Project Mémoire

Phoebe Anne Magee (née Freeman)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Phoebe Anne Magee
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Quelques billets monétaires francais datant de la Seconde Guerre mondiale et appartenant à Mme Magee.
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Mme Phoebe Anne Magee (à droite) à l'époque où elle servit dans le Service féminin de l'Aviation royale du Canada.
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Croquis de Mme Magee illustrant certaines variations dans les uniformes portés par le personnel féminin des aviations canadienne et britannique pendant la guerre.
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Mme Magee posant devant un bombardier.
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Les décorations de Mme Magee, de gauche à droite: Médaille de la Défense; Médaille canadienne du Service volontaire; Médaille de guerre 1939-1945; Médaille du 125e anniversaire de la Confédération du Canada; Médaille du jubilé de la Reine Elizabeth II.
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Et parfois, vous savez, ils larguaient leurs bombes vraiment très loin de la cible et j’imagine que c’était tellement dangereux par moments qu’ils fichaient le camp dare-dare et ils décidaient de larguer leurs bombes et filer.

Quand je me suis engagée, on avait le choix entre trois différents métiers, je pense. On pouvait être standardiste, cuisinière, et le dernier avait pour nom le service général, ce qui voulait dire que vous, c’était du nettoyage plus qu’autre chose, je pense, une sorte de femme de ménage. Et je me suis dit, bon, standardiste ça me paraît bien et grâce à des amis, j’ai réussi à aller chez Bell Téléphone à Montréal [Québec] suivre un cours intensif pour apprendre à utiliser un PBX [Un Private Branch Exchanges est un appareil qui sert à relier les postes téléphoniques d’un établissement manuellement]. J’avais acquis assez d’expérience avec ça pour être prise comme téléphoniste dans l’armée de l’air.

Et donc après avoir suivi l’entrainement élémentaire, c’était, vous savez, vous faites vos vaccins, récupérez votre uniforme, on vous apprend à marcher au pas, et toutes ces choses-là, on m’a envoyée dans ce qui s’appelait une base d’entrainement aérien à Hagersville en Ontario. Et je suis restée un mois là-bas au poste de téléphoniste. Et ensuite, on m’a envoyée suivre une formation en administration après ça.

Neuf d’entre nous sont parties là-bas ensemble, et on était censées faire de l’interprétation de photos. Et on nous a envoyées à Bournemouth sur la côte sud [de l’Angleterre] et ils nous ont simplement laissées là pendant quelque temps, je crois. Je ne me souviens plus, moins de deux semaines je pense, quelque part par là. Et puis on nous a envoyées passer des entretiens à Londres, avec des officiers spécialisés qui nous ont fait passer des entretiens et en nous donnant le choix entre faire de l’interprétation photographique ou rejoindre les services de renseignements. Alors moi j’ai choisi le côté renseignements, j’ai pensé que ce serait plus intéressant. Et après, on m’a envoyée dans le Yorkshire [Angleterre] dans le Groupe n° 6 [Escadron de bombardiers de l’ARC], alors.

Les gens spécialisés là-dedans passaient leurs journées entières à examiner les photos qui avaient été prises par les avions de reconnaissance à différentes heures du jour. On pouvait découvrir un tas de choses d’après les ombres sur les photos sur la hauteur des immeubles et ce genre de choses. Et ils sont devenus très experts dans l’interprétation, par exemple, pour trouver le moment où les bombes étaient larguées, quand ils découvraient les endroits d’où elles avaient été larguées en France. Donc ils arrivaient à en savoir long d’après les photos, ce que je veux dire, c’est qu’ils étaient devenus vraiment bons.

L’interprétation photographique c’était d’un autre côté tout le travail sur les photos prises par les avions qui survolaient les cibles pendant leur mission de bombardement et il y avait un certain nombre de vues prises par l’appareil et d’une manière ou d’une autre, on pouvait savoir exactement à quelle heure la photo avait été prise et on connaissait ainsi le moment même de l’atterrissage de la bombe. Et comme parfois on pouvait avoir des indices provenant des marquages des escadrons d’éclaireurs [connu par la suite sous le nom de Groupe n° 8 d’éclaireurs, des groupes d’élite du Bomber Command de la RAF dont la mission était de localiser et marquer les cibles avec des fusées éclairantes], parfois quelques détails sur le sol permettaient de recouper les informations, des parties visibles à travers les nuages sur les photos, vous pouviez les recouper avec les cartes et on pouvait dire avec pas mal de précision si les bombardiers avaient réussi à atteindre leur cible ou non.

Bon, parfois c’était très difficile de comprendre, s’il y avait beaucoup de nuages et qu’il n’y avait pas de marquage des éclaireurs, alors c’était difficile de savoir, ce n’était pas vraiment possible d’identifier quoi que ce soit dessus. Mais dans l’ensemble, c’était une méthode très efficace, je trouve. Et parfois, vous savez, ils larguaient leurs bombes vraiment très loin de la cible et j’imagine que c’était tellement dangereux par moments qu’ils fichaient le camp dare-dare et ils décidaient de larguer leurs bombes et filer.

Bon, parfois, je prenais les cartes et je voyais un détail dessus. Et à force de chercher, je découvrais qu’ils avaient largué leurs bombes à une trentaine de kilomètres de la cible ou quelque chose comme ça. Ils n’aimaient pas entendre ça, mais je veux dire, ce n’était pas trop difficile de découvrir ce qui s’était passé.

Je pense que les photos arrivaient simplement, dans l’unité de renseignements et mon travail c’était de les interpréter au fur et à mesure qu’elles arrivaient. Et parfois, il y avait quelqu’un d’autre appartenant à l’unité qui venait et regardait par-dessus mon épaule pendant que je travaillais, mais en général, c’était comme ça qu’on procédait.

Non, je ne crois pas avoir écrit de rapport là dessus. En principe, le lieutenant-colonel ou le commandant d’escadre venait ou les pilotes ou les viseurs de lance-bombes venaient, parce que j’avais une petite section qui était une sorte de salle de documentation des renseignements que mon patron m’avait demandé d’organiser. Et ils venaient pour voir les photos et me parler d’elles et de temps à autre je leur expliquais comment j’en étais arrivée à cette conclusion.

Une seule fois, j’ai eu un problème et il s’agissait d’un lieutenant-colonel qui était très en colère au sujet d’un rapport que j’avais, sur une des personnes qui était sous ses ordres qui avait largué sa bombe très loin de la cible. Et il est venu et j’avais écrit quelque chose à ce sujet, il était furieux et il n’arrivait pas à croire ce que j’avais interprété. En tout cas, je lui ai montré et je lui ai expliqué et il a pu voir que j’avais raison alors finalement, je ne pense pas qu’il se soit excusé, mais il a accepté mes conclusions en tout cas. Aucun problème après ça.