Le jour où on a quitté la tête de pont d’Anzio est probablement gravé de manière indélébile dans ma mémoire, de ce qu’il en reste. Et c’était un jour très, très triste. Mon colonel, le Lieutenant Colonel Walter Grey, un type bien, le jour précédent, il a dit, Pete, on y va avec le peloton d’assaut de la 6ème compagnie quand on sort de la tête de pont d’Anzio. Et moi je dis, oh bonté divine, colonel, qui va commander ici si vous vous faites blesser ou tuer ? Et il a dit, McFadden, il est 2IC (commandant en second). J’ai dit, d’accord.
Alors le lendemain matin, on s’est faufilés dans ce canal qui entourait en quelque sorte cette partie de la tête de pont, c’est la tête de pont d’Anzio, et en bas sur la marche dans le canal, on était assez à l’abri du regard de l’ennemi jusqu’à ce qu’on se lève au dessus de la terre qu’ils avaient empilé quand ils construisaient le canal. Et c’est là qu’on va partir pour traverser les lignes allemandes, ce qui à cet endroit dans la tête de pont était à peu près à trois ou quatre cents mètres du canal.
Bon, le Génie avait construit un pont pour que les chars puissent traverser le canal ; et à l’heure H, deux de nos chars ont traversé là-bas et puis on s’est tous précipités hors du canal, et les chars ont suivi. On était arrosés par le feu des mitrailleuses qui nous tiraient dessus et on avait parcouru une cinquantaine de mètres quand mon colonel s’est fait tué. Et ça a été juste un moment très difficile à partir de là.
Puis ces gars qu’on était en train d’attaquer sont sortis de l’endroit où ils se trouvaient avec les mains en l’air, ils sont venus vers nous en courant. Et la chose la plus difficile que j’aie jamais eue à faire ça a été de ne pas tirer sur un seul d’entre eux, juste pour, ils étaient en train de capituler. Et je leur ai juste fait signe de reculer, retourne vers, vous voyez, vers qui que ce soit qui se trouvait dans le canal. Et on a continué à avancer. Mais ça a été la chose la plus difficile que j’ai jamais faite.
Après qu’on soit sortis de la tête de pont d’Anzio, on a eu affaire à cinq chars allemands Tigre (Panzerkampfewagen) à peu près et vous ne voulez pas vous retrouver au milieu d’une bataille de chars parce que votre pauvre carcasse elle ne fait pas le poids sous cette mitraille qui fuse, je vous le dis. Mais celle-là en particulier, l’état-major de notre bataillon avait trouvé refuge dans un bâtiment de ferme qui avait beaucoup de pierres en granit et des murs très épais et ça avait l’air d’un bon endroit pour se cacher s’il y avait des chars comme ça qui passaient par là.
Et la première chose que j’ai découverte c’est que celui qui était responsable des chars était en haut au dernier étage de ce bâtiment, à diriger les Sherman (char de taille moyenne). Et les Sherman ils étaient inutiles dans la guerre. Et ils étaient en train de brûler tout autour de nous. On en avait 15 en début de matinée et, je crois, c’était descendu à deux à cette heure de l’après-midi.
Et, en tout cas, un de ces chars Tigre a envoyé un obus dans le dernier étage de ce bâtiment alors avec un autre gars on est montés là-haut pour voir si notre commandant de blindés allait bien, et il était mort. Alors ça ne servait à rien. Et puis on est redescendus à l’intérieur et ils en ont envoyé un qui est passé à travers notre bâtiment et personne n’a été touché là dedans, mais ça a heurté le char qui se cachait derrière le bâtiment. Un 88 (canon antichar allemand), ils passent à travers n’importe quoi. Et quand cet obus est passé à travers ma, la pièce où je me trouvais, vous ne pouviez plus rien voir si ce n’est la poussière du granit pulvérisé. (rire) Et la seule chose que j’arrivais à voir c’était la porte, qui était ouverte et je suis de là à toute vitesse, comme tout le monde d’ailleurs, et on est redescendus et on s’est mis dans un fossé. C’était une guerre unilatérale avec ces chars-là.
On est allés dans le fossé et un des gars, à peu près à deux gars de moi, avait des grenades (incendiaires) au phosphore blanc dans son sac, qui dépassaient un petit peu et une balle de mitrailleuse les a heurtées et Il a brûlé sur toute une moitié. C’était un très mauvais endroit. Et puis, j’ai pensé, le char qui avait fait ça s’avançait vers nous et j’ai juste pensé, c’est fini, on ne peut pas regarder en haut ou on va se faire tirer dessus, ils vont nous rouler dessus. Ce gars avait le visage à ça de moi, je dis, on dirait que ça y est, Tom. Il dit, ça pour sûr, on est cuit. Et le char qui arrivait faisait trembler le sol. Et tout à coup, quelqu’un l’a eu avec un bazooka ou quelque chose parce qu’il a brûlé et on a entendu les munitions exploser là dedans, et les gars hurlaient, et voilà. C’était un char allemand.