Project Mémoire

Réginald Massé

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

M. Réginald Massé, juillet 2011.
Insigne du Royal 22e Régiment. M. Massé servit dans le 1er Bataillon de ce régiment en Corée. Source: http://www.r22er.com/
Moi je dirais que nos adversaires (les soldats chinois et nord-coréens) étaient aussi des soldats très bien entraînés. Ils avaient une supériorité sur nous autres parce qu’eux, c’était leur pays, c’était leurs collines.
Moi, il y a un incident qui m’a beaucoup marqué et pis ça m’a pris du temps à m’en défaire. D’abord en Corée, au combat, nous vivions tous dans des souterrains, souterrains qu’on creusait nous autres même, avec dans certains cas, la terre qui nous préservait sur le toit. Elle pouvait atteindre trois, quatre, cinq pieds dépendamment, dépendamment toujours de la situation. Évidemment entre chaque abri sous terrains il y avait une tranchée de communication. Un midi, nous étions à manger une soupe moi et mon copain, un nommé Rioux d’Asbestos. Je l’ai jamais revu après. Toujours pendant qu’on mangeait, il est arrivé une bombe qui est passée à travers de notre abri. Moi j’étais ici et lui était ici. Elle a passé entre nous deux, elle est rentrée dans le mur de terre. Elle n’a pas éclaté. Ça, ça arrive à peu près une fois sur mille qu’une bombe comme ça n’éclate pas. Alors si elle avait éclaté je ne serais pas ici pour vous le raconter. Ça, ça ne m’a pas marqué tout de suite tout de suite. J’étais un peu nerveux après, mais où j’ai commencé à avoir des traumatismes, c’est à peu près une quinzaine d’années après. Ce n’est pas survenu tout de suite. À un moment donné, j’ai été obligé d’être vu par un psychologue et puis ce même psychologue m’a dit que les post-traumatismes c’était rarement immédiat. Ça survient après et des fois longtemps après. Moi, dans mon cas, c’est arrivé peut-être 15-20 ans après. Là j’avais des cauchemars. Moi je dirais que nos adversaires (les soldats chinois et nord-coréens) étaient aussi des soldats très bien entraînés. Ils avaient une supériorité sur nous autres parce qu’eux, c’était leur pays, c’était leurs collines. Évidemment on peut présumer qu’ils étaient nés là. Ils avaient des uniformes qui se mariaient très bien avec le terrain. Moi je dirais qu’on faisait face à un ennemi qui n’était pas un amateur, c’était un professionnel. Moi je trouve que ce qui est le plus important ce n’est pas tellement la guerre, mais c’est de savoir qu’est-ce que ton pays a fait pour aider ces gars-là. Donc, c’est gens-là, ils étaient contents eux autres. Ils appréciaient ce que le Canada avait fait pour eux autres. C’est ça que les gars devraient savoir. Puis je pense que c’est ça que tous les Canadiens devraient savoir. Moi j’ai retourné en Corée, j’ai retourné en Corée en 2003. Moi là, de la façon dont on nous a reçus en 2003, je me dis oui ça valait la peine qu’ont viennent icitte. Voir comment ces gens-là étaient contents. Ils venaient nous chercher à tous les matins à 8 heures en autobus. Chaque côté de l’autobus, il y avait une grande banderole qui était écrite en coréen qu’on était des anciens combattants de la guerre de Corée, puis des Canadiens. Les gens s’arrêtaient, les autos arrêtaient pour klaxonner. Les gens nous applaudissaient quand on passait. Moi, je suis certain que n'importe quels Canadiens, aujourd’hui, je ne parle pas seulement des anciens combattants, mais des civils qui vont aller en Corée et puis qui s’identifient comme Canadiens, ils vont être bien reçus.