Article

Musicologie

IntroductionLa musicologie peut se définir comme la poursuite de la connaissance musicale et son approfondissement par des méthodes précises, objectives et critiques de recherche, d'analyse et d'interprétation.

Musicologie

Introduction
La musicologie peut se définir comme la poursuite de la connaissance musicale et son approfondissement par des méthodes précises, objectives et critiques de recherche, d'analyse et d'interprétation. Si l'érudition musicale a existé dans les cultures les plus évoluées du passé, les techniques et principes utilisés au XXe siècle n'ont été formulés qu'à la fin du XIXe siècle et sont restés sujets à un processus de raffinement et de transformation. La musicologie a été abordée principalement de deux façons : l'une historique (histoire de l'art musical de l'Occident) et l'autre systématique (étude des principes universels sous-jacents au vocabulaire de la musique - gammes, rythmes, mélodies, etc. - et de l'acoustique, l'esthétique, la psychologie, la sociologie et autres disciplines dans leurs rapports avec la musique). Certains praticiens n'acceptent plus cette division. Les paroles de Stanley Fogel au sujet des études universitaires de la littérature peuvent s'appliquer à la musique : « Ce que nous avons fini par accepter comme la division traditionnelle des départements d'anglais en périodes historiques, en grandes figures et en genres (poèmes, pièces, nouvelles), avec la profusion de professeurs spécialisés que cela suppose, ne constitue peut-être pas le cadre le plus approprié à l'étude d'un produit culturel tel que la littérature » (Books in Canada, vol. XX, mai 1991).

La musicologie a pour complément l'ethnomusicologie, habituellement définie comme l'étude de la musique folklorique et de l'art musical non occidental, mais de plus en plus considérée comme une approche anthropologique de la musique, peu importe le genre. Il est devenu fort difficile de déterminer où finit la musicologie, avec son approche traditionnellement « eurocentrique », et où commence l'ethnomusicologie, avec sa vue d'ensemble qui englobe tout. Sans doute qu'un jour la différenciation entres les deux champs n'aura plus aucun sens. Entre-temps, les domaines et méthodes d'investigation en musicologie ont commencé à se modifier, à fusionner ou à se fondre, alors que les savants cherchent à comprendre les changements qui se produisent dans le monde entier. Les modifications dans les structures sociales et politiques, les vastes migrations d'un continent à l'autre, les nouvelles technologies de la dissémination du savoir, le pouvoir de nivellement des techniques de commercialisation et en dernier lieu, mais non de moindre importance, l'évolution intrinsèque de la musique, toutes ces données ont estompé les frontières existantes ou en ont tracé de nouvelles entre la musique choisie et la musique indigène, les musiques occidentale et non occidentale, la musique propre à un pays et la musique internationale. Les terminologies mêmes sont en période de fluctuation. De plus en plus, la compréhension de la musique est fonction de la société dans son ensemble, des traditions culturelles, de la situation géographique, des technologies de dissémination, des intérêts commerciaux et des situations économiques.

Un grade ou un poste d'enseignant, bien qu'avantageux, n'est pas essentiel à l'accomplissement de travaux musicologiques, et de nombreux Canadiens dont la spécialité est l'interprétation ou la composition ont affiché une compétence de spécialiste dans l'interprétation et la révision de partitions à la notation désuète ou dans l'étude de systèmes tonals exotiques. Cependant, au Canada du moins, l'étiquette de musicologue est souvent accolée trop librement à des animateurs-commentateurs de la radio, des journalistes et d'autres vulgarisateurs, en fait à tout musicien ou mélomane particulièrement cultivé. Peut-être la marque du musicologue modèle est-elle la possession de techniques pour effectuer une recherche originale et la capacité de généraliser, c'est-à-dire de situer des observations et des faits distincts à l'intérieur d'ensembles de rapports et de dynamiques historiques plus vastes.

Le Canada comme sujet d'étude en musicologie

La naissance de l'érudition musicale. Même si l'étude en profondeur de la musique au Canada n'est entrée dans son stade de formation qu'au cours du troisième quart du XXe siècle, une grande partie des travaux réalisés antérieurement par des chroniqueurs, des journalistes et des historiens généraux méritent d'être reconnus. Leur importance repose sur le fait qu'ils renferment beaucoup de renseignements, souvent basés sur l'observation personnelle, lesquels seraient autrement perdus; leur faiblesse vient du manque d'accès à une documentation adéquate, de l'étroite perspective chronologique et géographique qui en résulte, et de la fréquente imprécision de la datation et de l'orthographe des noms.

Comme au Brésil et dans d'autres pays du Nouveau Monde, la curiosité musicale des premiers chroniqueurs européens au Canada - Marc Lescarbot et plusieurs missionnaires du XVIIe siècle - fut éveillée par la musique aucunement familière des indigènes plutôt que par la vie musicale des colons, si semblable à celle de douzaines de petites villes françaises ou anglaises. Par la suite, des visiteurs européens - le baron de Lahontan dans son ouvrage Nouveaux voyages dans l'Amérique septentrionale (éd. française, 1703), Pehr Kalm dans Travels in North America (éd. anglaise, 1770) ou le duc de La Rochefoucauld-Liancourt dans son Voyage dans les États-Unis d'Amérique, fait en 1795, 1796 et 1797 (Paris 1799) - consignèrent par écrit des impressions musicales inusitées, soit sur la musique amérindienne ou sur les chants des voyageurs.

Les premiers essais connus de documentation historique de la vie musicale, l'un en anglais et l'autre en français, remontent seulement à 1878 et à 1881-82 respectivement. Dans The Mail de Toronto, le 21 décembre 1878, un auteur anonyme écrivit : « Music in Toronto : reminiscences of the last half century », un document riche en faits et en détails. Dans le périodique L'Album musical de Montréal, Gustave Smith signa une série de 12 articles, « Du mouvement musical en Canada », où il se préoccupa de la qualité plutôt que des événements de la vie musicale dans les 25 années de son expérience canadienne. À la même époque parut l'exposé historique d'une société musicale, Historique de la Société musicale Sainte-Cécile de Québec (Québec 1881). Ces publications établirent un précédent et de nombreuses autres suivirent dans les 50 années subséquentes, parmi lesquelles « Music in Toronto, as it was in the days that are gone forever » de F.E. Dixon dans le Daily Mail and Empire (7 novembre 1896); la série des « Impressions musicales » de Mgr Henri Têtu dans l' Action sociale (13 mars 1915, etc.); « Musical chronicles of early times » de Herbert Kent dans le Victoria Daily Times (7, 14, 21, 28 décembre 1918); « Musique et musiciens à Québec » de Nazaire LeVasseur par tranches mensuelles dans La Musique (15 janvier 1919-22 décembre 1922). Cette dernière série est la plus importante, non seulement à cause de ses dimensions et de la richesse de sa documentation (puisée en grande partie dans les propres spicilèges et souvenirs de l'auteur), mais parce que, pour la première fois, un chroniqueur remontait à une époque bien antérieure à sa propre enfance. En dépit de nombreuses inexactitudes et lacunes et d'un mélange d'anecdotes et de faits, le récit de LeVasseur demeure un classique de l'historiographie de la musique canadienne.

L'extraordinaire croissance de la vie musicale autour des années 1900 suscita l'apparition d'une foule de comptes rendus qui reflètent tous la fierté des réalisations. Des publications distinctes, avec des comptes rendus de la vie musicale locale, des notables musicaux et des établissements furent A Souvenir of Musical Toronto de H.H. Godfrey (Toronto 1897, 1898-99), Musical Halifax 1903-4 de Hugo Talbot (Halifax 1904) et The Musical Red Book of Montreal de B.K. Sandwell (Montréal 1907). Sandwell, connu plus tard comme critique littéraire, donne un compte rendu détaillé de 13 saisons de concerts; son ouvrage contient également des esquisses biographiques de 94 musiciens, les devis d'orgues de plusieurs églises, et beaucoup d'autres renseignements. Même si une telle compilation se poursuivit jusqu'à un certain point dans le Montreal Music Year Book (Montréal 1931, 1932), le travail de Sandwell demeura un effort remarquable de documentation détaillée sur la vie musicale dans une localité canadienne jusqu'à la parution de documents compilés par David Sale (Toronto 1845-67), Dale McIntosh (Victoria, C.-B., 1850-99), Juliette Bourassa-Trépanier et Lucien Poirier (Québec, 1764-99).

Des aperçus publiés dans des livres de référence tentèrent au moins de traiter du Canada dans son entier. Basés généralement sur une information superficielle et manquant de perspective historique, ils varient en importance, allant de « Musical progress in Canada », essai de 4 pages de F.H. Torrington dans Canada, an Encyclopedia of the Country (Toronto 1898-1900, J. Castell Hopkins, dir.), et de « Canada », article de 23 pages de Susie (Mme J.W.F.) Harrison dans The Imperial History and Encyclopedia of Music (New York, Toronto 1909), aux 5 chapitres de « A review of music in Canada » d'Edouard Hesselberg dans l'édition internationale de Modern Music and Musicians (New York, Toronto 1913) et aux 11 chapitres, signés de 9 auteurs différents, dans The Year Book of Canadian Art (Londres, Toronto 1913).

Toute cette documentation fut écrite en anglais. Au Canada français, cependant, plusieurs historiens et archivistes commencèrent à fouiller la littérature et les documents des XVIIe et XVIIIe siècles afin d'y trouver des renseignements sur la vie musicale. Il est à remarquer qu'on faisait peu de distinction entre la musique vernaculaire et la musique cultivée - plus en accord avec l'approche américaine de l'histoire de la musique qu'avec celle des historiens canadiens d'une époque ultérieure. Ces recherches menèrent notamment à la parution de Noëls anciens de la Nouvelle-France d'Ernest Myrand (Québec 1899, 1907, Montréal 1913, 1926), aux références à la musique dans Louis Jolliet d'Ernest Gagnon (Québec 1902, 1913, 1926, 1946), « La Musique à Québec au temps de Mgr Laval » de Gagnon dans La Nouvelle-France (mai 1908), « Les Organistes et maîtres de musique à Notre-Dame de Montréal » d'Ovide Lapalice dans BRH (vol. XXV, août 1919) et « La Musique militaire sous le régime français » d'É.-Z. Massicotte dans BRH (vol. XXXIX, juillet 1933). Le Bulletin des recherches historiques (Lévis, Québec 1895-1956) présenta aussi de brèves contributions sur la musique par Massicotte, J.-Edmond et Pierre-Georges Roy, Benjamin Sulte et d'autres historiens.

La première personne connue pour avoir entrepris la rédaction d'une histoire de la musique au Canada fut John Daniel Logan, journaliste et professeur d'anglais (Antigonish, N.-É., 1869 - Milwaukee, Wisc., 1929). Aucune trace n'en a été retrouvée cependant, bien que Logan ait publié des articles de valeur sur Calixa Lavallée (« Canada's first creative composer », Canadian Courier, vol. II, 27 janvier 1912), sur la composition musicale au Canada (« Musical composition in Canada », The Year Book of Canadian Art) et des sujets connexes.

Le deuxième quart du XXe siècle présente peu de signes d'une conscience grandissante quant au passé musical du Canada. Néanmoins, trois biographies furent publiées qui suscitèrent la fierté envers les gloires du passé : Calixa Lavallée d' Eugène Lapierre (Montréal 1936, 1950, 1966), L'Albani d'Hélène Charbonneau (Montréal 1938) et La Palme-Issaurel de Romain Gour (Montréal 1948). Le niveau d'érudition de ces ouvrages est inégal; Lapierre, par exemple, négligea de consulter toute la documentation biographique à la source et ne fit pas l'étude d'oeuvres publiées aux États-Unis qu'il aurait été facile de trouver.

Des thèses sur des sujets canadiens commencèrent à être écrites dans les années 1930. J.-R. Pelletier écrivit un « Aperçu historique sur le chant liturgique de l'église, en Europe et dans la province ecclésiastique de Québec » (D.Mus., Laval, 1932), et Thomas C. Chattoe soumit « Music in Canada » en vue de l'obtention d'un B.Mus. (Birmingham, 1931). Dans la décennie suivante, le frère Pierre-Alphonse traita de « Chant et musique sacrée dans la Nouvelle-France » (M.A., Ottawa, 1948) et Kathleen M. Hobday compila un Survey of the Musical Resources of the Province of Ontario (M.A., Toronto, 1946; Toronto 1946), un travail comparable à celui de Sandwell par l'ampleur de la recherche. À la même époque, Antonine Bernier de Montréal esquissa la structure des chapitres d'une histoire de la musique au Canada (quatre volumes devant être consacrés à Québec, Montréal, Ottawa et Toronto, chaque volume étant divisé en sections « musique profane » et « musique religieuse »; une copie se trouve dans les documents de Marius Barbeau) mais le projet ne fut jamais réalisé. La première vue d'ensemble se trouve dans « The Rise of music in Canada », thèse de Marcelle Rousseau (M.A., Columbia, 1951).

Vues d'ensemble. Helmut Kallmann poursuivait le même objectif lorsqu'il commença en 1948 à recueillir des données sur l'histoire musicale du Canada. Il examina et compara les travaux mentionnés précédemment et entreprit de scruter les ouvrages de référence, périodiques, histoires locales, récits de voyage et sources de première main quand elles étaient disponibles, extrayant des faits et des passages pertinents qu'il classa par ordre alphabétique tout comme l'a fait l' EMC. Comme premiers résultats de la recherche de Kallmann figurent deux aperçus historiques de la musique au Canada : le chapitre « Historical background » dans Music in Canada (1955) et l'article « Kanada » dans MGG (1958). Son oeuvre principale fut cependant la rédaction, commencée en 1950, de A History of Music in Canada 1534-1914 (1960). Pour la première fois, un ouvrage rassemblait, à partir de sources disséminées et souvent obscures, des faits et des citations propres à donner une vue d'ensemble de la transplantation de la musique européenne et de son développement dans la colonie. Le manque de sources disponibles pour les années 1950 - nombre de compositions publiées et manuscrites, périodiques sur la musique, programmes de concerts, correspondance de musiciens, etc. ne furent mis à jour que dans les années 1970 - contraignit l'auteur à mettre l'accent sur la « vie » musicale plutôt que sur la « créativité ». Il y a aussi une absence de référence quant à l'évolution contemporaine des autres arts. Néanmoins, en montrant la diversité et le passé de l'entreprise musicale au Canada, en identifiant certains des moteurs de son développement et en édifiant la charpente de son évolution chronologique, le livre constitue un travail de pionnier. Kallmann et d'autres continuèrent à étudier plus en détail certains aspects, périodes, biographies. Andrée Desautels a signé un aperçu de l'histoire de la musique canadienne, « Les Trois âges de la musique au Canada », dans La Musique (vol. II, Paris 1965; les trois âges sont le Régime français [XVIIe siècle et le XVIIIe jusqu'en 1760], la période coloniale britannique [1763-1918] et la période moderne). « The Development of music in Canada » de Gordon Howell (Ph.D., Rochester, 1959) allie à un survol historique une étude sur la musique contemporaine. Canada's Music : An Historical Survey de Clifford Ford (Agincourt, Ont. 1982) aborde le sujet de façon similaire à Kallmann jusque dans les années 1970, et The Music of Canada de Timothy J. McGee (New York 1985), préparé à l'intention des collèges, donne un aperçu plus succinct. Canadian Music of the Twentieth Century de George Proctor (Toronto 1980) fourmille de renseignements et Music Education in Canada : A Historical Account de J. Paul Green et Nancy Vogan (Toronto 1991) s'attache aux moindres détails. La recherche la plus poussée à avoir été menée pour une époque particulière fut celle de Willy Amtmann sur la musique pendant le régime français. Écrit à l'origine comme thèse de doctorat, son texte « La Vie musicale en Nouvelle-France » (Strasbourg, 1956) fut augmenté par la suite pour devenir Music in Canada 1600-1800 (1975) et encore davantage pour sa version française, La Musique au Québec 1600-1875 (1976). En réalité, les deux volumes se limitent essentiellement à l'histoire de la province de Québec. Amtmann a utilisé d'impressionnantes techniques de documentation, d'authentification et de comparaison qu'il appliqua à certains événements significatifs comme la composition de la prose « Sacrae familiae felix spectaculum » attribuée à Charles-Amador Martin ou l'installation des premiers orgues au Québec. Il travailla particulièrement à élucider la terminologie musicale du XVIIe siècle, il parvint à corriger plusieurs erreurs et remit en question des hypothèses avancées par des auteurs antérieurs et moins rigoureux. Amtmann ne put cependant aller plus loin dans la nomenclature d'événements musicaux entièrement vérifiables qui auraient pris place au Canada au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. Il fut lui aussi contraint d'émettre des hypothèses, cependant plus fondées que les précédentes. Erich Schwandt, Élisabeth Gallat-Morin et d'autres chercheurs ont finalement réussi dans les années 1980 à trouver des manuscrits de musique et à les examiner, fournissant amplement la preuve d'une culture musicale intensive en Nouvelle-France, du moins en quelques endroits à certains moments

La recherche musicologique sur l'histoire canadienne, en dépit du handicap créé par le manque de documentation disponible, déboucha sur des résultats pratiques au cours des années 1960 avec la reprise de compositions des XVIIIe et XIXe siècles (dont Colas et Colinette de Quesnel, par les Ten Centuries Concerts, et TheWidow de Lavallée, par la SRC). Elle suscita également la mise sur pied de certains des premiers cours universitaires de musique canadienne (ou nord-américaine), notamment ceux de l'Université de Calgary (Johnston), de l'Université Carleton (Amtmann), de l'Université de Montréal (Kendergi, Richer), de l'Université de la Saskatchewan (Adaskin) et de l'Université de Toronto (Beckwith, Morey).

La pénurie d'études musicologiques - relatives à la fois à l'histoire et à la composition contemporaine - se fit vivement ressentir lorsque, au début des années 1970, les directeurs de l' EMC commencèrent à planifier leur ouvrage. Alors que les encyclopédies internationales de musique recueillent habituellement le fruit des travaux déjà menés par des spécialistes, l' EMC, dans sa première édition, dut essentiellement engendrer une activité musicologique. Si beaucoup d'articles de l' EMC furent écrits par des experts reconnus, la majorité des textes furent rédigés par des chercheurs qui devinrent des spécialistes par la préparation d'un article ou d'une série d'articles. Un outil de base pour la recherche musicologique dans les domaines des sujets canadiens fut aussi créé dans les années 1970 avec l'établissement d'une Division de la musique à la Bibliothèque nationale du Canada en 1970 et le développement d'une collection de musique à la BN du Q après 1968. Les articles Archives et Bibliothèques donnent des détails sur les fonds de ces dernières et d'autres collections de canadiana, historiques et générales. La Bibliothèque nationale du Canada, en particulier, est devenue un centre de documentation et de consultation pour la recherche historique et bibliographique sur la musique au Canada, tout comme le Centre de musique canadienne pour l'étude de la composition au XXe siècle. Sans ces ressources, un certain nombre de projets de canadiana n'auraient guère pu se réaliser dans les années 1980. L'Assn pour l'avancement de la recherche en musique du Québec (ARMuQ), fondée en 1980, a organisé des conférences et mis sur pied des projets de recherche, et ses Cahiers ont servi à faire connaître les résultats de la recherche sur l'histoire de la musique au Québec. La Société pour le patrimoine musical canadien (SPMC), formée en 1982, a produit une série d'anthologies des compositions canadiennes jusqu'au milieu du XXe siècle, alors que l'Institute for Canadian Music, établi à l'Université de Toronto en 1984 sous la direction de John Beckwith (1984-91), a organisé plusieurs colloques et en a publié les comptes rendus. Beckwith, en homme qui sait tirer parti de la recherche de façon créative, occupe une place centrale dans le domaine, surtout en raison de son habileté à adapter la musique de l'époque pionnière à la composition du XXe siècle. Citons en exemple ses arrangements et recompositions pour Music at Sharon ainsi que sa reconstitution de Lucas et Cécile de Quesnel, qui toutes éclairent le présent par l'intermédiaire du passé, aidant ainsi à créer une tradition canadienne.

La compilation qui suit tente de démontrer l'étendue des études savantes sur la musique canadienne réalisées entre la Deuxième Guerre mondiale et 1990. Les thèses et publications mentionnées précédemment dans cet article ne sont pas reprises, pas plus que les articles spécialement rédigés pour l' EMC. Il faut noter que la plus grande partie du travail consiste en thèses pour l'obtention de grades; une certaine partie est aussi l'oeuvre de journalistes-chercheurs et d'archivistes, avec l'apport toujours plus grand d'universitaires dans les années 1980.

Histoire régionale. Dans ce domaine, un important travail fut fait au début par des archivistes. Phyllis Blakeley écrivit sur la vie musicale à Halifax et en Nouvelle-Écosse; J. Russell Harper prépara un manuscrit, « Spring Tide : an enquiry into the lives, labours, loves and manners of early New Brunswickers » (v. 1954), alors qu'il était au musée du Nouveau-Brunswick à Saint-Jean; Dorothy Blakey Smith rédigea « Music in the furthest west a hundred years ago » (CMJ, vol. II, été 1958). À chaque extrémité du pays, deux chercheurs passionnés produisirent chacun une documentation minutieuse sur leur province : Dale McIntosh dans A Documentary History of Music in Victoria, British Columbia : Volume I 1850-1899 (Victoria, C.-B. 1981) et History of Music in British Columbia 1850-1950 (Victoria, C.-B. 1989); Paul Woodford dans ses livres sur Charles Hutton et Ignatius Rumboldt et dans sa collection non publiée de données, de partitions et d'illustrations liées à la musique de Terre-Neuve.

On compte des mémoires et thèses, notamment, de Norman John Kennedy sur la vie musicale à Calgary de 1875 à 1920 (M.A., Alberta, 1952); David Sale sur les concerts à Toronto de 1845 à 1867, avec une précieuse compilation de tous les programmes connus (M.A., Toronto, 1968); William Lock sur les choeurs d'église et sociétés chorales de l'Ontario de 1819 à 1918 (D.M.A., Californie du Sud, 1972); France Malouin sur la vie musicale à Québec de 1840 à 1845 à travers les journaux et revues de l'époque (M.Mus., Montréal, 1975); Peter Slemon sur Montréal dans les années 1841-67 (M.M.A., McGill, 1976).

Des recherches régionales effectuées par des professeurs d'université, on note celles de William Bartlett sur l'Île-du-Prince-Édouard, Juliette Bourassa-Trépanier sur la ville de Québec, Frederick Hall sur des villes de l'Ouest de l'Ontario, Elaine Keillor sur l'Ontario autour des années 1900 et Carl Morey sur Toronto.

Cinquante ans de vie musicale à Trois-Rivières de J.-Antonio Thompson fut publiée dans cette ville en 1970 et une chronique de Norman Draper sur les harmonies et la musique pour harmonie à Calgary parut en 1975. Vivianne Émond a fait un examen critique du compte rendu de LeVasseur sur la musique à Québec (M.Mus., Laval, 1986) et Marie-Thérèse Lefebvre a écrit sur les femmes musiciennes (surtout compositrices) du Québec (La Création musicale des femmes au Québec, Montréal 1991).

Composition. Des mémoires et thèses portant sur des formes spécifiques de composition ou sur des groupes de compositeurs, on remarque les écrits de : Stephanie Owen (Ph.D., Washington, 1969) et Ireneus Zuk (D.M.A., Johns Hopkins, 1985), tous deux traitant des concertos pour piano; Mary Beaulieu (M.Mus., Indiana, 1970), sur la musique de clavier; William Lister (D.M.A., Boston, 1970), sur les sonates pour violon; Isabelle Mills (D.Éd., Columbia, 1971), sur la musique appropriée à des programmes d'écoute; Lee Hepner (Ph.D., New York, 1972), sur la musique orchestrale; et Norman Chapman (Ph.D., Case Western Reserve, 1973), sur la musique pour piano. Robert Skelton (D.Mus., Indiana, 1976), Horace Pitman McNeal (Ph.D. État de l'Ohio, 1979) et Robin Elliott (Ph.D., Toronto, 1990) ont écrit sur les quatuors à cordes canadiens; Timothy Maloney (D.M.A., Rochester, 1986) a étudié la musique pour ensemble à vent au Canada. Lyse Richer a fait des études comparées de la musique à Montréal et à Toronto, et George Proctor a rédigé l'étude détaillée de la composition mentionnée plus haut.

On trouvera ci-après une liste de quelques études sur des compositeurs individuels ou sur certaines de leurs oeuvres. Une liste d'ouvrages paraît également à l'article Biographie.

W.H. Anderson : Patricia Doyle (M.Mus., Western Ontario, 1977)

Violet Archer : Harvey Don Huiner (Ph.D., Iowa, 1980) et Martha Massey (M.Mus., Potsdam, N.Y., 1983)

Gena Branscombe : Laurine Elkins Marlow (Ph.D., Texas, 1980)

Claude Champagne : Marie-Paule Provost (M.A., Montréal, 1970), Louise Bail-Milot (M.Mus., Sorbonne, 1972) et Anne Walsh (Ph.D., Catholic, 1972)

Jean Coulthard : Vivienne Rowley (D.M.A., Boston, 1973)

Guillaume Couture : Pierre Quenneville (M.A., Montréal, 1980; Ph.D., ibid., 1988)

S.C. Eckhardt-Gramatté : Elaine Smith (M.Mus., Western Ontario, 1978), Glen B. Carruthers (M.A., Carleton, 1981) et Mark A. Rodgers (M.Mus., Western Ontario, 1987)

Robert Fleming : Hubert Tersteeg (M.Mus., Western Ontario, 1978), William Godsalve (M.A., Saskatchewan, 1981) et Christine DeWit Keitges (D.M.A., Arizona State, 1988)

Harry Freedman : Kenneth Hugh Nichols (Ph.D., Minnesota, 1981)

Ernest Gagnon : Gordon E. Smith (Ph.D., Toronto, 1989)

Serge Garant : Marie-Thérèse Lefebvre (Ph.D., Montréal, 1981)

Srul Irving Glick : George E. Evelyn fils (D.M.A., North Texas State, 1981)

Jacques Hétu : Roger Martin Knox (Ph.D., Rochester, 1988)

Bruce Mather : Albert Grenier (L.Mus., Montréal, 1971) et Martin J. Waltz (M.Mus., Western Ontario, 1977)

Rodolphe Mathieu : Juliette Bourassa-Trépanier (D.Mus., Laval, 1972)

Colin McPhee : Richard Elmer Mueller (Ph.D., Chicago, 1983) et Carol J. Oja (Ph.D., City Université de New York, 1985)

John Medley : Timothy Gene Cooper (D.M.A., Georgia, 1989)

Léo-Pol Morin : Claire Villeneuve (M.Mus., Montréal, 1975)

Jean Papineau-Couture : Roch Poulin (M.A., Montréal, 1961) et Clotilde Denis (L.Mus., Montréal, 1972)

Barbara Pentland : Sheila Eastman (M.Mus., Colombie-Britannique, 1974)

Clermont Pépin : John William Schuster-Craig (Ph.D., Kentucky, 1987) et Alan Freedman (M.A., San Diego State, 1988)

Godfrey Ridout : Wayne Gilpin (M.Mus., Alberta, 1978)

R. Murray Schafer : Kaye Frances Pottie (M.Mus., Western Ontario, 1980), Linda A. Beaupre (M.Mus., Western Ontario, 1984), Susan Bradley (M.Mus., Alberta, 1983) et Kirk MacKenzie (M.Mus., Cincinnati, 1988; Ph.D., ibid., 1991)

Harry Somers : David Duke (M.A., Caroline du Nord, 1973), Frances Smith (M.Mus., Western Ontario, 1973), Edward Gregory Butler (D.M.A., Rochester, 1974), Diane Houghton (D.M.A., Missouri, 1980) et Leonard J. Enns (Ph.D., Northwestern, 1982)

James Tenney : Brian Belet (D.M.A., Illinois, 1990)

John Weinzweig : Norman B. Chapman (Ph.D., Case Western Reserve, 1972), Malcolm Hines (M.Mus., Western Ontario, 1975) et Douglas Webb (Ph.D., Rochester, 1977)

Healy Willan : Alan Lehl (M.A., ESM, Rochester, 1957), Jacob Wagner (M.Mus. sacrée, Union Theological Seminary, 1957), Robert Massingham (M.Mus., North Texas State, 1967), Frederick Telschow (Ph.D., Rochester, 1969), William Marwick (Ph.D., Michigan State, 1970), Joylin Campbell-Yukl (Ph.D., Missouri, 1976), Edward Wagner (Master of Divinity, Yale, 1978), Keith Hamlin (Master of Theology, Trinity College, Toronto, 1979), Norman Johnson (D.M.A., Southern Baptist Theological Seminary, 1979) et William Renwick (D.M.A., Colombie-Britannique, 1982)

Interprètes. En plus de recherches biographiques sur des compositeurs et de livres biographiques (voir Biographies), des mémoires et thèses ont été préparés par Nadia Turbide sur C.A.E. Harriss (M.M.A., McGill, 1976) et sur Éva Gauthier (Ph.D., Montréal, 1986), par Jacques-André Houle sur Frantz Jehin-Prume (premier prix, CMM, 1979) et par Cécile Huot sur Wilfrid Pelletier (thèse de doctorat, Toulouse, 1973). Un certain nombre de mémoires et thèses ont été rédigés, ou étaient en préparation en 1991, sur Glenn Gould, qui devint le musicien canadien faisant l'objet du plus grand nombre d'écrits dans la décennie suivant son décès. J.B. McPherson et Ruby Mercer ont écrit sur des chanteurs canadiens, et Gilles Potvin a effectué des recherches sur Emma Albani et Éva Gauthier.

Autres sujets. L'éducation musicale constitue de loin le sujet canadien le plus fréquent des mémoires et thèses. Une sélection de telles écrits est donnée dans les bibliographies de l'article Musique à l'école et de la monographie de J. Paul Green et Nancy F. Vogan Music Education in Canada (Toronto 1991), une étude détaillée de ce domaine. Plusieurs mémoires et thèses ont également été écrits sur la musique religieuse. Parmi les autres sujets se trouvent l'édition musicale avant la Confédération (Maria Calderisi, M.M.A., McGill, 1976, publiée en 1981), la culture musicale ukrainienne au Canada (Philip Bassa, M.A., Montréal, 1955) et le statut socioéconomique des compositeurs canadiens (Marie Vachon, M.A., Carleton, 1975).

La facture d'orgues a été étudiée par Antoine Bouchard de l'Université Laval et John S. McIntosh de l'Université de Western Ontario; l'histoire de l'orgue à Québec jusqu'en 1837, par Carole Grégoire (M.Mus., Laval, 1990). En 1979, Laurent Lapointe publia une histoire détaillée des 100 premières années d'existence des facteurs d'orgues Casavant du Québec, Casavant Frères 1879-1979 (Saint-Hyacinthe 1979). Norma MacSween étudia l'histoire de la guitare classique au Canada (M.A., Carleton, 1990). Edward B. Moogk s'intéressa à l'histoire de l'enregistrement sonore pendant toute sa vie. Thelma Reid Lower de Vancouver a beaucoup écrit sur les sociétés chorales. Dorith Cooper a réalisé une étude exhaustive sur l'opéra à Montréal et à Toronto (Ph.D., Toronto, 1983) et Dorothy Farquharson a fait des recherches sur les écoles de chant (O, for a Thousand Tongues to Sing, Waterdown, Ont. 1983). Mark Miller a effectué des études et écrit sur l'histoire du jazz au Canada. Patricia Wardrop et Helmut Kallmann ont préparé une documentation détaillée sur « Ô Canada » pour la Bibliothèque nationale du Canada en 1982. D'autres sujets traités par des spécialistes sont mentionnés dans les articles Bibliographie, Discographie, Hymnes et Jazz. Pour une liste des articles de l' EMC sur la musique religieuse, voir Religions et musique.

Enseignement et recherche dans des domaines autres que canadiens

Les débuts. L'introduction au Canada de la musicologie à l'université ne remonte qu'à 1954, lorsque l'Université de Toronto confia à Harvey J. Olnick, diplômé de l'Université Columbia, le soin d'organiser et de donner un cours menant au grade de M.Mus. Olnick devint le premier dir. du dépt d'histoire et de littérature créé en 1968. Avant sa nomination, l'histoire de la musique était un parent pauvre de l'enseignement universitaire, confiée plus souvent qu'autrement à un non-spécialiste. Aussi tard que dans les années 1940, les mêmes cours d'histoire furent donnés aux étudiants de premier cycle de l'Université de Toronto et aux étudiants adolescents du RCMT. Le but principal de l'étude de l'histoire de la musique, selon certains des vieux professeurs formés en Angleterre, était de pouvoir tenir une conversation intelligente sur la musique ou d'écrire des feuilletons. Une tournure de phrase élégante comptait davantage que l'examen des faits. L'érudition ne devait pas être une fin en soi et la « musicologie » évoquait une science teutonique suspecte.

Il fallut au moins 10 ans après l'arrivée d'Olnick pour que les professeurs se voient accorder l'encouragement ou le temps pour entreprendre des recherches musicales. Néanmoins, l'accent sur l'enseignement de l'histoire et de la littérature et sur la formation en méthodes de recherche progressa rapidement dans les années 1960 et 1970. En 1980, la plupart des départements de musique universitaires offraient des cours de musicologie par des spécialistes.

Le Canada a eu, bien entendu, des musicologues avant 1954, mais ces derniers oeuvrèrent rarement dans leur propre domaine. Le premier fut Gustav Schilling (Allemagne, 1805 - Nebraska, 1880), auteur ou dir. d'édition d'au moins 21 livres sur la musique, dont une Encyclopädie en 6 volumes. Ayant quitté l'Allemagne en 1857, il tenta vainement de fonder un conservatoire à New York, puis à Montréal, où il demeura environ 10 ans comme professeur privé et membre de sociétés musicales. Même si Schilling fut blâmé par Robert Schumann puis par d'autres auteurs allemands pour le caractère superficiel et le charlatanisme de ses écrits, il fut salué par Warren Dwight Allen dans Philosophies of Music History (New York 1939) comme l'un des premiers à avoir relié l'histoire de la musique à l'environnement sociopolitique et à l'évolution des idées. Ce premier musicologue bona fide ne laissa dans ce domaine aucune contribution connue datant de ses années à Montréal.

L'Europe centrale demeura le foyer de la musicologie durant plusieurs générations. De nombreux musicologues se fixèrent aux États-Unis par suite du régime hitlérien (Willi Apel, Manfred Bukofzer, Alfred Einstein, Curt Sachs et beaucoup d'autres), et quelques-uns seulement s'établirent au Canada. Ida Halpern et Ulrich Leupold, respectivement de Vienne et de Berlin, arrivèrent au Canada en 1939. Ils étaient les premiers à détenir un grade de Ph.D. en musicologie au pays. Les principales recherches de Halpern furent en ethnomusicologie. Spécialiste de la musique religieuse luthérienne, Leupold ne s'occupa de musicologie que de façon marginale au Canada. Il en fut de même pour Arnold Walter et Walter Kaufmann, dont les principales énergies furent vouées respectivement à l'administration et à la direction d'orchestre. Deux autres musiciens de Vienne et de Berlin, Willy Amtmann et Helmut Kallmann, arrivés en 1940, s'intéressaient à la musicologie, mais ce ne fut qu'une fois au Canada qu'ils purent concrétiser cet intérêt. Ils devinrent les auteurs des premiers livres consacrés à l'histoire de la musique canadienne.

Parmi les premiers musicologues nés au Canada figurent Robert Talbot, spécialiste des matières théoriques qui, au début des années 1930, était le seul membre canadien de la Société internationale de musicologie, et Alfred Bernier, dont la spécialité fut la musique liturgique. Tous deux détenaient un grade de D.Mus. de Laval ou de Montréal, et firent carrière comme professeurs à ces universités. D'autres musicologues canadiens de la « première génération » furent notamment Marvin Duchow de Montréal, Michael Winesanker (voir États-Unis), Giveon Cornfield (voir Canada Baroque Records) et Andrée Desautels. (Desautels fut probablement la première spécialiste de l'enseignement de l'histoire de la musique née au Canada, sujet qu'elle enseigna au CMM à partir de 1949.) Comme plusieurs musicologues nés au Canada une génération plus tard, ces derniers reçurent une partie essentielle de leur formation aux États-Unis ou dans un autre pays.

La musicologie s'est implantée au Canada au-delà de toute espérance. Les contributions sur la scène nationale et internationale ont été remarquables. Au début, les praticiens venaient fréquemment des États-Unis, et parfois de la Grande-Bretagne et de la France, mais avec les années les spécialistes canadiens sont devenus plus nombreux et mieux qualifiés. En 1990, quelque 150 universitaires détenaient un diplôme en musicologie, et beaucoup d'entre eux enseignaient aussi la composition, l'interprétation ou les matières théoriques.

Il n'entre pas dans le cadre de cet article de traiter en détail des sujets de recherche ou des réalisations de chaque musicologue; il n'y a qu'à consulter les articles qui leur sont consacrés pour trouver cette information. Des relevés de l'activité musicologique et de la participation aux colloques et organismes canadiens ou internationaux ont été dressés pour Acta Musicologica, par Rika Maniates pour la période 1963-79 et par Zoltan Roman pour la période 1980-87 (voir BIBLIOGRAPHIE). Cependant, l'un et l'autre sont axés sur des sujets non canadiens, et Roman laisse de côté bien des spécialistes qui n'ont pas répondu à son questionnaire.

Le sommaire suivant des concentrations musicologiques d'érudits vivants ou décédés est présenté selon les principales périodes de l'histoire européenne, et comprend le relevé des spécialités étudiées. Il inclut des scientifiques nés au Canada et des immigrants, mais vu le manque de moyens pour évaluer chaque contribution avec précision, le choix s'est porté sur ceux qui ont contribué dans plus qu'un des secteurs suivants : dissertation, enseignement, écrits publiés et édition. S'il y a lieu, l'université ou une autre institution (pas forcément la dernière en date) et la principale spécialité sont indiqués. Il est important de tenir pour acquis que des individus ont pu aborder tout aussi bien d'autres périodes ou d'autres sujets.

Moyen Âge et Renaissance

Gaston Allaire (Moncton; théorie, Claudin de Sermisy)

Terence Bailey (Colombie-Britannique, Western Ontario; plain-chant)

Bruce Bellingham (Connecticut; Renaissance, Georg Rau)

Yves Chartier (Ottawa; théorie IXe-XVe siècles, esthétique)

Dimitri Conomos (Colombie-Britannique; chant byzantin)

Eugene Cramer (Calgary; Renaissance polonaise)

Robert Falck (Toronto; XIIIe siècle, conduit)

Jean Gagné (Ensemble Claude-Gervaise; histoire de l'interprétation)

Bryan Gillingham (Carleton; édition, Institute for Medieval Music)

Gordon Greene (Wilfrid Laurier; musique profane française du XIVe siècle)

Paul Helmer (McGill; chant liturgique occidental)

Andrew Hughes (Toronto; musique liturgique médiévale)

T. Herman Keahey (Manitoba; Pierre de la Rue)

Walter Kemp (Dalhousie; musique anglaise médiévale de la dernière période, histoire de l'orgue au Canada)

H. Bruce Lobaugh (Regina; fin du XVIe siècle)

Rika Maniates (Toronto; Renaissance, esthétique)

Christine Mather (Victoria, Wilfrid Laurier; Heinrich Isaac)

Timothy McGee (Toronto; histoire de l'interprétation)

Paul Merkley (Ottawa; Moyen Âge, XXe siècle)

Neil K. Moran (chant byzantin)

Jay Rahn (York; théorie)

H. Colin Slim (Californie; Renaissance)

Dujka Smoje (Montréal; Moyen Âge)

XVII e et XVIII e siècles

Anne Baker (Lully)

Elizabeth Bartlet (Duke; opéra italien du XVIIIe siècle)

Irène Brisson (CMQ; musique à Versailles sous Louis XIV, musique au Québec)

Gregory G. Butler (Colombie-Britannique; Bach)

Glen Carruthers (Lakehead; interprétation de Bach)

Victor Coelho (Calgary; Italie, tablature de luth)

Donald Cook (Memorial; musique de théâtre de style baroque anglais)

Mary Cyr (McGill; opéra français et Rameau)

Marvin Duchow (McGill; fin du XVIIIe siècle, Encyclopédistes)

Élisabeth Gallat-Morin (Montréal; musique ancienne pour clavier)

Sharyn Lea Hall (McMaster; opéra du XVIIIe siècle)

Michelle Fillion (Haydn, C.P.E. Bach)

Kenneth Gilbert (musique pour clavier)

Delores Keahey (Manitoba; J.C. Bach)

Warren Kirkendale (Duke; musique de chambre du XVIIIe siècle)

Gordana Lazarevich (Victoria; théâtre musical italien)

Ulrich Leupold (Wilfrid Laurier; musique luthérienne)

Sandra Mangsen (Western Ontario)

Paul Marshall (édition musicale pour flûte, Hotteterre)

John Mayo (Toronto; Haendel)

Hugh McLean (Western Ontario; édition, notamment J.L. Krebs, C.P.E. Bach)

Carl Morey (Toronto; opéra)

Jaroslav Mrácek (Californie du Sud; musique instrumentale du XVIIe siècle et musique tchèque)

Donald Neville (Western Ontario; Mozart)

Harvey Olnick (Toronto; Baroque italien)

Mary Ann Parker (Toronto; Haendel)

Lucien Poirier (Laval; musique baroque pour clavier)

Paul Rice (Memorial)

Rudolf Schnitzler (Queen's; oratorio baroque)

David P. Schroeder (Dalhousie; Haydn, Schubert)

Richard Semmens (Western Ontario; Baroque français, musique pour bois)

Ernest White (édition de musique ancienne pour orgue)

XIXe siècle

Marion Barnum (Iowa State; J.N. Hummel)

H. Robert Cohen (Laval, Colombie-Britannique, plus tard aux États-Unis; Berlioz, presse musicale française)

James Deaville (McMaster; Liszt)

Philip Downs (Western Ontario; musique orchestrale)

Steven Huebner (McGill; Gounod)

Gaynor Jones (Toronto; Weber)

William Kinderman (Victoria; Beethoven, Wagner)

Donald McCorkle (Colombie-Britannique; Brahms)

Margit McCorkle (Colombie-Britannique; Brahms)

Sabrina Ratner (Saint-Saëns)

Zoltan Roman (Calgary; Mahler)

R. Murray Schafer (E.T.A. Hoffmann)

James Stark (Toronto; première période du Baroque, Beethoven et Schubert)

Alan Walker (McMaster; Chopin, Liszt, Schumann)

Stephen C. Willis (Bibliothèque nationale du Canada; Cherubini)

XXe siècle

Kathryn Bailey (Western Ontario; dodécaphonisme)

William Benjamin (Colombie-Britannique; Schoenberg, Stravinsky, Webern)

Austin Clarkson (York; Varèse, Wolpe)

Louis Cyr (Stravinsky)

Tom Gordon (Bishop's; Stravinsky)

Kenneth Hicken (Lethbridge; Schoenberg)

Louise Hirbour (Montréal; Varèse)

Lothar Klein (Toronto; Stravinsky)

Nicole Labelle (Ottawa; musique française 1870-1945, en particulier Albert Roussel)

Alan Lessem (York; Schoenberg, musique des É.-U.)

Wilbur Maust (Waterloo; musique des É.-U.)

Marc-André Roberge (Laval; Busoni)

R. Murray Schafer (Ezra Pound et la musique, écologie acoustique)

Howard Spring (Guelph; musique des É.-U.)

William Westcott (York; musique des É.-U.)

Gerhard Wuensch (Toronto; Max Reger)

Autres sujets. Les années 1980 furent marquées d'une dispersion de l'intérêt des universitaires dans plusieurs directions, dont les études en musique canadienne, en musique du XXe siècle, en jazz et en culture populaire (ces dernières généralement de nature interdisciplinaire). Ainsi l'Université Trent, bien que sans dépt de musique, entretient un institut pour l'étude de la culture populaire, et en 1983 se tenait dans ses murs un colloque sur la sociologie de la musique. L'Université Brock garde des archives de musique populaire. L'Université Carleton a ouvert une école pour l'études des arts et de la culture dont le dir., John Shepherd, fut cadre supérieur de l'Assn internationale pour l'étude de la musique populaire. L'édition de musique ancienne a occupé nombre de chercheurs canadiens. Un rassemblement international appelé « Conference in Editorial Problems » a tenu sa 26e réunion annuelle (la première sur la musique) à Toronto en 1990.

István Anhalt (Queen's; traitement de la voix en musique moderne)

Sterling Beckwith (York; applications de l'informatique à la composition et à l'éducation)

Yves Chartier (Ottawa; applications de l'informatique à la musicologie)

Graham George (Queen's; tonalité)

Bryan N.S. Gooch (Victoria; textes littéraires et musique)

Keith Hamel (Colombie-Britannique; informatique et musique)

Kenneth Hull (Waterloo; esthétique)

Jean-Jacques Nattiez (Montréal; sémiologie de la musique)

Geoffrey Payzant (Toronto; esthétique, perception)

Jean-Pierre Pinson (Laval; rhétorique et musique)

Paul Pedersen (Toronto; psychologie)

Percival Price (Michigan; campanologie)

John Shepherd (Carleton; la musique comme phénomène social)

Rita Steblin (caractéristiques des tonalités, iconographie)

Alan Walker (McMaster; critique)

Philip Young (Victoria; organologie)

Voir aussi Acoustique - Recherche au Canada, Bibliographie, La Critique, Éducation musicale - Recherche, Ethnomusicologie, Jazz, Psychologie de la musique, Religions et musique, Sociologie de la musique, Théorie et analyse.

Découvertes. La plupart des auteurs ci-haut mentionnés ont publié des articles, et beaucoup d'entre eux ont écrit des livres ou préparé des éditions musicales savantes (le plus souvent pour des éditeurs et collections de l'étranger). L'espace manque ici pour donner la liste de tels travaux; on peut toutefois donner comme exemples de la redécouverte de partitions perdues ou oubliées (et au risque d'omettre les découvertes d'autres chercheurs) la preuve de l'authenticité de plusieurs concertos de C.P.E. Bach apportée par Adolph Koldofsky au début des années 1940, la localisation par Mary Cyr de la Cantate pour la fête de saint Louis de Rameau, par Andrée Desautels d'un manuscrit de Marc-Antoine Charpentier à Québec et d'une tablature de luth italienne de la fin du XVIe siècle au CMM, et de compositions de C.P.E. Bach, Haydn, A. Scarlatti et J.H. Schein en Pologne et en Allemagne de l'Est par Hugh McLean. Élisabeth Gallat-Morin mit la main sur le Livre d'orgue de Montréal, Daniel Swift trouva un divertissement musical de Poulenc et Cocteau, Steblin découvrit un portrait de Beethoven et Sabrina Ratner repéra à la Bibliothèque nationale de Paris un quatuor pour piano et cordes de Saint-Saëns, par la suite créé au Canada.

Recherches privées. Walter Kunstler, un chirurgien de Montréal, effectua une recherche sur le thème olympique dans la musique. Le résultat de ces travaux se refléta dans les programmes de l'Orchestre de chambre McGill durant les Jeux olympiques de Montréal en 1976. E.P. Scarlett, un médecin de Calgary, a étudié les causes de décès de quelques musiciens célèbres. L'étude sur Richard Strauss de Thomas Archer, celle de Francean Campbell sur Milhaud et la biographie d'Ernestine Schumann-Heink par J.B. McPherson demeurent inédites, mais le livre de Fernand Ouellette sur Edgard Varèse a été publié. Un professeur d'anglais de Toronto, William Blissett, est une autorité sur Wagner, tout comme le prof. d'humanités torontois M. Owen Lee. Jean-Louis Côté d'Ottawa a fait une étude intensive sur Boccherini. Jack Diether (1919-1987), né et éduqué à Vancouver, et plus tard employé chez G. Schirmer Inc. de New York, était connu pour ses recherches sur Mahler et comme dir. de Chord and Discord (Bruckner Society of America). Paul Macenko, de Winnipeg, a écrit sur des musiciens ukrainiens et édité de la musique ukrainienne. Jaak Liivoja-Lorius a signé des articles traitant d'instruments anciens pour le New Grove Dictionary. D'autres exemples de recherches à titre privé pourraient encore être cités.

Affiliations professionnelles. Les musicologues canadiens sont membres de l'American Musicological Society et de la Société internationale de musicologie. Il n'existe aucune association musicologique entièrement canadienne, mais la Société de musique des universités canadiennes, dont les réunions annuelles font partie des conférences des Sociétés savantes, de même que sa revue (Revue de musique des universités canadiennes) fournissent un débouché pour la lecture et la publication de communiqués et aident à établir des contacts personnels. L'ARMuQ a procuré une tribune pour les travaux portant sur le Québec. En outre, des réunions informelles de musicologues canadiens ont eu lieu à l'Université de Toronto en 1970 (« Canadian Studies Seminar »), à l'Université Queen's en 1979 et à l'Université York en 1980. D'autres tribunes pour des études musicologiques ont été les Cahiers de l'ARMuQ, le Canadian Music Journal, les Cahiers canadiens de musique, Sonances et Studies in Music from the University of Western Ontario. Durant les années 1980, les spécialistes canadiens ont également renforcé leur présence aux réunions internationales, et nombre de Canadiens ont oeuvré sur la scène internationale comme membre de bureaux de rédaction et de conseils de direction.