Project Mémoire

Jean Hubbard (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.


Jean Hubbard
Jean Hubbard
Jean Hubbard avec son père qui était un RCMP au Manitoba, 1945.
Jean Hubbard
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Jean Hubbard (2nd à gauche) coupant le gâteau de son 18ème anniversaire et s'enrôlant dans le Corps des Femmes de l'Armée Canadienne, en 1944.
Jean Hubbard
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Jean et Tom Hubbard après leurs fiançailles à Kitchener, Ontario, 1944. Tom servait dans le Corps de Char.
Jean Hubbard
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Jean et Tom Hubbard le jour de leur mariage, en 1947.
Jean Hubbard
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Jean Hubbars et Joan Fawell aux Chutes du Niagara, 1944.
Jean Hubbard
« Il disait toujours qu’il épouserait une fille de Flin Flon, au Manitoba. Alors je trouvais charmant de savoir qu’il rentrerait au bercail pour m’épouser, quoi qu’il arrive outre-mer. »

Transcription

Ma première nuit dans l’armée, j’étais dans la couchette du haut lorsque l’alarme incendie s’est déclenchée. J’ai sauté du lit, oubliant où j’étais, et je suis tombée sur les mains. Je me suis cassé le nez, et un médecin vétéran m’a d’ailleurs dit plus tard que je me l’étais déjà cassé auparavant.

J’ai prêté serment. Ma sœur était également membre du Service féminin de l’Armée canadienne et lorsque je suis arrivée dans la salle, elle était là avec le sergent, l’officier et un photographe. J’ai remarqué un gâteau sur la table avec une bougie dessus en guise de célébration de mon premier jour d’armée et de mon 18e anniversaire. C’était assez agréable, c’était une photo pour le Winnipeg Free Press pour le recrutement.

Ce que j’ai aimé le plus, c’est le moment où j’ai rencontré mon futur mari dans un train. Les hommes ont cherché notre attention lorsque nous avons traversé leur wagon pour le souper et notre officier nous a dit de juste continuer. Même chose au retour, nous avons dû y aller intelligemment. Au retour du déjeuner le lendemain, nous avons eu l’autorisation de nous mêler aux hommes, les deux officiers étant restés à l’arrière du wagon. J’ai rencontré Tom Hubbard, originaire d’une petite ville de Saskatchewan, Maidstone. Nous avons eu de vrais atomes crochus : lorsqu’il est descendu du train à Borden, j’ai pleuré et lui aussi. Nous avons tenu une correspondance et nous nous sommes rencontrés deux fins de semaine avant qu’il ne parte à l’étranger. J’ai envoyé des biscuits, des bonbons et des cigarettes et les lettres sortaient et arrivaient à grande vitesse. Il était dans le corps de chars et, innocente que j’étais, je me suis dit qu’il allait être en sécurité dans son char. Apparemment, ce n’était pas le cas, mais j’étais rassurée.

Par ailleurs, une amie et moi étions à Niagara Falls, dans l’État de New York, pour une fin de semaine, et nous avons vu le défilé qui traversait le Rainbow Bridge vers Niagara Falls. Tant qu’à être là, nous avons pensé que nous pourrions y participer. Nous sommes donc montées à la fin du défilé, nous avons traversé la frontière et on nous a fait des signes de la main. Nous sommes arrivées de l’autre côté, nous nous sommes promenées dans les rues et deux sergents costauds se sont approchés et nous ont demandé si nous avions un laissez-passer pour entrer aux États-Unis, ce à quoi nous avons répondu dans la négative. Ils ont répondu qu’il valait mieux nous ramener de l’autre côté du pont avant que nous ayons des ennuis. C’est ce qu’ils ont fait, ils nous ont emmenées manger, nous ont retrouvées le lendemain pour le déjeuner et nous ont raccompagnées jusqu’à l’autobus. C’était vraiment excitant pour des jeunes de 18 ans. Nous étions jeunes; nous étions prêtes pour l’aventure. C’était notre première fois loin de la maison. C’était un bon moment.

Je ne pense pas que nous ayons vraiment pensé à l’avenir. Les hommes non plus. Ils savaient qu’ils devaient partir à la guerre et ne se disaient pas qu’ils n’allaient peut-être pas revenir. Ils se disaient qu’ils seraient là encore longtemps.

J’avais un peu peur de ne pas me souvenir de lui parce que nous n’avions passé que deux fins de semaine ensemble, la tête folle, comme on pourrait dire. Nous étions allés au centre de services, nous avions dansé et nous avions joué à des jeux. Nous n’avions donc pas vraiment appris à nous connaître, même s’il ne m’a pas laissée l’accompagner dans le train lorsqu’il est parti. Je me suis dit que ce n’était pas très amical. Un de ses amis m’a dit que c’était parce qu’il ne voulait pas que je le voie pleurer. J’ai trouvé que c’était mignon.

Les soldats descendaient du train, je savais dans quel wagon il était. Une petite dame âgée se tenait près de moi et ne semblait pas très enthousiaste à l’idée de rencontrer qui que ce soit. Il est descendu avec son sac d’équipement, il l’a posé et elle lui a dit qu’elle allait s’en occuper et d’aller me voir. Nous nous sommes donc retrouvés et je me suis dit que oui, je me souvenais bel et bien de lui. La petite dame était juste là pour voir tous les soldats qui revenaient, pour vivre l’événement. Elle avait probablement perdu des proches pendant la guerre. C’était tout simplement un rêve devenu réalité qu’il soit revenu. Il ne cessait pas de dire à l’un de ses amis à l’étranger, qui me l’a raconté plus tard, qu’il allait épouser une fille de Flin Flon, au Manitoba. Je me suis donc dit que c’était une bonne chose que ce qui se passait à l’étranger reste à l’étranger. Il est revenu et nous nous sommes mariés en 1947.