William (Bill) Bissonnette (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

William (Bill) Bissonnette (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

William Bissonnette a servi dans la Royal Air Force britannique pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Ray Bissonnette
Ray Bissonnette
Sélection de pages du livret de bord de Raymond Bissonnette de juin 1944. Les vols de nuits sont inscrits en rouge et ceux de jours en vert.
Ray Bissonnette
Il dit, ça te plairait d’être mon navigateur ? J’ai dit, oui ça me plairait beaucoup. Bon sang, c’est la meilleure chose que j’aie jamais faite.

Transcription

De là on (166ème escadron de la RAF) est partis dans une unité d’entrainement opérationnel ; et celle-là, quand une unité d’entrainement opérationnel démarrait une nouvelle classe, ils envoyaient le même nombre de pilotes, de navigateurs, de viseurs de lance-bombes, de mitrailleurs arrières et d’opérateurs radio. Et vous étiez là tous ensemble à tourner en rond dans l’école de formation au sol pendant une semaine, dix jours. Et vous choisissiez votre équipage. Je me souviens encore, bon, moi j’étais officier alors j’étais dans le mess des officiers, et tous les autres étaient sergents et je trainais là. Ce soir-là, j’étais dans le mess des officiers et ce gars de petit en taille arrive ; et il me dit, je dis, il a dit, tu as déjà trouvé un pilote ? Je dis, non. Il dit, ça te plairait d’être mon navigateur ? J’ai dit, oui ça me plairait beaucoup. Bon sang, c’est la meilleure chose que j’aie jamais faite. On a formé un équipage. On allait partir dans un escadron. Premièrement, on allait être sur des quadrimoteurs (du type de l’Avro Lancaster) et donc il fallait qu’on aille dans une unité de conversion (pour entrainer les équipages sur différents appareils). Au fond ça consistait pour le pilote à apprendre à faire voler un quadrimoteur et c’est là que vous aviez besoin de deux membres d’équipage supplémentaires. Vous aviez besoin d’un autre mitrailleur et d’un mécanicien de bord. Alors ils nous ont juste donné, bon, ils ont dit, oui, le pilote vient de Birmingham, voilà un mécanicien qui vient de Birmingham. Et ils nous ont donné un mitrailleur dorsal, on a eu un mitrailleur dorsal écossais de 19 ans. Et voilà on était, c’était un équipage complet. Et puis il était temps de rejoindre un escadron. Or, quelque soit l’endroit où vous regardiez en Angleterre il y avait des aéroports de toutes sortes, mais il y avait une liste d’escadrons qui avaient des besoins en équipages et mon pilote est en train de regarder cette liste. Oh, dit-il, bon, il y a Bill Grant, c’était un pilote qui avait fait tout son entrainement avec lui, et c’était son meilleur copain. Et Grant avait été choisi à la base de Kirmington. Et il a dit, ça vous est égal si on va à Kirmington ? On s’en fiche d’aller à Kirmington ou pas. C’est tout pareil pour nous, alors on est allés à Kirmington. Quand les navigateurs ont eu fini et on est sortis et l’autocar allait nous conduire et je sors en marchant en compagnie du navigateur de Bill Grant. Et j’ai dit, je te parie un bob (c’est un shilling ou une pièce de 25 centimes), j’ai dit, je te parie un bob qu’on vous bat au retour. Il a répondu, pari tenu. Alors quand on est revenus, les autocars venaient chercher chaque équipage séparément et dès qu’on est arrivés dans la salle de débriefing, le pilote est allé signer le tableau là haut et c’était l’ordre, parce qu’il n’y a que trois ou quatre officiers pour parler à tous ces équipages, alors peu importe à qui le tour… On l’a regardé, il me doit un bob. Le seul problème c’était, ils ne sont jamais rentrés. C’était à Gelsenkirchen (Allemagne) ; c’était notre cinquième vol et ils ont juste été portés disparus sur celui-là. Personne n’a jamais su ce qui leur était arrivé, ont explosé, peu importe. Ils ne sont jamais revenus. C’était à nouveau un vol de jour. Chance, si on peu appeler ça de la chance d’être touché par les tirs de DCA. Mais on a été touchés, mais on allait bien ; les moteurs fonctionnaient tous. Et on est rentrés à la base, et c’est le moment où on se prépare pour l’approche finale et le mécanicien dit, regarde la roue droite ; et la roue droite faisait juste flop, flop, flop, avec un pneu à plat. Je dis, oh merde alors. Alors on a appelé la tour et dit, on a un pneu à plat sur la roue droite, qu’est-ce que vous nous conseillez ? Or, on était les premiers de retour. Il a dit, n’atterrissez pas ici. Et en Angleterre pendant la guerre il y avait des terrains d’atterrissage spéciaux pour les atterrissages en catastrophe. Il y avait celui de Woodbridge dans le sud, Manston dans la région du centre, et Carnaby dans le nord. Et pratiquement ces terrains c’était, c’était une longue, très longue piste, vous pouviez atterrir sans freins et juste, vous aviez assez de place pour glisser jusqu’à l’arrêt complet. Pas seulement ça, si vous arriviez là avec un brouillard à couper au couteau, vous saviez que vous étiez là-bas, parce que votre radar vous indiquait, je suis juste au dessus, mais je n’arrive pas à le voir. Ils avaient des tuyaux des deux côtés de la piste et les deux bouts avaient des trous ; et ils envoyaient de l’essence dedans et leur faisaient prendre feu, et ça dissipait le brouillard. Je me souviens d’un pilote qui disait qu’il avait dû atterrir comme ça une fois, avec ce feu qui brûlait, et il disait, c’est comme si on essayait d’atterrir aux portes de l’enfer. En tout cas, on est remontés à Carnaby. On leur a raconté notre problème : on a un pneu à plat sur le côté droit, qu’est-ce que vous nous conseillez ? Et il a dit, bon, vous avez deux possibilités. Il a dit, vous pouvez laisser le train en l’air et juste atterrir sur le ventre ou vous pouvez essayer d’atterrir sur une seule roue et avec la roue arrière ça fait comme sur un vélo. Mon pilote a dit, on ne va pas atterrir sur le ventre. Il dit, tout le monde en position atterrissage en catastrophe. Bon, ma position à moi, je suis assis sur le sol, le dos contre les barres de flanc, c’était très, très haut ; et j’avais l’opérateur radio assis d’un côté et le mitrailleur dorsal assis de l’autre côté et leurs intercoms fonctionnaient et ils étaient reliés à leur station, alors ils savaient ce qui se passait. Le mien ne marchait pas. Alors moi je suis là assis à attendre que ça se passe. Et il a juste, oh, le meilleur atterrissage qu’il ait jamais fait. Il l’a fait glisser en douceur. C’était un dimanche après-midi radieux et il l’a juste fait glisser doucement comme un vélo, et descendre.