Nous sommes partis pour l’Angleterre en 1941 et en 1942, j’ai rencontré ma femme. Ensuite, la première permission que j’ai eue, c’étaient deux jours à Londres; à cette époque, il y avait un nombre incroyable de bombardements. J’ai même demandé à un policier où est-ce que je pouvais trouver un endroit pour y passer la nuit, il m’a indiqué un abri. C’est donc dans cet abri que je suis resté ma première nuit de permission.
Ensuite, nous sommes allés dans deux régions de l’Angleterre. On est allé à Crowborough, à l’extérieur de Tunbridge Wells, dans le Kent. Quand on s’est rendu à cet endroit, à Crowborough, je ne me suis pas donné la peine d’obtenir un laissez-passer pour aller deux semaines en ville, j’ai obtenu un laissez-passer pour y aller une journée, c’était un vendredi ou un samedi. Je suis allé au dancing avec un ami, on a regardé et on est reparti, mon ami ne dansait pas et moi non plus. Bref, on remontait la rue et il y avait ces deux jeunes filles qui descendaient la rue; on s’est arrêté et on s’est mis à parler avec elles. On leur a demandé où elles allaient, elles allaient au dancing. On leur a dit : « Non, c’est pas terrible ce soir. » Nous deux, on ne pouvait pas danser de toute façon ou on ne voulait pas danser. Elles ont accepté et elles ont dit : « C’est bon, on vous emmène boire un verre. » Elles nous ont donc amenés à ce pub, en haut de la rue, on est entré et dans le pub, il y avait son père et sa mère, ils étaient assis dans le pub, elles m’ont présenté à eux, on s’est assis et on a commencé à parler. Et puis est venu le temps pour nous de partir, on les a laissés, on est parti, on est remonté dans le camion et on est retourné à la base.
Le lendemain, j’avais encore la permission d’aller en ville, je suis donc retourné en ville, là où ma femme travaillait, ils vivaient au-dessus de là où elle travaillait, et quand je suis arrivé, elle était là et je lui ai parlé. À partir de ce moment, elle est devenue ma petite amie.
Je suis allé à Aldershot, dans une zone d’attente et pendant notre séjour, ils ont désigné un grand nombre d’entre nous pour nous envoyer à Philippeville, en Afrique du Nord [Skikda aujourd’hui]. En route vers Philippeville, Afrique du Nord, en convoi, c’était une belle journée, j’étais sur le pont latéral du navire, je regardais l’eau et je vois de gros remous dans l’eau le long d’un sous-marin qui se trouvait entre deux navires. Je lève les yeux vers le ciel et je me rends compte qu’un raid aérien venait juste de commencer au-dessus de nous. Je regarde encore le ciel et l’un des bombardiers venait d’ouvrir ses portes, ils ont atteint le navire qui était derrière le nôtre et il a…, j’étais là, je regardais, et il a coulé, juste comme ça, je n’arrivais pas à le croire. Bien sûr, tout le monde sautait par-dessus bord, dans la mer, les autres navires continuaient à naviguer, mais ils jetaient des trucs, des pneumatiques dans l’eau pour tenter de récupérer tous ceux qui étaient encore dans la mer.
Finalement, peu de temps après, ils sont partis et on a débarqué à Philippeville, Afrique du Nord. Durant mon séjour, j’errais dans les environs des quais, j’avais ramassé quelques coquillages en Afrique du Nord, je les avais mis dans une boîte de ration de secours, je les ai encore. Je les regardais aujourd’hui même. Puis, on est parti et on est allé en Italie, à Naples, vers Ortona ou à l’extérieur d’Ortona, on m’a poussé à faire le chauffeur d’officiers asiatiques qui allaient rester avec les troupes quand elles allaient déployer les opérations, quelque chose dans ce genre. On est donc allé à Ortona, on a passé Noël en dehors d’Ortona. À cette époque, c’étaient les officiers qui servaient le repas de Noël aux soldats. On aimait beaucoup ça. Mais c’était vraiment un endroit terrible, terrible, à cause des tirs d’obus et d’autres choses, ça n’arrêtait pas, tout le temps.
Finalement, on est arrivé à Casino, et à Casino, c’était la catastrophe, partout dans la ville. J’étais sur une colline. Quelqu’un avait dit qu’il n’y avait pas de Canadiens dans cette ville, mais j’étais un Canadien, j’étais là et je regardais le monastère. En tout cas, je pouvais le voir. Je n’avais pas de jumelles, mais je voyais bien avec mes yeux. Les combats qui avaient lieu là-bas étaient terribles. Après, ils ont fait une autre percée et on a continué d’avancer.
En 1945, quand je suis revenu d’Italie, quand j’ai eu ma permission, je lui ai demandé si elle voulait m’épouser. Elle m’a dit qu’il fallait que je demande à son père. Bref, j’ai demandé à son père en sa présence, j’ai demandé si on pouvait se fiancer et se marier. Il a dit : « Si elle veut, c’est ce qu’on peut faire, oui, certainement, on avait sa permission. » On est allé acheter une bague de fiançailles, je la lui ai mise au doigt, on est resté assis, c’était tout. Quand il a dit ça, c’était vraiment bien, vraiment bien. On est allé au pub, on s’est assis et on a parlé. Je ne suis pas un buveur, pas du tout, j’avais seulement demandé une chope de bière, c’était tout. On est donc resté là, assis, à parler, j’ai glissé la bague à son doigt et c’était tout.
Puis, on est allé en France. Et de France, on est allé en Belgique, en Hollande, en Allemagne, on est retourné en Hollande. En 1945, j’ai obtenu deux semaines de permission et je suis allé en Angleterre. On a fait un mariage de guerre, à l’église. J’avais eu deux semaines pour y aller, me marier, etc. Quand on s’est marié, je me préparais à retourner en Hollande et là, il y a eu la grosse nouvelle, comme quoi la guerre avait pris fin. Tous ceux qui étaient en permission bénéficiaient d’une semaine ou dix jours de plus. Vous savez, cela a été fantastique.