Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Je m’appelle Mort Lightstone. Je me suis joint à l’Aviation royale du Canada quand j’avais 18 ans. J’ai été formé en tant que navigateur de l’Aviation royale, et j’y suis resté jusqu’à ma retraite. J’ai servi pendant 28 ans. Au cours de cette période, j’ai accumulé plus de 6600 heures de vol sur diverses opérations et missions militaires.
La première fois que j’ai été exposé à un environnement de guerre, c’est lors de la guerre de Corée. Je me suis joint à l’Aviation royale en 1951, et j’ai obtenu mon grade d’officier et mon brevet de pilote en avril 1952. À cette époque, l’Aviation royale du Canada pilotait des avions North Star, un avion de transport quadrimoteur, pour ce qui était alors connu comme l’opération Korean Airlift. L’escadron auquel j’appartenais était le 426e Escadron de transport, et nous étions postés à Lachine, juste à l’extérieur de Montréal.
En règle
générale, nous transportions des soldats, et apportions de l’approvisionnement,
du courrier, et des médicaments à Haneda, et habituellement nous repartions de là
avec les soldats blessés. Ces militaires blessés étaient assez souvent du
personnel américain. Mon premier vol pour le Korean Airlift a été assez
dramatique pour moi parce qu’à l’époque, j’avais 19 ans, et que jusque là, je croyais
que la gloire de la guerre était celle qu’on voyait dans les films. Cependant,
alors que nous étions dans le cockpit, des autobus ambulanciers sont arrivés à
l’avion avec les blessés. Avant de continuer, je dois dire qu’il y avait du
personnel supplémentaire sur notre vol, des infirmières militaires américaines.
Et elles étaient réellement magnifiques. Toutes les infirmières sont très
belles dans leur uniforme taillé sur mesure. Éventuellement, l’équipe à l’arrière
nous a dit que tout le monde était bien attaché et que nous étions prêts pour
le décollage, et nous sommes partis. Nous avons pris de l’altitude et avons mis
le cap sur Shemua, et je savais qu’une fois que j’aurais établi que nous étions
sur la bonne voie, tout irait bien. Alors j’ai décidé, du haut de mes 19 ans n’oublions
pas, d’aller à l’arrière en tant qu’officier et de discuter avec les soldats
blessés et de leur dire à quel point nous étions fiers de ce qu’ils avaient
accompli, et ainsi de suite. Alors j’ai mis ma nouvelle casquette d’officier, j’étais
très fier de cette casquette parce qu’elle symbolisait quelque chose d’important
pour moi. Bref, je suis entré dans la cabine et je n’étais pas préparé à ce que
j’ai vu devant moi. Tous les blessés étaient sur des brancards, attachés avec
des sangles spéciales qu’on trouvait dans l’avion. Ces très belles infirmières
couraient dans tous les sens, leurs uniformes déjà recouverts de sang, et les
soldats avaient perdu des bras, des jambes, et des tuyaux et gadgets maintenaient
leur visage en place. C’était une scène à laquelle je n’étais pas
préparé. Et l’expression que j’utilise
pour décrire cela, c’est que c’est à ce moment que le film s’est terminé et que
la réalité de la guerre a pris le dessus. J’ai fait un 180, je suis retourné
dans le cockpit, je me suis attaché à mon poste de navigateur, et je suis resté
assis là durant le reste du vol de 12 heures. J’ai été vraiment secoué
par cette expérience.