Project Mémoire

Romeo Bourgeois

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

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Romeo Bourgeois se tenant debout devant sa tente après avoir rejoint l'armée alors qu'il stationnait à Camp Utopia, Nouveau Brunswick, 1945.
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Lettre datée du 27 avril 1943, remerciant Romeo Bourgeois pour son action et son courage en ayant retiré le sergent Steele d'un avion en feu qui s'était écrasé.
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Romeo Bourgeois, au premier rang à gauche, se tenant debout devant un Tiger Moth avec l'équipage de l'École élémentaire de formation de vol à Neepawa, Manitoba, 1943.
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En tant que mécanicien de la RCAF, Romeo Bourgeois à testé des avions, en volant avec le pilote. Il a pris cette photo depuis un Tiger Moth qu'il était en train de tester, 1943.
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Romeo Bourgeois (à gauche) en permission, se tenant debout avec son frère Delphis Bourgeois (à droite) qui, à l'époque, était cadet, 1945.
Romeo Bourgeois
Quand tu vas dans le service tu ne dois pas t’attendre à être traité comme un roi ou une reine. C’est ça la guerre.

J’ai décidé [de m’engager] parce qu’il n’y avait pas d’ouvrage par chez nous. J’ai décidé que j’allais aller dans l’Air Force [l’aviation]. J’ai été essayé et ils ne m’ont pas pris. J’ai été à Chatham. J’ai signé avec l’Air Force et ensuite j’ai été transféré à Neepawa, Manitoba. J’ai travaillé là trois ans. J’étais aeroplane mechanic [mécanicien pour les avions]. C’est là que j’ai crashé en aeroplane [je me suis écrasé en avion]. Les controls [instruments de bord] de l’avion [ont mal fonctionné] dans l’air et l’avion s’est écrasé, moi j’étais assis en arrière. Le sergent Steele était assis en avant. Lorsqu’on a frappé le sol, il a été projeté vers le moteur et moi j’ai été éjecté de l’avion. J’ai couru vers lui et je l’ai sorti de l’avion et il est mort dans mes bras [Note de la rédaction : la lettre écrite par le directeur de l’école d’aviation (voir l’objet-souvenir) semble indiquer que le sergent Steele aurait survécu – mais ceci n’a pu être confirmé]. J’ai été à l’hôpital et j’y suis resté cinq mois. Je voulais rejoindre l’Air Force tout de suite. Lorsque je suis sorti de l’hôpital, il y avait une Jeep qui m’attendait.

En 1944, j’ai décidé que je voulais aller overseas [outremer]. J’ai essayé de rentrer dans l’armée à Winnipeg et ils n’ont pas voulu me prendre. Je suis revenu ici et je suis allé à St-Jean et j’ai essayé de joindre la Navy [la marine], mais ils n’ont pas voulu me prendre. À Fredericton je n’ai pas eu de misère; ils m’ont pris. J’ai fait trois mois de basic training [entraînement de base] à Edmundston. J’ai fait trois mois d’advanced training [entraînement avancé] à [Camp] Utopia [au Nouveau-Brunswick]. C’était pendant ma dernière leave [permission] deux semaines avant de partir, la guerre a fini [en Allemagne]. Quand je suis retourné à Utopia, ils nous ont demandé si on voulait être volontaire pour aller au Japon. On s’est entraîné deux semaines. Ils ont jeté une bombe sur Hiroshima.

Ils m’ont mis dans la police militaire. J’ai été dans la police militaire jusqu’en 1946. Des fois tu en rencontrais qui était plus tough [dur] que toi. Il y en avait des pas mal tough. Ce n’était pas pire, on allait aux danses. Parfois il y avait des chicanes. On était stationné [au camp militaire] Utopia. C’était à cinq minutes de [la base aérienne] Pennfield [Ridge]. L’armée et l’Air Force n’allaient pas bien ensemble. L’armée n’aimait pas l’Air Force et l’Air Force n’aimait pas l’armée. Souvent il y avait de chicanes. Souvent quand on allait aux danses pour les accompagner, ça passait.

On s’occupait des prisonniers également. Ils dormaient sur des lits en bois sans matelas avec juste un oreiller. Ils se levaient le matin et pendant qu’ils faisaient leur toilette, ils devaient [marquer le pas]. Après, on jetait du charbon par terre. Ils devaient ensuite se mettre à genoux et nettoyer le tout. On faisait ce qu’on nous disait de faire. Même si ça ne faisait pas leur affaire, ils y étaient forcés. Il y en avait peut-être une dizaine qui lavaient le plancher et on leur donnait des coups de pieds dans le derrière. Ils devaient vraiment faire briller leur cellule avant qu’on serve le déjeuner. Ils mangeaient tout le temps dans la cellule. C’était la même chose à midi. Et l’après-midi c’était encore la même chose; ils mangeaient dans leurs cellules. Le soir après le souper ils faisaient du mark time [marquer le pas] avant de se coucher, avec juste un oreiller sur la planche.

Des fois c’était 30 jours, ça dépend ce qu’ils avaient fait. Ça dépend des raisons. S’ils étaient en retard, on les gardait pour trois jours. S’ils s’étaient enfuis de l’armée, ils pouvaient être là de 30 à 60 jours. Malgré tout le trouble qu’on avait avec eux autres, ceux qui venaient nous rendre visite ne revenaient jamais une deuxième fois. Ce qui se passait dans l’armée restait dans l’armée. On m’a demandé : « Pourquoi tu veux aller à la guerre ? » Je veux aller me battre et défendre mon pays. Je voulais y aller au Japon. Je savais ce qui se passait. Je voulais prendre ma chance. Peut-être que ma tête n’était pas droite, mais je voulais y aller. Quand tu vas dans le service tu ne dois pas t’attendre à être traité comme un roi ou une reine. C’est ça la guerre.