Prenez note que les sources primaires du Projet Memoire abordent des temoignages personnels qui refletent les interpretations de l'orateur. Les temoignages ne refletent pas necessairement les opinions du Projet Memoire ou de Historica Canada.
Transcription
Il n’y avait que maman et moi. Ensuite, ma mère a dû trouver quelque chose à faire, bien sûr. À cette époque, les gens n'avaient pas l'éducation qu'ils ont aujourd'hui et elle avait toujours voulu être infirmière. Elle est donc allée au Royal Lying-In Hospital, York Street, à Londres, et est devenue infirmière. À cette époque, j'ai vécu pendant un certain temps avec une de ses amies qui s'est occupée de moi pendant qu'elle suivait sa formation. Ensuite, nous avons vécu ensemble à Beaconsfield Road, West Croydon, et maman a fait son métier d’infirmière, et j’ai grandi. Avant l'entrée en guerre, l'année précédente, ce n'était pas facile du tout. Tout le monde était sur les nerfs et on cherchait des volontaires. Je me suis donc inscrite à l'AFS (Auxiliary Fire Service). Bien sûr, lorsque la guerre a éclaté, en septembre 1939, j'ai été appelée. Et comme il n'y avait que maman et moi, et que maman avait déjà été appelée à cause de son travail d'infirmière, je n’ai pas reçu d’affectation ailleurs. Dans le service des pompiers, j'étais dans le service des pompiers de Croydon et j'y suis restée. Je suis restée avec eux tout le temps. Nous travaillions tant de jours de travail, tant de jours de repos. Alors, bien sûr, j'étais parfois à la maison et parfois au service des pompiers. La plupart des gens avaient les nerfs à fleur de peau et je dirais que le pire, c'était d'essayer de rester éveillé à trois heures du matin. Frank m'a écrit d'Italie pour me dire qu'il pensait obtenir un congé (au Canada) parce qu'ils avaient un système de points et qu'ils avaient assez de points ; et que je devais prendre des dispositions, ce qui impliquait d'aller au bureau canadien à Londres pour organiser mon départ outre-mer. C'est ce que j'ai fait, en pensant, bien sûr, que cela prendrait des années avant d'avoir des nouvelles, parce qu'avec beaucoup de mes amis, cela prenait une éternité. Mais en moins de deux semaines, j’étais à bord d’un navire. J'étais sur le dernier bateau à quitter l'Angleterre pour le Canada et la paix a été déclarée deux jours après le départ vers Halifax. Je me trouvais donc sur un petit navire, à deux jours d'Halifax, écoutant à la radio les célébrations en Angleterre. Deux jours après notre départ vers Halifax, la ville était en pleine émeute. Je me suis dit : « Seigneur, je viens de passer d'un pays déchiré par la guerre à un autre », parce qu'il y a eu un soulèvement à Halifax. Ils nous ont donc gardés à bord du navire pendant deux jours avant de nous laisser entrer au Pier 21. J'avais vraiment le mal du pays. Il n'y avait que maman et moi, et nous étions très, très proches. Quand j'y repense aujourd'hui, je me demande comment j'ai pu dire au revoir et marcher jusqu'au train pour quitter vers Londres. Après avoir eu mon premier enfant, mon fils, j'ai réalisé ce qu'elle avait dû ressentir. J'ai écrit à ma mère pour lui dire que je n'aimais pas le Canada et que je voulais rentrer à la maison. Mais avec l'aplomb habituel de ma mère, elle m'a dit que j'avais pris un engagement et que je devais le respecter. Et nous n'avions pas d'argent pour que je rentre à la maison, je n'aurais de toute façon pas pu rentrer. Lorsque Frank est rentré à la maison le 30 octobre 1945, les choses se sont beaucoup améliorées parce que, vous voyez, je ne connaissais personne et les façons de faire m'étaient étrangères. J'étais étrange pour eux. Je ne comprenais pas l'argent et tout ce qui volait autour de moi semblait me mordre et m’empoisonner. (rires) Et je pensais que c'était un pays horrible, où il faisait si chaud. Mais, bien sûr, avec le temps, je me suis installée, surtout après la naissance de mes deux enfants. C’est devenu mon chez-moi.