J’ai demandé si je pouvais être pris comme chauffeur de camion. Bon en tout cas, on m’a mis dans le 48ème Highlanders, ce que je voulais depuis le début. Quand je suis allé faire mes classes, j’y étais en tant que membre du 48ème Highlanders du Canada. Donc quand je suis arrivé à Camp Borden au Canada, un paquet d’entre nous on était en rangs et ils nous ont dit qu’on était dans les Lorne Scots. Et puis à partir de là, des Lorne Scots, je suis parti en Angleterre et quand j’étais en Angleterre, j’ai pu être un motard et on m’a transféré dans le Corps (royal canadien) des magasins militaires.
Le meilleur moment que j’ai passé, compte tenu du fait que c’était la guerre, c’est quand on a demeuré dans une famille hollandaise. On pouvait voir le pont, hollandais, le pont de Nimègue. De l’autre côté du pont il y avait les allemands et de ce côté ci c’était les canadiens. On venait là, je ne sais pas à combien de kilomètres de la ville on se trouvait exactement mais ça arrivait dans la ville. C’était une petite partie de Nimègue. Les officiers nous ont dit, allez voir si vous pouvez trouver un endroit pour dormir et puis remontez la rue en frappant aux portes et demandez si vous pouvez rester là, pour dormir.
Alors on a frappé à la porte, trois d’entre nous ont frappé et bien sûr, aucun d’entre nous ne parlait hollandais mais on a dit « slaapen ? » (dormir ?). Et elle a compris ! Elle dit, oui, oui, oui. Et elle nous a emmené à l’étage et il y avait deux lits dans cette chambre, et avec des matelas. On n’avait pas vu de matelas depuis des mois, des années ! Parce qu’on avait des matelas, ils étaient faits en foin, paille, on avait l’habitude de prendre de la paille et de mettre de la paille dedans et c’était ça notre matelas. Elle avait des couvertures. Et ce qu’on faisait c’était, ils avaient très peu de nourriture là-bas aussi alors ce qu’on faisait, on avait un bâtiment vide dans lequel on prenait nos repas ; on avait droit à une part par repas. Mais il y avait toujours du pain et de la confiture. Le matin, on rapportait des tranches de pain, on nettoyait nos gamelles - ils appelaient ça des gamelles là où on mettait notre nourriture – on lavait ça dans l’eau chaude. Ensuite on mettait, les remplissait avec des tranches de pain, de grosses cuillerées de confiture et on leur rapportait ça. Au déjeuner, on rapportait du pain et de la margarine, s’il y avait du dessert, du flan ou quelque chose, on avait ça, et il y en avait des tonnes. On rapportait tous du flan ou quelque chose d’autre, ou de la confiture ou peu importe ce soit qu’on pouvait prendre, et on leur rapportait.
Et puis le soir au dîner, on faisait la même chose, on rapportait du pain et de la confiture et après le dîner, on, oh, il y avait trois filles dans cette famille et un fils et après le dîner, on s’asseyait tous ensemble et on jouait aux cartes et on partageait le pain et la confiture qu’on apportait, et c’était comme ça qu’on se divertissait. On était à l’abri du froid et c’était tellement agréable.
Je sais qu’il faisait froid, peut-être au cours de l’hiver, vous savez, 1944. Un officier est venu me voir, il dit, on a besoin de toi pour amener un groupe de camions là-haut pour livrer de la nourriture. Et j’ai dit, où, dans un autre camp ? Il répond, non, c’est à proximité des lignes allemandes. Et il dit, c’est un convoi de camions. Oh je ne sais pas, il y avait une quinzaine, une vingtaine de camions je pense, et elles avaient un chargement de cartons à l’arrière ; un chargement de conserves de bœuf, des boites de sardines et des conserves de fruits. C’était tout des rations de l’armée – de la nourriture, c’est tout ce qu’on avait, voyez. On y est allés, j’étais, l’officier était derrière moi dans une jeep dans les camions, on avançait derrière lui et moi j’étais à l’avant. Et il m’a dit ce qui se passait. On est arrivé dessus, on s’est arrêtés et il a dit, oh, c’est la route maintenant, les allemands sont en haut de cette route ; on ne peut pas avancer plus loin. Mais vous voyez, quand vous arrivez là-haut, vous verrez des civils hollandais qui se tiennent sur la route.
Donc en tout cas, en remontant j’ai vu des civils hollandais avec des drapeaux blancs. Et j’ai pensé, oh, ça doit être l’endroit. Et en haut de la route, je voyais les allemands qui marchaient de long en large avec leurs fusils et qui nous regardaient. Et les hollandais, ils ont déchargé la nourriture et l’ont déposée sur une colline de la route, il y avait une petite colline là-bas, et ils ont pris toute la nourriture et ont déchargé la nourriture. Et quand ça a été terminé, l’officier a sifflé dans un sifflet et on est juste partis.
J’étais un peu nerveux. Je n’étais pas effrayé, juste un peu nerveux parce que les allemands n’arrêtaient pas de nous regarder fixement, vous savez. Et ils n’avaient rien non plus, ils n’avaient rien non plus. Les hollandais n’avaient rien, ils n’avaient rien. Ils mangeaient des tulipes.
J’ai beaucoup apprécié les hollandais parce qu’il y a deux ans en été, j’étais dans le parc aux Chutes du Niagara et j’entendais parler une langue et j’ai dit, est-ce qu’ils sont allemands ou hollandais ? Alors j’ai marché jusqu’à eux et j’ai dit, excusez-moi, est-ce que vous parlez en allemand ou en hollandais ? Elle dit – une fois que quelqu’un m’a répondu – Oui, nous parlons hollandais. Oh, et j’ai dit, bon, je suis un ancien combattant et j’ai dit, j’étais en Hollande pendant l’hiver. Oh mon Dieu, ils ont écarté ma femme et ils me tiraient et m’embrassaient. J’étais ébahi !