Et je voulais faire de mon mieux, je ne voulais pas rester à la maison et ne rien faire. Mon frère était dans la Marine et j’étais une dingue d’aviation et alors l’armée de l’air ça m’a paru tout naturel de m’engager là. Et on a été formées par ce qu’ils appelaient un membre du personnel féminin de l’armée de l’air qui venait d’Angleterre. Elle était sergent major, une vraie caricature de sergent major, la totale avec une voix stridente, un terrible accent britannique et les dents en avant. Et elle, pour une raison ou pour une autre, je ne sais pas pourquoi, elle m’a prise en grippe immédiatement et elle m’a déplu à moi instantanément. Et elle était, je crois qu’elle savait que j’étais trop jeune et je pense qu’elle essayait de me faire craquer. Et bien évidemment, plus elle essayait et plus je me suis entêtée et quelle que soit la corvée épouvantable – le jour où on a toutes eues nos vaccins, plein de filles sont tombées dans les pommes et beaucoup d’entre elles étaient vraiment très mal en point du côté de l’estomac et elle m’a fait faire la corvée des toilettes exprès, à nettoyer tout ça. Et ça a continué comme ça pendant, je ne m’en suis pas remise jusqu’en 1988, ils avaient organisé une réunion à Calgary. Et je sortais en marchant du, on était logés à l’université d’Alberta, et je marchais le long du corridor et je l’ai repérée. Je n’aurais pas pu la manquer même si j’avais vu des éléphants volants. Et elle m’a repérée elle aussi. Et on a fini par, on s’est raconté à quel point on ne s’était pas appréciées l’une et l’autre et on est devenues assez bonnes amies après ça.
Je suis allée dans la division motorisée et j’ai suivi mon entrainement à Toronto. L’ancienne école Havergal. Et je me suis retrouvée dans une chambre qui, d’après ce que ma mère m’avait dit, se trouvait être celle de sa sœur quand elle était en pension à l’ancienne école Havergal. Et elle se trouvait dans la rue Jarvis, la rue Jarvis était renommée pour ces dames de la nuit et on n’était pas vraiment les bienvenues dans cette rue, je peux vous le dire. Et on a appris à conduire sur n’importe quel engin de la locomotive à essence aux ambulances en passant par les camions et les voitures ordinaires.
J’ai eu ma première affectation à l’école de pilotage militaire n°3 à Currie en Alberta. Et les premiers mots d’introduction que j’ai entendus en arrivant à la base ça a été : « P… mais qu’est-ce que tu fous ici ? » Alors j’ai appris ça à toute vitesse. Et j’ai découvert que j’étais seulement la quatrième femme chauffeur routier dans toute la base. Et on n’était pas particulièrement les bienvenues parce qu’ils ont réalisé que, 1 : j’étais mécanicienne, 2 : j’étais sacrément bonne au volant d’un véhicule, si je peux me permettre de dire ça. Et mon sergent a compris ça et il est devenu vraiment amical et il me donnait tous les trucs durs à faire parce qu’il savait que je pouvais les faire. Par dessus tout, l’activité ou toute l’action et les situations dramatiques et tout le reste, ça se passait au N°3, en général. J’ai passé quatre mois dans les ambulances du service d’urgence et ça n’a pas été une expérience des plus plaisantes parce qu’on a perdu trois ou quatre avions au cours de cette période. Et j’ai été le témoin d’un tas de choses horribles, je dois dire.
Bon, je pense qu’on m’avait choisie pour faire ça parce que je n’avais pas l’air d’être quelqu’un qui était facilement troublée et j’étais tellement affairée à ne pas piper mot et garder mon âge en quelque sorte, ne pas me faire prendre, disons que si on veut bien dire ça comme ça, je ne montrais jamais la moindre réaction ou quoi que ce soit. Alors ils pensaient que je pourrais rester très calme sur les lieux d’un accident et ne pas paniquer ou faire quoi que ce soit, ce que d’ailleurs je n’ai jamais fait. Alors en fait, c’était vraiment très, c’était un travail fascinant si vous n’étiez pas dérangée par les horreurs qui allaient avec.