (entre les yeux). Alors à cause de ça je me suis baissé et je me suis déplacé un peu plus vite.
Personne ne sait rien au sujet du 12 juin, mais un régiment de 700 hommes était prêt à l’attaque avec des chars et un canon autotracté de 88mm (canon d’artillerie antiaérien). Ils utilisaient ce canon de 88 pour envoyer des éclats d’obus dans les arbres de l’endroit où on s’était finalement installés.
Ce qui s’est passé ce matin-là, quand on a entendu ce bruit et la bataille qui avait lieu, on a pensé, oh les jours heureux ils (les allemands) sont en train de se prendre tout ça pas nous. Puis un message est arrivé disant de se présenter au QG de la compagnie immédiatement, armes légères et équipement léger. Alors on a tous rebroussé chemin et puis le Capitaine Hanson, qui avait repris le commandement de la compagnie, il a dit, on va au QG de la brigade, ils veulent de l’aide. Alors on est une quarantaine environ et on part tous au pas de course jusqu’au QG de la brigade. Le brigadier, alors c’était un homme bon, et il m’a dit après la guerre, il a dit qu’il n’allait pas mourir. Il a dit qu’il savait qu’il n’allait pas mourir parce qu’on lui avait tiré dessus en Afrique et qu’il avait été laissé pour mort. Alors il savait qu’il n’allait pas mourir au cours de cette guerre. Alors il nous a dirigé au pas de course à travers les champs et on a remonté ce chemin de terre. Il y avait des arbres abattus, des haies de chaque côté. Le brigadier marchait le long avec une badine, en disant, suivez-moi les garçons il n’y a rien à craindre.
Mais on s’est dépêchés et on a traversé cette route. C’était sur la propriété d’un château, et c’est là qu’on a trouvé tous ces gars morts qui avaient été tués, des jeeps et des chenillettes Bren avec des munitions qui explosaient et brûlaient. Les allemands avaient fichu une sacrée pagaille dans tout le secteur.