Project Mémoire

Raymond H Dickenson

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

L'Institut Historica-Dominion
L'Institut Historica-Dominion
Raymond Dickenson, Fredericton, Nouveau-Brunswick, 2010.
L'Institut Historica-Dominion
Alors on a papoté, et je lui ai dit, je suis sergent cuisinier, je suis un cuisinier accompli, je sais tout faire en cuisine, peu importe ce que c’est, je peux tout faire.
Et bien, mon copain m’a recruté pour le conduire à Woodstock dans le comté de Carleton. Il était dans l’armée, mais il devait s’engager. Donc il m’a convaincu de m’engager. Alors je l’ai fait. On m’a dit de me présenter sur l’île à Woodstock le lundi matin à 10 heures. Ce que j’ai fait. Ils m’ont conduit tout de suite dans un petit endroit ; c’était un stand avant, vous savez, pour les glaces et autres, 20 par 30 environ. Et il a dit, entrez. Je suis entré. Il a dit il va falloir nourrir 90 soldats à 1heure. Il était à peu près 11 heures. J’ai regardé autour de moi, tout ce qu’il y avait dans cet endroit c’était un vieux tout rouillé, comment vous appelez ça, vous savez, vous mettez du gaz dedans, et, ça s’appelle comment? Je vais m’en rappeler dans la minute. Et c’était un réchaud à deux feux. Et j’ai dit, je ne crois pas que je vais pouvoir faire grand-chose avec ce vieux truc rouillé. Je ne peux pas cuisiner là-dessus. Il a dit, bon, pas de problème. Je vais vous dire un petit secret. Il a dit, les femmes vont arriver dans une heure à peu près et elles vont apporter des sandwiches et du thé, etc. Alors tout ce que vous avez à faire c’est de vous tenir là et de donner des ordres. Il dit, c’est vous le patron, vous leur dites ce que vous voulez qu’elles fassent. Bon, elles en savaient surement aussi long que moi pour ce qui était de servir des gens. Alors les soldats sont venus, ont eu leur sandwich et leur thé. Ça s’est bien passé. Puis ils ont dit, maintenant après, à 5 heures, elles vont servir de la soupe et des sandwiches à 5 heures, et vous faites la même chose. Vous vous assurez seulement que tout se passe comme vous le voulez, et voilà. Alors c’est comme ça que j’ai commencé. J’étais outre-mer, je ne sais plus si c’était le 17 octobre ou le 17 novembre, où je suis parti là-bas avec l’avant-garde en tout cas. On était 90 qui sommes partis en avant-garde. Bon, ce n’était pas trop mal au début, vous savez. La guerre venait de commencer et il n’y avait pas beaucoup d’action en ce qui nous concernait. Je faisais juste mon boulot. On m’avait mis dans la compagnie C, le régiment Carleton et York. Et j’ai fait la cuisine pour eux pendant pas mal de temps. Ensuite ils m’ont retiré de là et m’ont envoyé dans un mess pour les sergents pendant trois mois. J’y suis allé et je suis revenu dans l’unité, et il y avait une offre. J’ai foncé au mess des officiers et j’y suis resté pendant quatorze mois je crois. Et puis, il me semble, évidemment, à ce moment-là, ça a commencé à pas mal chauffer. On m’a envoyé suivre un entraînement. Tous les membres non-combattants devaient aller faire leurs classes. Bon, je savais que je ne pourrais pas réussir, mais, malgré tout, j’y suis allé et voilà j’y vais et c’est comme ça que j’en suis venu à découvrir que quand ils descendaient là que ce bras ne pouvait pas monter plus haut que ça. J’ai été blessé quand j’avais 19 ans. Alors j’avais passé deux ans et demi outre-mer avec un bras comme ça. Bon, je ne pouvais pas vraiment me servir d’un fusil et je ne pouvais pas transporter de sac. Alors on m’a changé ma catégorie et je suis passé de A1 (service actif) à C4 (inapte au service). Ils allaient me renvoyer chez moi. J’ai dit, oh, je ne sais pas trop pour ça. Alors j’ai demandé à être reçu par un colonel. Ils ont dit, oh mais vous ne pouvez pas vous présenter devant le colonel. J’ai dit, oh oui, je peux, j’ai une raison tout à fait légitime et vous ne pouvez pas m’arrêter. C’était le SMR (sergent-major régimentaire) à qui je parlais. Il a dit, ouais, je suppose que tu as raison. Alors ils m’ont emmené, il a appelé un des messagers pour m’accompagner chez le colonel machin truc. Alors on a papoté, et je lui ai dit, je suis sergent cuisinier, je suis un cuisinier accompli, je sais tout faire en cuisine, peu importe ce que c’est, je peux tout faire. Et j’ai fait tout cet entraînement. Si je rentre au Canada, je ferai la même chose, et tout ça c’est du gaspillage. Je lui ai servi mon grand discours. Et (il a dit), bon, je vais y réfléchir. Et je suis resté et je ne suis rentré chez moi qu’en avril 1945. Alors ça a marché.