Quand on retournait à notre campement sous la tente à Red Hill (Près de Northampton, Angleterre) c’était juste un gros bouquet d’arbres et nos tentes coniques étaient éparpillées à travers les buissons. Et naturellement, il fallait que l’armée de terre ait des gardes en service la nuit. Alors ils avaient trois gardes qui marchaient de long en large tout autour des buissons et on était en plein sur la trajectoire des avions qui venaient bombarder Londres pendant le Blitz. Alors on entendait toutes sortes d’appareil passer au dessus de nous et les canons antiaérien qui crépitaient. Et ça rendait les gardes un peu nerveux.
Donc on a entendu le garde crier, halte, parce qu’un avion avait été descendu tout près de notre camp, alors on s’est dit, bon, le pilote est peut-être en train de fureter par ici. Et en tout cas, the garde a crié « halte, halte ou je tire. » Bang, le coup est parti. Personne n’a dit mot, personne n’a rien fait jusqu’au lendemain matin. Et puis ils ont trouvé une vache morte dans le pâturage.
Je me souviens d’une nuit où j’ai été effrayé comme jamais je crois. On était sous le feu d’une attaque de l’artillerie allemande et les obus pleuvaient et on était camouflé partout sous les arbres dans le verger où on se trouvait. Et les obus ont commencé à atterrir dans le verger et on en a entendu un arrivé bruyamment et puis un bruit sourd mais pas d’explosion. Et après un petit moment, ça s’est calmé et on a entendu une petite voix appeler « à l’aide, à l’aide. » Et ça venait du camion à côté de nous et c’était le chauffeur, il avait creusé une tranchée étroite et mis son camion au dessus de la tranchée et il était allongé dedans. L’obus est tombé et a atteint la tranchée en premier, a soulevé des gerbes de terre et l’a propulsé contre le dessous du camion alors il ne pouvait pas bouger. Il n’a pas été blessé mais il avait eu encore plus peur que moi c’est sûr. Ça a pris un bon moment pour le dégager de là. Mais des choses comme ça, ça vous reste dans la tête.
Les chars étaient bien devant nous et l’essence commençait à manquer et les bateaux de ravitaillement, les pétroliers arrivaient au port sur la côte est et on a rempli les réservoirs comme on le fait ici, à la différence que les véhicules sont plus petits. Et livrer l’essence et les munitions aux chars de nuit. Je suppose que parfois on se trouvait complètement exposé à la vue des allemands. Vous restiez tout près des chars dès que c’était possible, je pense, les fantassins avaient coutume de dire : « Mieux vaut pas être dans ces satanées boites de conserve quand on va au combat. » et nous on avait l’habitude de dire : « Bon, ces boites de conserve elles vont vous sauver la vie. » parce qu’ils se faufilaient derrière les chars quand on avançait. Et ils pensaient que c’était l’endroit le plus sûr pour eux.
Oui. Tout bien considéré, la guerre ce n’est pas une partie de plaisir mais je ne regrette rien. Sans elle comment aurais-je pu visiter tous ces pays et voir tous ces gens qui parlaient des langues différentes, connaître leurs habitudes et leur façon de vivre. Et ça m’a bien ouvert les yeux de voir à quel point certains de ces pays étaient dans la pauvreté, comme la Sicile par exemple et le sud de l’Italie. Ils n’avaient rien à l’époque.