Je m’appelle Len Allbon et j’ai servi dans l’Aviation royale du Canada, et plus tard dans l’Armée de l’air. J’ai d’abord passé trois ans en Grande-Bretagne avant de participer au raid de la Sicile et du reste de l’Italie. Je me suis enrôlé au lendemain de mes 18 ans. On m’a donné mon uniforme et j’ai suivi un entraînement préliminaire à Uxbridge, où se trouve la principale unité de dépôt de l’ARC. Et beaucoup de gens ont entendu parler de la ville d’Uxbridge parce que Lawrence d’Arabie y a séjourné un certain temps après ses aventures dans le désert.
Je me suis ensuite rendu à Cranwell pour suivre une formation technique en transmissions. J’en suis sorti diplômé pour me joindre à ce qu’on appelait le Onzième groupe de l’aviation de chasse. Le pays avait été divisé en quatre régions et celle du Onzième groupe était la plus proche du continent européen, et donc la plus susceptible d’être envahie par la Luftwaffe et l’armée allemande. J’y suis arrivé le 1er septembre 1940 et la Bataille d’Angleterre venait tout juste de commencer. C’était une période très intense. Nous utilisions un équipement radio VHF (très haute fréquence) fabriqué aux États-Unis par Marconi et dont les stocks étaient très limités, surtout pour les avions utilisant un émetteur-récepteur. Cette rareté des stocks s’expliquait notamment par la perte d’un plein chargement de matériel pour émetteurs, qui avait sombré dans l’Atlantique pendant la traversée vers la Grande-Bretagne.
Si bien qu’à mon arrivée, le 1er septembre, le seul aéronef équipé du matériel nécessaire pour communiquer avec l’organe de contrôle était celui des quatre chefs de section de chaque escadron. Mais un ou deux jours plus tard, d’autres récepteurs radio nous sont parvenus. Quiconque pouvait manier un tournevis a donc été chargé de dévisser le matériel à remplacer pour permettre aux mécaniciens radio, comme on les appelait à l’époque, d’installer les nouveaux récepteurs mais aussi de retirer le câblage et tout le reste. C’était une tâche longue et complexe et la plupart d’entre nous avons travaillé 18 à 20 heures par jour pour la mener à bien.
On m’a aussi envoyé dans certaines des plus petites stations. En 1942, on préparait le raid canadien de Dieppe et la force aérienne tentait de survoler la zone le plus souvent possible, de sorte qu’on a mis en place un système de secours aérien et maritime. Pendant le raid de Dieppe et les 24 ou 48 heures suivantes, nous étions en permanence affectés au système de secours. Nous pouvions entendre les pilotes, et lorsqu’ils se trouvaient en détresse, nous dépêchions la force aérienne pour aller les récupérer s’ils s’étaient retrouvés dans la Manche. C’était des moments très intenses mais aussi terrifiants, évidemment, étant donné la vive opposition rencontrée par l’armée canadienne lors de son premier débarquement à Dieppe.