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- CHICAGO 17TH édition
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- TURABIAN 8TH édition
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Rexford Kingsley "Rex" Organ
Date de publication en ligne le 3 août 2022
Dernière modification le 3 août 2022
Ils n’aimaient pas que vous, je parle des officiers ou des chefs, ils n’aimaient pas ça quand deux gars devenaient trop amis, pour deux raisons. Une bonne raison, parce qu’il arrivait quelquefois de voir un ami, j’ai vu ça moi, il est là-bas blessé et vraiment en difficulté, et puis on n’allait pas l’aider. Vous ne pouvez pas faire ça parce que vous risquez de perdre deux hommes au lieu d’un seul. C’est un peu sans pitié, n’est-ce pas ? Mais vous ne pouvez pas. Ils ne voulaient pas que vous fassiez ça, de toute façon. Mais il y a une relation très proche entre les gens qui combattent sur la ligne de front. On est tous comme des frères les uns pour les autres.
Je me souviens d’une autre fois, on avançait, c’était, je crois, on avançait dans une des plus grosses forêts allemandes ; je crois que c’était la forêt d’Hochwald, si je me souviens bien. Et derrière cette forêt, vous pouvez appeler ça un fossé, ou quelque soit le nom qu’on lui donne, les allemands étaient là-bas avec des mitrailleuses. On traversait un endroit qui était aussi plat que cette assiette. Les allemands arrosaient toute cette région (avec les tirs de mitrailleuses). Et vous vous demandez souvent, comment diable vais-je arriver à sortir de là sans me faire toucher ? Mais beaucoup sont morts. Je suppose que c’est le fait de la guerre. Certains vivaient, certains mouraient, certains étaient blessés.
Mais en tout cas, ensuite le commandant de ma compagnie, qui était un père pour moi, il avait dans les 36 ans et moi j’en avais 22 à l’époque, et c’était un bon commandant. J’étais tout le temps avec lui. Et dans une compagnie il y a trois signaleurs parce que, en fait, vous travaillez presque 24 heures sur 24. Dans une avancée, je passais tout mon temps à transmettre des renseignements à chaque compagnie et au quartier général de la brigade, pour qu’ils aient une idée de ce qui se passait.
C’est juste des souvenirs. Alors je me souviens de cette fois-là, j’ai perdu mon commandant de compagnie parce que je regardais quelque chose et quand je me suis retourné, il n’était plus là. Il avait disparu. On traversait en courant dans la forêt, et j’ai dit, mon Dieu, où est-il ? Alors j’ai commencé à avancer, et je me suis figuré qu’il devait être devant moi quelque part ; et je ne le voyais pas. Et puis j’ai entendu des voix. J’ai écouté les voix ; et il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond. Et alors j’ai compris que c’était des soldats allemands. Alors je suis sorti, j’ai marché droit sur eux. Je pense qu’ils ont été surpris de me voir.
Mais je suis resté sur mon transmetteur, à raconter ce qui se passait pour qu’ils sachent ce qui se passait. J’ai réalisé qu’ils étaient six de l’infanterie, des soldats allemands, et officiers. Et j’ai soupçonné tout de suite, je les ai regardés, je me disais, bon, l’espère que ce ne sont pas des soldats SS, parce qu’ils me descendraient sur place, ici et maintenant. Mais ce n’était pas le cas. J’ai aussi réalisé qu’un de leurs hommes était blessé. Et une semaine avant qu’on attaque, il y avait eu énormément de tirs de l’artillerie alliée. Certains d’entre eux, je crois, étaient un petit peu (fait un bruit pour imiter) là dedans (leur tête). C’était monstrueux. Je n’avais jamais vu une telle intensité de tirs de ma vie.
Mais en tout cas, je savais qu’ils n’allaient pas tuer, ils essayaient de trouver comment sortir de là. Mais un d’entre eux était blessé. Et je ne suis pas certain de l’endroit où il était blessé, mais quelque part du côté des jambes ou entre les jambes. Et ils le transportaient. Et alors je leur ai dit, allongez-le à côté d’un arbre et mettez des oreillers, ou n’importe quoi d’autre qu’on pouvait trouver, des draps allemands, et on l’a laissé là, en partant du principe que quelqu’un allait venir le chercher.
Quoiqu’il en soit, j’avais ces soldats. J’ai finalement réussi à sortir. J’ai remis ces soldats à un autre régiment, pas mon régiment (Essex Scottish Regiment), mais un autre régiment, pour me débarrasser d’eux. Je les ai laissés là-bas. Et puis je me souviens que j’ai finalement réussi à rejoindre mon commandant de compagnie ; et je me souviens que les gens à qui j’avais remis mes prisonniers m’ont dit, ils ont dit, oh on va s’occuper d’eux, mais je les ai cru sur parole. Vous savez, j’ai entendu ce gars crier presque toute la nuit. J’y pense encore. Alors que j’aurais pu faire autre chose.
Je vais vous raconter un truc que les allemands faisaient. Ils changeaient les panneaux sur les routes pour semer la confusion chez les alliés qui avançaient. Et ils portaient des uniformes canadiens. Et s’il nous arrivait de les regarder parfois on n’y pensait pas plus que ça, ce sont des canadiens, vous savez, mais ils ne l’étaient pas. Mais quand ils se faisaient prendre, on les exécutait pour ça. C’était des choses qui se produisaient aussi.
Je me souviens de quand on a libéré les différents pays, en particulier de la Hollande. Je me souviens très bien de la Hollande. Ça me fait toujours pleurer quand je vous en parle, de voir ces gens avec des larmes dans les yeux. Ils avaient été occupés pendant six ans. Les allemands leur avaient tout pris. Leur bétail. Dans de nombreux cas, il y en avait qui étaient affamés. Des Lancaster venaient de temps en temps, et leur larguaient quelque chose à manger.
En tout cas, ils étaient tellement heureux – juste de les voir comme ça. La guerre est une chose terrible. Je veux dire, ce n’est pas un jeu. C’est la réalité : certains meurent, certains vivent. Certains ont été mutilés à vie et des choses comme ça. C’est une chose terrible.