Project Mémoire

Jean Dorgan

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Hôpital général nº 3 à Anaqui. « C’est là que nous avons été informés de l’invasion du Jour J.
« A Canuck Goes to Italy » (Un Canadien en Italie), manuel anglo-italien distribué aux Canadiens.
L’hôpital nº 3 installé sous une bâche à Cassino.
« Notre premier hôpital en Italie », l’hôpital chirurgical nº 3.
Infirmières militaires de l’Hôpital général canadien nº 3 (hôpital chirurgical mobile) en permission à Paris.
Il me semble qu’on nous y avait envoyées à la dernière minute en raison d’un débordement de travail. Tout le monde était très affairé, y compris les officiers
Je m’appelle Jean Dorgan. Je suis née à New Westminster le 15 novembre 1910. Quand la guerre a éclaté en 1939, je me suis enrôlée mais les autorités ne voulaient pas que les infirmières de la santé publique délaissent leur emploi. Je n’ai donc pu m’enrôler tout de suite, et comme très peu d’hôpitaux étaient mobilisés de toute façon, on ne m’a appelée qu’en juillet 1942. Puis en septembre 1943, j’ai fait la traversée vers l’Angleterre sur le Reine Elizabeth. Une expérience très intéressante car nous avions voyagé partout au Canada pour solliciter des hôpitaux militaires dans différentes villes et provinces, et je crois qu’il y en avait 13 sur le navire. Il a fallu trois jours pour le charger, et nous entendions pendant tout ce temps le bruit des pas sur la planche d’embarquement. On m’a affectée à l’unité chirurgicale mobile nº 3, qui comptait 200 lits et gérait un poste d’évacuation sanitaire. Et aucun soldat blessé ne pouvait repartir sans y avoir été examiné. Le convoi a quitté le fleuve et c’était très particulier, car nous étions complètement isolés sur notre petit bateau. Et soudain, tout juste au signal, une foule de bateaux sont apparus à l’horizon. Cette coordination m’a vivement impressionnée. En Italie, alors que nous étions à Avellino, une ville située à une centaine de kilomètres de Naples, nous avons été dépêchées à Cassino à la suite d’une troisième attaque. C’était en mai je crois, et c’était toute une expérience car nous étions à 13 kilomètres du monastère. Il me semble qu’on nous y avait envoyées à la dernière minute en raison d’un débordement de travail. Tout le monde était très affairé, y compris les officiers qui montaient les lits. Des troupes sont arrivées pendant ces préparatifs. Elles s’apprêtaient à livrer bataille et nous sommes descendues aux abords de la propriété pour les acclamer. L’un des hommes est descendu de son camion, vraiment très ivre, et il avait une rose à la main qu’il est venue me donner. Je ne l’ai jamais oublié. Je ne sais où il avait trouvé cette rose, car les environs étaient complètement désolés. Il y a une vingtaine d’années, je suis retournée à Cassino et au monastère, qu’on a entièrement restauré. Il comprend une section réservée aux Polonais. Et un écriteau qui dit : « Nous laissons nos corps en Italie, nos cœurs à la Pologne et notre âme à Dieu. » Cela m’a touchée... terriblement émue.