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Obscénité

L'obscénité devient une infraction en 1663 à la suite de la condamnation de sir Charles Sidley pour la conduite qu'il manifeste après une beuverie : il apparaît alors nu sur un balcon d'où il lance des bouteilles remplies de son urine sur les gens se trouvant à Covent Garden.

Obscénité

L'obscénité devient une infraction en 1663 à la suite de la condamnation de sir Charles Sidley pour la conduite qu'il manifeste après une beuverie : il apparaît alors nu sur un balcon d'où il lance des bouteilles remplies de son urine sur les gens se trouvant à Covent Garden. La décision rendue dans l'affaire de sir Sidley sert de précédent pour la condamnation d'Edmond Curl, en 1727, individu qui publie un ouvrage pornographique. Cette décision anglaise est à l'origine du crime de publication d'un écrit obscène. La loi anglaise de 1857, The Obscene Publications Act, et sa définition de l'obscénité, est appliquée dans la très célèbre affaire Hicklin (1868). En confirmant la décision ordonnant la destruction de la publication, le juge en chef Cockburn déclare : « J'estime que le critère de l'obscénité est celui de savoir si l'objet que l'on prétend obscène a tendance à dépraver et à corrompre les personnes susceptibles de subir ces influences immorales et d'avoir en leur possession une publication de ce genre ».

Évolution du droit en la matière

Depuis son adoption en 1892, le Code criminel du Canada prévoit l'infraction consistant à publier des choses obscènes tendant à corrompre les moeurs. Il ne définit pas l'expression « chose obscène ». Le critère appliqué est celui de l'affaire Hicklin.

La modification apportée au Code en 1959 (article 159.8) dispose : « Pour l'application de la présente loi, est réputée obscène toute publication dont une caractéristique dominante est l'exploitation indue des choses sexuelles, ou de choses sexuelles et de l'un ou plusieurs des sujets suivants, savoir : le crime, l'horreur, la cruauté et la violence ». La question de l'« exploitation indue des choses sexuelles » dépend soit des « besoins internes » de l'ouvrage en question, soit des « normes d'acceptation admises dans la société », le meilleur guide à cet égard étant énoncé par le juge Freedman, de la Cour d'appel du Manitoba, dans l'affaire Dominion News & Gifts (1963), confirmé par la Cour suprême du Canada : « Ces normes ne sont pas fixées par des gens au goût et aux intérêts les plus bas. Elles ne sont pas non plus fixées exclusivement par des gens de goût et d'esprit rigides, austères, conservateurs ou puritains. Il faut en arriver à quelque chose qui se rapproche de la moyenne générale des opinions et des sentiments de la société. [...] Les normes sociales doivent être contemporaines. Les temps et les idées changent. [...] Les normes sociales doivent être également locales. En d'autres termes, elles doivent être canadiennes. En appliquant la définition du Code criminel, nous devons déterminer ce qui est obscène suivant les normes canadiennes, indépendamment des attitudes plus ou moins libérales qui peuvent avoir cours ailleurs ».

En 1985, dans l'affaire Town Cinema Theatres Ltd., la Cour suprême du Canada ajoute que le critère des « normes sociales » est celui de la tolérance : ce n'est pas ce que les Canadiens estiment qu'il est convenable pour eux-mêmes de voir, ce qui importe, c'est ce que les Canadiens ne souffriraient pas que d'autres Canadiens voient parce que ce serait outrepasser la norme contemporaine de tolérance que de permettre qu'ils le voient. Les publications qui exploitent les choses sexuelles de manière « dégradante et déshumanisante » ne répondent pas au critère des normes sociales puisqu'elles placent les femmes dans un état de subordination, de soumission avilissante ou d'humiliation. Ces publications, si elles sont disponibles, sont susceptibles d'être nocives pour la société.

Dans l'affaire Butler (1992), la Cour suprême du Canada lie le critère des normes sociales au préjudice causé aux femmes (et parfois aux hommes) par la prolifération de la pornographie. La Cour juge que le degré auquel les normes sociales sont violées dépend du degré de préjudice pouvant résulter de l'exposition de la société aux publications pornographiques en question. Plus grande est la probabilité de causer un préjudice, plus grande est la probabilité qu'elles violent la norme sociale de tolérance. Même si on conclut que les publications en question exploitent indûment les choses sexuelles, le critère des « besoins internes », aussi appelé le moyen de défense fondé sur la « valeur artistique », justifie le matériel qui avance un thème littéraire ou artistique qui répond aux besoins internes de l'oeuvre elle-même et ne constitue pas de « l'obscénité pour l'obscénité ».

Au regard de la Charte canadienne des droits et libertés, la Cour conclut dans l'affaire Butler que les dispositions du Code criminel touchant l'obscénité constituent une limite raisonnable à la liberté d'expression, car le matériel visé par le Code avait peu de valeur pour la société, alors que le Code n'interdit pas d'autres choses sexuelles, lesquelles ne sont pas de nature violente ou dégradante.

Voir également CENSURE; PORNOGRAPHIE.