Project Mémoire

Roger Page

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Roger Pagé
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Equipage au grand complet du HMCS Baddeck pendant les années de guerre.
Roger Pagé
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M. Roger Pagé à Londres, Angleterre, en 1943.
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Troisième classe des auteurs ingénieurs du HMCS York en septembre 1943. M. Roger Pagé est au premier rang, le premier à droite.
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M. Roger Pagé est le deuxième à droite dans la deuxième rangée, avec l'équipage du HMCS Baddeck en septembre 1943.
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Au fond, du côté droit, on aperçoit les côtes anglaises. Lorsque nous escortions des convois sur la Manche, et que nous naviguions entre Calais, France et Dover, Angleterre, les batteries côtières allemandes nous bombardaient.
Roger Pagé
Je voyais de lueurs au loin, des explosions. Il y avait des centaines de bombardiers qui passaient au-dessus de nous autres. Ils remorquaient des planeurs.

Notre première expérience en mer était en janvier 1944. Nous avons escorté un navire de Halifax à Saint John’s, à Terre-Neuve. On m’a dit que le nom de ce bateau-là c’était le Fort Thompson. C’était un navire relativement rapide. À bord du navire, il y avait ce qu’on appelait les ‘Wrens’ [Women’s Royal Canadian Naval Service, le Service féminin de la Marine royale du Canada], les filles de la marine. La mer était très mauvaise et il faisait excessivement froid. Une fois arrivé à Saint John’s, il y avait de cinq à six pouces de glace tout le long de la corvette. Nous avons dû passer une journée complète à déglacer la corvette à Halifax.

De Halifax, nous avons escorté un convoi assez important. Il y avait plusieurs destroyers et corvettes. Je ne me souviens pas le nombre exact de navires de guerre. C’était un convoi important. Ça a pris 14 jours de Halifax à Londonderry en Irlande. Rendu là, la corvette a subi des réparations et il y a eu des ajouts aux armements. Ça a duré pas loin d’un mois. De là nous avons traversé la mer d’Irlande jusqu’au sud de l’Angleterre. Je ne me rappelle pas le nombre de ports que nous avons faits dans le sud de l’Angleterre. Nous sommes restés là jusqu’au 5 juin 1944. Le 5 juin au soir, 1944, un aumônier catholique et un aumônier protestant sont montés à bord pour nous donner l’absolution. On savait que l’invasion [de la Normandie] était proche, mais on ne nous avait rien dit. C’était strictement confidentiel.

Ils nous ont donné l’ordre d’appareiller durant la nuit. Nous avons escorté un vieux cuirassé français, le Courbet. C’est un navire de la première Grande Guerre. C’était un vieux cuirassé français qui était remorqué jusqu’à Ouistreham en France pour être coulé. Il devait servir de brise-lame. Ça a été notre premier voyage en France. Ça a pris deux jours pour se rendre à Ouistreham. Nous sommes arrivés en France le 8 juin. Durant le trajet, dans la nuit du 5 au 6, je m’étais assis dehors adossé à la cheminé parce que c’était chaud et il faisait froid dehors. Je voulais voir ce qui se passait. Je voyais de lueurs au loin, des explosions. Il y avait des centaines de bombardiers qui passaient au-dessus de nous autres. Ils remorquaient des planeurs. À bord des planeurs il y avait des parachutistes qui s’en allaient en France.

L’autre chose dont je me souviens très bien; on arrivait en France, on était à la tête d’un petit convoi de sept ou huit navires. Puisqu’on était proche des côtes, le navire qui était derrière nous pensait qu'il n’y avait plus aucun danger. Il s’est faufilé à notre droite, à tribord. J’étais en train de souper, il était 17h20 de l’après-midi. La Manche était calme comme de l’huile. Tout à coup, il y a eu un bang épouvantable! Les assiettes ont sauté d’un pied dans les airs. La lumière est partie, car on était dans le mess. Je crois que ça m’a pris dix secondes à sortir. Quand je suis arrivé à l’extérieur, le bout du mât descendait. Il y avait seulement que des débris. On m’a dit qu’il y avait 28 personnes à bord. Ils sont tous morts. Je n’oublierai jamais ça. Ça a été pas mal la pire expérience. Naturellement dans les convois, les Allemands se sont essayés. On a lancé des grenades sous-marines à quelques reprises. Quelques débris montaient à la surface. Est-ce qu’on a coulé le sous-marin ? Peut être que oui peut être que non. On ne le sait pas.