Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Transcription
J’ai été envoyée à l’école supérieure de conduite et d’entretien de véhicules de Woodstock. Il y avait un grand camp là-bas, j’en oublie le nom. On y instruisait les hommes sur la mécanique et la conduite de grosses machines comme les porteurs universels (véhicules chenillés légèrement blindés qu’on appelle également des chenillettes porte-Bren) et les chars ainsi que leur réparation lorsqu’ils tombaient en panne. C’était une école d’instruction, j’y étais un peu comme une secrétaire. Je veux dire, les femmes s’occupaient des tâches administratives pour que les hommes puissent aller au front ou faire des tâches plus importantes. Une femme a quand même suivi le cours et a fini par réparer la voiture de tout le monde.
Bref, je suis restée toute la durée de mon engagement dans l’armée. Je travaillais dans le bureau du bataillon. C’est la salle de commande principale pour tout le camp. J’ai aussi travaillé à la bibliothèque militaire où je devais actualiser le contenu des livres en y écrivant de toutes petites lettres entre les lignes déjà imprimées. Le livre Kings Regulations and Orders [for the Canadian Militia] est celui sur lequel j’ai le plus travaillé. J’ai vraiment dû me forcer les yeux en écrivant aussi petit! Mais c’était mon travail.
Pendant un moment, à Woodstock, beaucoup de filles semblaient tomber malades de ce qu’on appelait des troubles gastriques. On a alors établi que la nourriture était trop lourde et trop grasse pour les filles. On a commencé à nous donner des salades, puis on a acheté des grille-pain, un pour chaque table. Nous rôtissions notre pain en collant le pain au bout d’une fourchette et en le tenant au-dessus des charbons du poêle qui chauffait la place. C’était une nette amélioration, ce genre de régime. On ne pouvait pas nous donner la même chose qu’aux hommes.
Nous devions nous lever très, très tôt et avec un peu de chance, nous prenions une douche. Tout le monde voulait prendre une douche. Il n’y avait que quatre baignoires pour plus de 200 filles, alors nous prenions des douches. Il y avait un pédiluve à traverser devant chaque douche. De la chaux (un désinfectant) s’y trouvait. Le but était d’éviter les infections fongiques. Personne n’aimait ça parce que c’était froid, alors nous essayions de l’enjamber et de le contourner sur la plinthe pour accéder à la douche.
J’ai passé beaucoup de temps à la bibliothèque, à actualiser les livres militaires. Aussi, si on avait besoin d’une autre dactylo dans le bureau principal, c’est à moi qu’on venait demander. Nous dînions à la même heure et soupait à 17 h dans le mess. Quand tout était fini, nous retournions à notre caserne, juste à l’extérieur du camp. Nous n’étions pas au même endroit que les hommes. Nous étions à l’extérieur, à un pâté de maisons.