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Ouragan Hazel

Les 15 et 16 octobre 1954, l'ouragan Hazel sème la destruction dans la région de Toronto. C'est le pire ouragan qu'ait connu le Canada et la pire catastrophe naturelle qui se soit abattue sur Toronto. Pendant la tempête, les vents atteignent 124 km/h et il tombe plus de 200 mm de pluie en tout juste 24 heures. Cette terrible tempête coûte la vie à 81 Torontois, jette à la rue près de 1 900 familles et cause pour plus de 25 millions de dollars de dégâts.
Acts of Heroism
L'ouragan Hazel

Formation et trajectoire de l'ouragan Hazel

Les chasseurs d'ouragans ont d'abord repéré Hazel dans l'après-midi du 5 octobre 1954, à environ 75 km à l'est de l'île de la Grenade, dans les Antilles. Il souffle déjà à 160 km/h. La tempête a longé les côtes vénézuéliennes avant de soudain dévier vers le nord, en direction d'Haïti, où il fait 1 000 morts et détruit 40 % des caféiers de l'île et 50 % de la récolte de cacao, mettant l'économie à genoux pour plusieurs années.

Le 14 octobre, Hazel s'abat sur les côtes de la Caroline avec des vents qui soufflent à 240 km/h et une mer démontée, avec des vagues de 4 mètres de hauteur. Il détruit toute la ville de Garden City, en Caroline du Sud, ne laissant debout que deux maisons sur 275. Puis il balaie la banlieue ouest de Washington, traverse la Pennsylvanie et l'État de New York, laissant dans son sillage 100 morts et des dégâts se chiffrant pour les États-Unis à 1,5 milliard de dollars.

L'ouragan Hazel frappe Toronto

Les heures passant, le Dominion Weather Office suit la trajectoire changeante de Hazel qui se rapproche de l'Ontario, ainsi que les prévisions des services météorologiques américains, et communique des avis aux radiodiffuseurs. Cependant, peu de gens ayant vécu des ouragans ou sachant s'y préparer, la majorité se trouve exposée à sa violence. Après être entrée dans les terres à hauteur des côtes de la Caroline, Hazel semble s'essouffler au-dessus des monts Allegheny, au point que les météorologues américains annoncent qu'il se dissipe. Toutefois, la tempête repart de plus belle, alimentée par un système dépressionnaire, et se déchaîne en direction du lac Ontario et de Toronto.

À 16 h 30, le 15 octobre, des torrents de pluie s'abattent sur Toronto. Les passages souterrain commencent à se remplir d'eau, mais à 19 h, il n'y a presque plus de circulation. Cependant, comme l'annonce le météorologue en chef Fred Turnbull : « Le pire est encore à venir. Ceci n'est que la pause habituelle dans un ouragan. » Ce n'est pas l'« œil » attendu de l'ouragan, mais une pause avant que des pluies diluviennes fassent sortir les rivières de la ville de leur lit.

Des vents violents balaient la région Toronto, mais ce sont les inondations qui causent le plus de destructions. La majorité des arbres du bassin versant de la rivière Humber sont emportés, ce qui accroît la vitesse à laquelle l'eau s'engouffre dans la rivière. Les plaines inondables, déjà saturées par des jours de précipitations, ne peuvent tout simplement pas contenir les pluies torrentielles.

Les premières victimes sont signalées à 23 h : les occupants d'une voiture emportée dans la rivière Humber ont péri noyés. Sur les 81 morts dénombrés au total, plus de 30 ont perdu la vie dans une seule rue, la promenade Raymore, quand la rivière sortie de son lit a arraché des maisons entières de leurs fondations, les emportant sur son passage. Le pompier volontaire Bryan Mitchell se rappelle ce qu'il a ressenti cette nuit-là sur la promenade Raymore : « Je me sentais tellement impuissant, mais je ne pouvais rien à faire. Personne ne pouvait rien faire. Il y avait tellement d'eau. Nous en avions jusqu'au menton, et tous les pompiers étaient alourdis par leur tenue, les embarcations et le matériel. »

L'eau continuant de monter, 40 routes et routes principales sont submergées. Des trains de voyageurs sont arrachés de leurs rails. Quarante ponts sont détruits ou subissent des dommages structurels et 10 sont impraticables à cause de dégâts à leurs abords. À Woodbridge, la rivière Humber monte à 107 m en son point le plus étroit. Neuf personnes perdent la vie et des centaines d'autres se retrouvent sans toit. Deux hommes, Murray et Clyde Deadder, périssent à Thisteletown dans leur voiture emportée par les flots et 12 familles se retrouvent sans abri.

Beaucoup font preuve de bravoure pour porter secours à des gens en danger, quand bien même le courant est assez fort pour mettre en péril la plupart des embarcations mises à l'eau. Plusieurs sauveteurs improvisés partent à la rescousse de personnes en détresse et doivent, pour finir, être eux-mêmes secourus. Malgré les difficultés, beaucoup de vie sont sauvées grâce à l'intervention rapide de la police, des pompiers et des citoyens. À Weston, un policier qui n'est pas de service, Jim Crawford, et un entrepreneur, Herb Jones, montent dans un bateau équipé d'un moteur de 25 chevaux et s'engagent dans la rivière. Ils travaillent toute la nuit et au petit matin, ils ont sauvé 50 vies.

Cinq pompiers de la caserne de Kingsway-Lambton périssent en tentant de secourir les occupants d'une voiture emportée par les flots de la rivière Humber. Leur camion se trouve bloqué dans une rue inondée, se retourne et les hommes, alourdis par leurs vestes, leurs bottes et leur matériel, sont jetés à l'eau.

Conséquences de l'ouragan Hazel

Des leçons furent tirées des pertes de vie tragiques et de la destruction de l'environnement causées par l'ouragan Hazel. Les offices de protection de la nature, les municipalités locales et la province élaborèrent ensemble un plan détaillé de lutte contre les inondations et de conservation des eaux, afin de réduire considérablement les risques pour la vie et les biens représentés par de futurs phénomènes météorologiques extrêmes. Après Hazel, le gouvernement provincial a modifié la Loi sur les offices de protection de la nature dans le but d'acquérir des terres vulnérables et les réserver à des activités de loisirs et de conservation (y compris l'ancienne promenade Raymore).

En 1959, l'Office de protection de la nature de communauté urbaine de Toronto et de la région entreprit d'élaborer des plans d'aménagement de grands barrages, de réservoirs et de grands canaux d'écoulement, ainsi qu'un programme de lutte contre l'érosion. De plus, il désigna de grandes étendues de terre à acquérir et conserver. La réglementation limite les nouveaux aménagements dans les plaines inondables, ce qui permet aux rivières de s'écouler naturellement tout en réduisant, en cas d'inondation, les risques pour les citoyens et leurs biens. Aujourd'hui, les terres protégées accueillent plus de 6 millions de visiteurs par an.

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