J’avais essayé trois fois de me porter volontaire dans le service et on m’avait rejeté à cause de ma vue à ce moment-là. Au début de la guerre, ils examinaient votre forme physique avec beaucoup d’attention. Vers la fin de la guerre, je pense qu’ils se contentaient de compter le nombre de globes oculaires sans aller plus loin. En tout cas, j’ai été rejeté trois fois à la visite médicale à cause de ma vue.
Alors je suis retourné à Terre-Neuve et je travaillais dans une banque ; et j’avais été transféré à Grand Falls à Terre-Neuve. Et à ce moment-là, je jouais du piano et je joue toujours du piano, mais je jouais dans une petite formation de quatre, cinq instruments le samedi soir quand les soldats venaient de Gander et de Botwood (bases RCAF). Bon, après quatre ou cinq mois de ces soirées du samedi, on avait deux ou trois cents personnes de l’armée de l’air et de l’armée de terre qui venaient de Gander et Botwood à ces soirées dansantes ; et après plusieurs mois, cet officier est venu me voir et a dit, j’ai besoin d’un comptable au Corps royal de l’intendance de l’Armée canadienne à Botwood; et je pense que je peux vous faire entrer dans l’armée. J’ai dit, bon, j’ai essayé trois fois, je n’ai pas réussi à être accepté dans l’armée. Il a dit, bon, venez lundi matin et je vous retrouverai à la base et je vous conduirai là-haut pour passer une visite médicale. Je n’y ai plus pensé de tout le weekend. Finalement, le lundi est arrivé et je me trouvais dans ma cage de caissier à 11 heures du matin et j’ai pensé, oh, je peux prendre mon après-midi, je ne vais sans doute pas pouvoir entrer dans l’armée mais, d’un autre côté, j’aurai mon après-midi de libre, et je vais aller voir mon responsable.
Alors je suis allé voir le responsable. Il était un petit peu perturbé parce qu’il savait que j’avais essayé trois fois de me porter volontaire. En tout cas, il a dit, d’accord, allez-y, et trouvez quelqu’un pour s’occuper de votre caisse. Alors j’ai, le train allait de Grand Falls à Botwood à cette époque, alors je suis monté dans le train, à midi, et suis descendu à Botwood. Et l’officier avec qui j’avais discuté, c’était un ancien combattant de la Première Guerre mondiale, qui servait à Botwood à ce moment-là, à la tête de l’intendance de l’armée canadienne. Il m’a emmené dans l’hôpital, qui était entre les mains du Corps royal de l’intendance de l’Armée canadienne à ce moment-là et, bien sûr, il a posé les différentes questions, le capitaine responsable là-bas. Alors après avoir écrit mon adresse et où j’étais et ce que je faisais, et ainsi de suite, il m’a fait monter sur la balance, m’a pesé, m’a mesuré ; et puis on a frappé à la porte. On a besoin de vous dans la salle d’opération immédiatement, le patient vient juste d’arriver, c’est une urgence. Il s’est levé d’un bond de son bureau, a enlevé son manteau, sa veste de l’armée, l’a accroché au porte-manteau après avoir pris sa blouse blanche du porte-manteau, a enfilé sa blouse blanche et il est parti, en criant au sergent, sergent, remplissez le reste du formulaire, je le signerai quand je reviendrai.
Il était parti, le sergent a regardé le formulaire. J’ai dit, d’accord maintenant, pouvez-vous lire le panneau ? Alors moi, avec mes lunettes sur le nez, j’ai lu le panneau, 10 sur 10 à chaque œil (20/20). J’étais bon. Or, la formalité suivante à remplir c’était de demander au gouvernement de Terre-Neuve la permission pour moi de m’engager dans l’armée canadienne. Parce qu’à cause d’une histoire qui était arrivée avant, quand des Terre-neuviens s’étaient engagés dans le, je crois que c’était les Royal Rifles et avaient été envoyés à Hong Kong, plutôt mal entrainés, le gouvernement de Terre-Neuve, d’après mes souvenirs, a décidé qu’il n’y aurait pas de nouveaux terre-neuviens qui s’engageraient à moins qu’ils aient un métier. Bon, moi j’avais un métier, j’étais comptable. Et les papiers officiels sont arrivés. Un grand morceau de parchemin, avec tous les sceaux et différentes choses dessus, donc en l’espace de deux mois j’étais, j’étais dans l’armée canadienne à Botwood.
Je me souviens très bien avoir participé à la boulangerie qu’on avait à Gander, qui fournissait tout le pain pour tous les canadiens et l’armée de terre et l’armée de l’air canadiennes. Et elle a été démantelée et renvoyée par les Biens de la Couronne. Alors ça a été à peu près la fin de mes fonctions à Terre-Neuve, alors j’ai été envoyé à Halifax pour être libéré de mes obligations militaires. Je suis arrivé à Halifax, ai passé la visite médicale, reçu confirmation de mon grade, eu mes papiers tout prêts et ainsi de suite, et puis quand tout ça a été terminé, après avoir passé la visite médicale et ainsi de suite, l’officier m’a demandé, il a dit, qu’est-ce que vous allez faire maintenant comme la guerre est finie ? J’ai répondu, je vais à Toronto. Mon travail a été déplacé de Terre-Neuve à Toronto ; et je vais partir pour Toronto. Bon, il a remis ça en question en quelque sorte et il a dit, vous ne pouvez pas aller à Toronto, vous n’êtes pas canadien. J’ai dit, bon, j’ai fait partie de l’armée canadienne pendant plus de quatre ans. Et bien, ça ne change rien, je vais devoir vous envoyer aux douanes et à l’immigration. C’est ce qu’ils ont fait ; et je suis passé par le même entrainement rigoureux, examen rigoureux par les douanes et l’immigration. Et finalement ils m’ont dit, pouvez-vous prouver que vous avez un travail au Canada ? J’ai dit oui, j’ai une lettre dans ma poche ici et j’ai sorti la lettre et lui ai montré que j’étais transféré à Toronto. Alors il a dit, bon, on va devoir attendre quelques minutes, mais je serai de retour dans 20 minutes. Alors 20 minutes après, il est revenu et il m’a donné la carte verte de la résidence permanente, comme ça j’ai pu aller à Toronto.