Jean-Marcel Leduc

(Accident de camion à Petawawa.)

On est parti en camions. On faisait souvent des convois de trente, trente-cinq camions, parce qu’il y avait environ dix milles, dix ou douze mille soldats à Petawawa (Ontario). (…) Et puis c’est arrivé que le gars se soit trompé (de direction en chemin). On était à peu près le trentième (camion) dans les derniers. Puis là le premier qui partait, naturellement, quand on le suivait c’était de plus en plus vite. Plus on était loin, si on était le trentième, il fallait courir après. Puis il (le chauffeur) avait manqué une route. Il dit : « Je ne sais pas s’ils s’en sont allés à droite ou bien s’ils s’en sont allés à gauche, on ne les voit plus. »

Cela fait que personne n’a parlé, mais le gars a pris à droite. Là, c’est pour cela que j’ai été blessé là-dedans. Moi je suis, autrement dit, rentré violemment dans un gros banc de neige. Puis il y avait une « pin » (goupille), il y avait une « pin » dans le milieu et puis on était trois gars. Puis on se remplaçait chacun notre tour. Ça m’est rentré dans la colonne vertébrale. Cela fait que le lendemain j’étais paralysé. Je n’étais plus capable de rien faire. C’est pour cela qu’ils m’ont envoyé à Sainte-Anne-de-Bellevue (un hôpital militaire dans la région de Montréal). Je n’ai pas eu le temps de savoir ce que je voulais faire. C’est ben vlimeux (malicieux) pareil hein!

J’ai été chanceux parce qu’ils m’ont aussitôt « drafté » (recruté) à Sainte-Anne-de-Bellevue, à l’hôpital militaire. Puis, je suis resté deux ans et demi dans un plâtre moi. Tu ne pouvais pas rien faire. C’était un genre de « pin » qui m’était rentré dans la colonne vertébrale. Ils m’ont pris un os dans la jambe gauche. Ils m’ont pris un os dans la jambe et ils ont rentré cela dans le (…) Mais j’ai été deux ans et demi à l’hôpital.

(À l’hôpital de Sainte-Anne-de-Bellevue.)

L’atmosphère à l’hôpital était parfaite. On avait du monde en masse dans ce temps-là. Tu sais, comme toutes les compagnies comme Bell Téléphone, Eaton et ces places-là. Ça venait nous voir, on était heureux. Puis moi je n’étais pas trop gêné, cela fait que (...) J’écrivais à peu près vingt cartes à différentes filles dans la province de Québec, parce qu’ils me donnaient toujours des cartes. « Hey toi! Tu aimes ça écrire, et bien écris à l’une et écris à l’autre. » Les deux ans et demi (à l’hôpital), j’ai trouvé ça extra pareil. Je pouvais me coucher sur le côté et puis écrire. Ah non, j’ai eu réellement (…), Sainte-Anne-de-Bellevue c’était parfait. Je n’étais pas capable de marcher du tout dans ce temps-là. Cela fait que j’étais bloqué. Je ne m’étais même pas levé le matin, je n’étais pas capable. D’avoir reçu cela par le camion c’était comme une « pin » qui m’était rentré dans la colonne vertébrale.

Il y avait beaucoup de docteurs, dans ce temps-là, à Sainte-Anne de Bellevue. Cela fait qu’un venait me voir, puis un autre venait me voir, puis un autre venait me voir. Cela fait qu’ils ont dit, bien voyons. Puis après l’opération, j’étais dans un cercle, ils te mettent un cercle par-dessus toi. Tu es tout nu là-dedans. Tu as un cercle pour te protéger et j’avais essayé de me retourner et puis la jambe m’avait fracturé. L’os qu’ils avaient pris dans ma jambe gauche avait cassé. Je délirais comme on dit, on braille (pleure) dans ce temps-là. Cela fait que (le personnel infirmier) disait : « Qu’est-ce tu as? Qu’est-ce que tu as? » Cela fait que là ils se sont aperçus que la jambe (...)

Un des docteurs, pas tous les docteurs, ils ont regardé. Mais c’était un docteur, je ne m’en rappelle pas, je ne sais pas si vous avez entendu parler du docteur Hicks, je pense. Mais c’est lui qui m’a dit : « On va essayer d’y prendre la patte (jambe) puis le redresser pour son os. » Cela fait qu’ils me l’avaient redressée. Puis quand ils m’ont vu sourire. Il dit : « Là, tu vas avoir l’os rentré à la bonne place. » J’avais la jambe gauche bien de travers là. Mais c’est ça ce que je peux vous dire de la blessure que j’ai eue. Que voulez-vous…