Médaille d’un grand-oncle
Catriona Le May Doan a toujours cru être, dans sa famille, le membre qui rapporte les médailles. Après tout, elle a gagné deux médailles olympiques en plus d’un grand nombre d’autres médailles à titre de championne du monde en patinage de vitesse. C’est seulement en 2003 qu’elle entend parler de la participation de son grand-oncle Walter Le May à la guerre et de la médaille qui lui a été décernée en 1944.
Aviateur écossais de la Royal Air Force pendant la Deuxième Guerre mondiale, Walter a reçu la prestigieuse Croix du service distingué dans l’Aviation pour avoir découvert, avec son équipage, plusieurs positions de défense des Allemands pendant un vol risqué accompli dans le cadre de missions de reconnaissance à basse altitude au-dessus de la Normandie, en France, avant l’invasion du jour J.
Catriona Le May Doan n’avait jamais entendu parler et n’avait aucune idée des liens militaires de ses ancêtres avant ce moment de 2003 où, se préparant à rendre visite à sa famille en Écosse, son père a décidé de lui parler des gestes héroïques posés par Walter pendant la guerre.
« Je ne savais rien de tout ça », dit-elle. « Mon mari et moi sommes ensuite allés visiter ma famille et j’ai demandé à mon grand-oncle de nous montrer sa médaille. Il était très timide, mais nous l’a finalement montrée. Je suis restée sans voix. Cette médaille représente à mes yeux quelque chose de si remarquable. »
Riche héritage familial
La Croix du service distingué dans l’Aviation, une petite croix d’argent ornée, décernée pour des « actes de bravoure, de courage ou de dévouement lors d’opérations de vol contre l’ennemi » a fait naître chez Catriona Le May Doan un nouvel intérêt pour le long héritage de service militaire de sa famille. Son grand-père, le frère de Walter, a servi dans les rangs de la Home Guard écossaiseau cours de la Deuxième Guerre mondiale.
Un autre frère de Walter a lui aussi volé pour la Royal Air Force; ils sont d’ailleurs tous deux au nombre des 131 000 aviateurs qui ont été formés pour la guerre à Moose Jaw, en Saskatchewan, dans le cadre du Programme d’entraînement aérien du Commonwealth.
« Étrange, tout de même, mes grands-oncles ont été formés à Moose Jaw, dans la province même où j’ai grandi. »
La mère de Catriona Le May Doan a elle aussi connu la guerre. Elle a grandi à Glasgow, en Écosse, au moment du « Blitz » (la campagne de bombardements stratégiques menée par l’aviation allemande contre le Royaume-Uni). Les logements des immeubles voisins de l’endroit où elle vivait étant petite ont été bombardés par les Allemands. Sa famille a souvent été forcée de courir se cacher dans les abris contre les bombardements au son des sirènes pendant les raids aériens jusqu’à ce que ses frères et sœurs, ainsi qu’elle-même soient mis à l’abri à la campagne.
Catriona Le May Doan n’a jamais rencontré le père de sa mère. Ce dernier, ancien combattant de la Première Guerre mondiale, enrôlé dans l’Armée britannique à l’âge de 16 ans et revenu des tranchées en France et en Belgique totalement ébranlé, est mort bien avant la naissance de Catriona; sa propre mère n’était alors qu’une enfant.
Notre responsabilité
En 1963, les parents de Catriona Le May Doan, récemment mariés, ont émigré, de l’Écosse au Canada, et entrepris une nouvelle vie. Les guerres du passé et leur impact sur les deux familles ont été chassés de leur mémoire jusqu’à ce que l’on informe tout récemment Catriona et ses sœurs de l’existence de ces faits d’armes.
« J’ai découvert beaucoup de choses fascinantes à propos de l’histoire de ma famille », a-t-elle dit. « C’est un peu comme un film à mes yeux. Pour moi qui vis au Canada, dans ce cocon où nous jouissons d’une grande liberté et ne manquons de rien, il est difficile d’imaginer que la guerre a été bien réelle pour ma famille. »
« Ces personnes ont vu beaucoup de choses et ont posé beaucoup de gestes qui sont pour nous incompréhensibles. Lorsqu’on réalise que notre propre famille a fait partie de cette réalité, tout prend un aspect personnel et ça nous touche vraiment. »
« Nous sommes de plus en plus loin des gens qui se sont battus au cours de la Deuxième Guerre mondiale », a dit Catriona Le May Doan. « Les générations à venir se sentiront certainement à l’écart de tout ça. Je suis responsable de ma méconnaissance des faits concernant ma famille que je n’ai appris que tout récemment. »
Walter Le May est mort de vieillesse moins de deux ans après que sa nièce canadienne, reconnue athlète mondiale, gagnante de quelques-unes des médailles les plus convoitées de l’histoire, ait été impressionnée à la vue d’une petite croix d’argent qu’il a reçu pour son courage alors qu’il volait au-dessus de la Normandie.
« Le monde dans lequel nous vivons ne serait pas le même sans ces gens qui se sont battus pour nous », a-t-elle dit. « Il est de notre responsabilité de nous souvenir. »