On nous a transformé en 166ème régiment de campagne en janvier 1941. Et on avait fait tout notre entrainement et quand on a eu complètement terminé l’entrainement en Angleterre, en Écosse et au pays de Galles, on a pris la mer à Glasgow le 23 janvier, en direction de l’Afrique du Nord. On est arrivés le 1er février en Afrique du Nord, on a passé un sacré moment. Parce qu’à ce moment-là, on était la 1ère armée (britannique) avec très peu de personnel là-bas, qui dépendait des troupes coloniales françaises qu’on soutenait avec l’artillerie. Et après que la bataille soit finie en Tunisie, on a participé au défilé de la victoire en Tunisie.
De là, on est retournés à Sétif, pour réparer tous nos équipements et nous préparer pour l’invasion de la Sicile et de l’Italie. Quand on était la 8ème armée (britannique), on a pris le relais des canons autotractés et j’ai passé toute la nuit debout avec un des mitrailleurs parce qu’il était surexcité en quelque sorte, à essayer de calmer un peu son ardeur. Et le lendemain on est parti au combat.
Et dans l’après-midi j’ai dit au commandant adjoint, je vais aller me reposer maintenant, alors j’ai pris ma capote et je l’ai pliée ; je suis allé dans ma mini tente et je me suis allongé. Et il m’a semblé que dans la minute mon père est apparu à la porte. Et il m’a dit, qu’est-ce que tu fais ici ? J’ai répondu, je me repose. Il a dit, ce n’est pas un endroit pour se reposer. Il a dit, tu devrais sortir de là. Et il portait toujours la moustache mais cette fois-là, il n’avait pas de moustache alors j’ai demandé, papa, qu’est-ce que tu as fait de ta moustache ? Il a dit, ne t’occupes pas de ma moustache, il a dit, je te dis de sortir de cette tente.
Or, dans mon imagination, cette mini tente était une tente immense et il se tenait debout. Alors je me suis levé d’un bond et il n’était plus là. Mais la tente était là. Alors je suis allé dans le trou à canon, et juste quand je suis arrivé là, un obus est tombé sur le canon numéro un. A mis le feu au filet de camouflage et blessé le sergent. Le suivant est tombé derrière mon canon et les gars sur le canon ont dit, bon maintenant son but c’est d’encadrer le numéro un (canon), il est en train de l’encadrer, et l’obus suivant est ici. Mais l’obus suivant est tombé du côté du canon numéro trois.
Alors cette nuit-là quand il a commencé à faire froid là dehors, en Afrique quand le soleil se couchait, ça suffisait à vous frigorifier – alors je suis allé prendre ma capote à l’intérieur et je l’ai ouverte, un éclat d’obus en est tombé. L’éclat d’obus avait traversé la tente, était passé à travers ma capote ; juste comme ça, là où je l’avais laissée pliée. Alors le seigneur était avec moi.
Je voudrais insister sur le fait que le 166ème était un régiment de campagne de Terre-Neuve, avait été recruté à Terre-Neuve et qui s’était porté volontaire pour faire partie de l’armée britannique. Et c’est la raison pour laquelle, quand les gens me demandent, pourquoi je ne me suis pas engagé dans l’armée canadienne, ils ne comprennent pas aujourd’hui, qu’en 1940, on était sous protectorat anglais. La Grande Bretagne nous avait sous sa coupe. Et c’est la raison pour laquelle ici on a fait partie de l’armée britannique, pas sous l’autorité du gouvernement de Terre-Neuve. Le gouvernement de Terre-Neuve n’avait aucun pouvoir. L’armée britannique nous payait, tout ce qu’on a fait ça a été de nous porter volontaires dans l’armée de terre. On avait deux régiments, le 166ème, qui comprenait le 57ème et le 59ème (Régiments lourds, Artillerie royale). Le 59ème est parti en France. Nous sommes allés en Afrique et on a fini en Italie.