Jessie Oonark, « Una », O.C., artiste (née en 1906 dans la région de Back River dans les Territoires du Nord‑Ouest [aujourd’hui le Nunavut]; décédée le 2 mars 1985 à Churchill, au Manitoba). Jessie Oonark a été élue à l’Académie royale des arts du Canada en 1975, et admise à l’Ordre du Canada en 1984. En 1987, le Musée des beaux‑arts de l’Ontario a présenté une large rétrospective de son travail et Untitled, son œuvre la plus importante datée de 1973,une pièce de laine et de feutre de quatre mètres sur six, est depuis accrochée par intermittence dans le foyer du Centre national des arts à Ottawa.
Des terres ancestrales au lac Baker
La famille de Jessie Oonark fait partie du peuple utkusiksalingmiut, un peuple semi‑nomade qui menait à l’origine une vie traditionnelle dépendante de la pêche et de la chasse au caribou. Utkusiksalingmiut signifie « le peuple des casseroles en pierre à savon ». Jessie Oonark, dont le nom vient de son grand‑père paternel et que l’on surnommera tout au long de sa vie « Una », est influencée par son père Helaquarq dont on dit qu’il est chaman. Elle reçoit une éducation largement traditionnelle, apprenant à maîtriser de nombreuses techniques comme le traitement des peaux de caribous et de phoques et la confection de parkas à partir de ces matériaux. La baisse de la population des caribous et de la demande mondiale pour les fourrures de renard de l’Arctique à la fin des années 1950 culmine avec l’installation du peuple d’Una à Baker Lake. Quant à cette dernière, mariée à l’âge de 12 ans, elle donne naissance à 13 enfants, dont 8 seulement survivent jusqu’à l’âge adulte. Devenue veuve, elle s’installe à Baker Lake en 1958 avec ses enfants survivants. Elle subvient initialement à ses besoins et à ceux de sa famille en travaillant comme concierge jusqu’à ce qu’un biologiste, Andrew Macpherson, reconnaisse ses capacités artistiques et lui fournisse son premier nécessaire à dessin. Un conseiller en arts de Baker Lake détecte également ses talents et un studio privé ainsi qu’un petit salaire lui sont attribués afin de lui permettre de créer à temps plein. Elle représente une force majeure dans l’essor du programme d’arts graphiques de Baker Lake durant les années 1960 et 1970. Entre 1970 et 1985, des tirages de plus de 100 de ses dessins sont réalisés et publiés dans la collection imprimée de Baker Lake.
Vision inspirée par la vie traditionnelle
Jessie Oonark est connue pour ses dessins et ses tentures murales dont les images aux couleurs éclatantes, à la fois décoratives et empreintes d’une solennité transcendante trouvent leur origine dans toute une vie passée à découper les peaux de caribou pour en confectionner des vêtements. Elle crée une vision personnelle unique en combinant des images traditionnelles inuites représentant l’envolée du chaman, des scènes de chasse et des symboles provenant de son expérience en tant qu’ardente chrétienne. Son travail se caractérise par des aplats de couleur, par la présence systématique d’une figure féminine, et, dans ses grandes tapisseries des années 1970 et 1980, par l’incarnation de plusieurs récits dans une seule œuvre. Ainsi, dans Untitled, une pièce de laine et de feutre de quatre mètres sur six, plusieurs scènes de chasse traditionnelles sont représentées simultanément et une figure féminine vêtue de blanc, emblème chamanique ou angélique, s’élève au‑dessus des autres récits de la tapisserie. Sa carrière prend abruptement fin en 1979 lorsqu’une maladie atteint ses mains, lui faisant perdre le sens du toucher.
Jessie Oonark est la première artiste qui, bien que n’étant pas originaire de Cape Dorset, voit ses œuvres incluses dans les collections de ce village. Le Musée canadien de l’histoire, alors Musée national de l’homme, présente, en 1970, son travail dans une exposition consacrée à deux artistes. Une tenture murale qu’elle a réalisée est offerte à la reine Elizabeth en 1973 et, en 1975, l’artiste est élue membre de l’Académie royale des arts du Canada. En 1984, elle est nommée officier de l’Ordre du Canada et en 1987, le Musée des beaux‑arts de l’Ontario présente une rétrospective majeure de son travail.