J’étais sur une drague-suceuse à eau à Dawson City dans le Yukon en 1939-40 et dans cette région. En 1942, j’ai traversé le pays de Dawson à White Horse sur un petit bulldozer RD4 Cat avec un traineau dessus, pas de route ni rien, on a fait tout le chemin et vient juste de rater le train qui me ramenait chez moi pour Noël. Alors j’ai passé l’hiver là, comme assistant du directeur et veilleur de nuit à l’auberge de Cheval Blanc. Je suis reparti au printemps et suis allé m’engager dans l’armée. Et on m’a envoyé à Vernon [Colombie Britannique] en 1942.
J’ai à peine terminé de faire mes classes et que j’ai pris la mer avec le Royal Rifles of Canada, 2ème bataillon. Le premier était perdu à Hong-Kong ; et ils étaient tous français, ce qui ne m’amusait pas vraiment parce que je ne sais pas parler français. Alors on est arrivé à Otter Point de l’autre côté de l’île de Vancouver et de là, on est monté à Nanaimo à pied. Bon, j’ai appris il y a longtemps dans l’armée, quand tu arrives au début, tu ne vas pas les battre, alors c’est sans doute aussi bien de se joindre à eux. Donc j’étais sans doute le meilleur type de soldat que tout le monde veut avoir et je travaillais dur pour ça ; et on m’a demandé : « Est-ce que ça te dirait de faire partie d’une unité aux Etats-Unis ? Et j’ai pensé, bon maintenant, ça parait être une bonne idée. Et me voilà parti, une unité top secrète, pour une force d’opérations spéciales.
Et bien, je suis arrivé à Calgary et on est tous descendus à Helena [Montana] et on a suivi l’entraînement. Et on s’est entraînés à Helena, neuf mois d’entraînement pour détruire cette énorme station d’épuration des eaux en Norvège, 1800 d’entre nous. Et on nous a dit, vous n’allez pas rentrer au pays. Bon, je veux dire, vous peut-être pas mais moi oui, vous savez. Bon quoiqu’il en soit, on a fait de l’entraînement en montagne, et je veux dire du vrai entraînement de montagne, saut en parachute, corps-à-corps, toutes les armes que les allemands avaient et toutes les armes qu’on avait, on devait être des experts avec. De longues marches avec une trentaine de kilos sur le dos, je veux dire, des randonnées de 80 kilomètres. Difficile, pour que vous soyez au top de la forme. Et puis on est partis à Norfolk en Virginie et on a fait de l’entraînement avec les amphibies. Les bateaux pneumatiques et ce genre de trucs ; et on en a fait deux comme ça pendant la guerre.
Bon, ils ne savaient pas quoi faire de nous quand on nous a dit, bon, que les norvégiens s’étaient déjà occupés eux-mêmes de la station d’épuration. Alors ils nous ont envoyés dans les Aléoutiennes sur Kiska et on est allé à terre pendant trois jours avant qui que ce soit d’autre dans la mer de Béring sur des canots pneumatiques et on leur a dit qu’il n’y avait personne là-bas, alors l’ordre est arrivé, ramenez-les à Frisco [San Francisco]. Alors on est retournés, on a eu 10 jours de permission, la première permission que j’ai eue et dans le Vermont pendant 10 jours ; et du Vermont, bon, on est descendus à Norfolk en Virginie pour l’entraînement amphibie et de là, on a atterri à Casablanca. La traversée de l’Afrique dans des « 40/8 » [NDT : wagons de marchandises qui servaient au transport de troupes, ils sont faits pour contenir 40 hommes ou 8 chevaux], sortie d’Alger et entrée dans Naples et ça a été le test, on est partis dans la montagne en Italie.
Notre première mission c’était un truc défensif dont ils ont parlé à tout le monde et on a juste continué jusqu’à ce qu’on prenne les montagnes et les a laissés s’échapper pour que les autres armées qui venaient du sud puissent monter au nord. Et on est allés à Anzio Beachhead, un magnifique station. On a passé seulement 99 jours dans le même trou ; et on patrouillait presque toutes les nuits et finalement on est sortis de là et on a été les premières troupes dans Rome.
De Rome, on est retournés à Salerne et on a entraîné la marine américaine à faire passer des bateaux pneumatiques par-dessus bord. Et on est allés dans le sud de la France avec la 6ème armée [Lieutenant général Alexander] sur des bateaux pneumatiques à Marseille. Et de là, on a juste continué à avancer sur ce qu’on appelait « la tournée du champagne » le long de la riviera jusqu’à Menton, et plus tard, on nous a séparés. Les américains sont repartis à la bataille et les canadiens sont tous partis en Angleterre.