Le parc national de la Pointe-Pelée, fondé en 1918, est une zone protégée située au bout de Pointe-Pelée, une longue péninsule qui s’étend à l’extrémité ouest du lac Érié, au sud de Leamington, en Ontario. L’île Middle – la portion de terre canadienne la plus au sud, située au sud-ouest de Pointe-Pelée – a été annexée au parc en 2000. D’une superficie de 15 km2, le parc national de la Pointe-Pelée est le deuxième plus petit parc national du Canada. Il s’agit également du point continental le plus méridional du Canada, situé plus au sud que le nord de la Californie.
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Géologie
Durant l’ère pléistocène, qui s’étend de 2,58 millions d’années à 12 000 ans avant le présent, l’Amérique du Nord subit une série de périodes glaciaires (voir Glaciation). Au terme de cette ère, alors que la glace entreprend son ultime retrait, l’eau de fonte remplit un système de vallées et de plaines, créant éventuellement les Grands Lacs. Les glaciers laissent dans leurs sillages des débris comme d’énormes rochers, du gravier, du sable et de la glaise. Au fur et à mesure que les débris autour du lac Érié s’érodent, ils créent du sable et du gravier encore plus fins. Les vagues et les vents génèrent des courants aquatiques qui transportent ce sable fin jusqu’à l’endroit où se trouve actuellement la péninsule de la Pointe-Pelée, la construisant au fil du temps.
Faune et flore
La paruline orangée est l’une des nombreuses espèces de parulines observables dans le parc national de la Pointe-Pelée durant la migration printanière.
Au cours des siècles, un sol mince, mais fertile se forme sur la Pointe-Pelée, permettant à une forêt luxuriante aux allures de jungle de pousser. Elle est appelée forêt carolingienne, ou région forestière des feuillus du Canada. Le parc abrite également l’une des plus grandes zones marécageuses du sud-ouest de l’Ontario, désignée site RAMSAR (une zone humide d’importance mondiale).
La Pointe-Pelée est une des régions les plus biodiversifiées du Canada. Étant donné son emplacement méridional, le parc abrite des espèces que l’on ne trouve nulle part ailleurs au pays, incluant des arbres comme le micocoulier, le noyer cendré, le tulipier et le sassafras. La vigne vierge et l’herbe à puce font leur chemin jusqu’à la forêt, contribuant à son allure de jungle.
À l’instar de la flore, la faune du parc abrite diverses espèces rarement trouvées ailleurs au Canada, comme la couleuvre fauve et la tortue ponctuée. Le parc abrite également le seul lézard de l’est du Canada, le scinque pentaligne, ainsi que le petit polatouche (un écureuil volant du sud).
Migration des oiseaux et des monarques
Chaque printemps et chaque automne, le parc national de la Pointe-Pelée accueille des milliers de monarques et d’oiseaux qui migrent à destination ou en provenance de leurs habitats hivernaux situés dans le sud. Pour les monarques qui volent vers le Mexique depuis l’Ontario chaque automne, les Grands Lacs représentent un grand obstacle. Ainsi, ils choisissent les chemins les plus courts possible pour franchir la région des Grands Lacs. Étant donné que la Pointe-Pelée s’avance dans le lac Érié, le parc constitue le point de départ de nombreux monarques. On les aperçoit par centaines de milliers depuis ce point. À la fin du printemps, les descendants de ces papillons reviennent à la Pointe-Pelée depuis le Mexique.
De même, la Pointe-Pelée offre une aire de repos pour les oiseaux qui migrent vers le sud ou vers le nord. La péninsule sert d’escale pour deux importantes routes de migration nord-américaines (un peu comme des autoroutes pour oiseaux). Plus de 390 espèces d’oiseaux sont répertoriées dans le parc national de la Pointe-Pelée, et des centaines de milliers d’oiseaux y convergent en périodes migratoires. Le parc est reconnu comme un lieu d’observation des parulines ; en effet, 43 des 52 espèces trouvées au Canada se retrouvent à la Pointe-Pelée.
Peuples autochtones
Le parc national de la Pointe-Pelée est situé sur le territoire ancestral des Anishinaabe, des Hadenosaunee et des Miamis. Des vestiges archéologiques indiquent que dès l’an 600 de notre ère, les premières nations établissent des campements d’été autour des marécages de la Pointe-Pelée. La vie aquatique des marécages et le riz sauvage qui y pousse leur permettent de se nourrir, tout comme le cerf et les noix des noyers noir et cendré que l’on trouve dans la forêt (voir Noix sauvages du Canada).
Au moment de la signature en 1790 du Traité no 2 des traités du Haut-Canada, le peuple Chippewa de la Première Nation Caldwell occupe la Pointe-Pelée. Le traité stipule que les signataires – les Premières Nations Chippewa, Odawa, Potawatomi et Hurons-Wendats – cèdent leurs terres en échange d’argent et de plusieurs petites réserves. Les deux chefs de la nation Caldwell, Quinesas et Midwayosh Caldwell, ne signent cependant pas le traité au nom de leur bande. En plus du droit ancestral de la nation Caldwell à la Pointe-Pelée, le gouvernement britannique lui octroie la propriété de la pointe et de l’île Pelée en reconnaissance de son service dans la guerre de 1812.
Malgré ces droits sur le territoire, les membres de la nation Caldwell sont graduellement délogés de la Pointe-Pelée en raison du nombre grandissant de colonies de Blancs. Comme ils n’ont pas signé le traité, les membres de la bande n’ont pas droit d’accès à leur propre réserve; ils sont donc forcés de vivre sur les réserves d’autres nations et dans des communautés non autochtones. Sous le règne du chef Moses Caldwell, la bande décide de faire valoir ses droits sur la Pointe-Pelée en occupant paisiblement le parc. Le 12 juin 1972, 19 familles établissent donc leur campement.
Bien que la protestation échoue, la nation Caldwell continue de revendiquer ses droits sur le parc national de la Pointe-Pelée. En 2010, la bande et le gouvernement fédéral parviennent enfin à un accord : la bande recevra 105 millions de dollars et pourra choisir l’emplacement de sa réserve. Depuis, la bande a acquis plusieurs lots de terre aux alentours de Leamington, dont un premier obtient le statut de réserve en novembre 2020. (Voir aussi Réserves en Ontario.)
Exploration et colonisation
Les Français sont les premiers Européens à explorer le lac Érié au début des années 1600. Parmi eux se trouve Étienne Brûlé. Ils baptisent « pointe pelée » la langue de sable qui s’étend depuis la rive nord du lac en raison du manque de végétation. En 1799, les Anglais font de la partie la plus au sud de la Pointe-Pelée une réserve navale, conservant le bois de pin et de chêne pour les mâts de leurs navires. Les frontières de la réserve deviennent éventuellement celles du parc national.
Dans les années 1830, plusieurs familles de Blancs construisent des fermes sur la Pointe-Pelée. On les appelle « les squatteurs », car ils occupent illégalement la réserve navale. Malgré tout, ces familles mettent sur pied de petits commerces de pêche, défrichent la terre pour la cultiver, font l’élevage du bétail et s’adonnent à la chasse et à la trappe dans la région. En 1881, le gouvernement fédéral permet aux squatteurs d’acheter leurs terres qui, en fin de compte, se situent à l’extérieur des frontières du parc national de la Pointe-Pelée.
Création du parc national de la Pointe-Pelée
En 1882, le naturaliste W.E. Saunders visite la réserve navale. Bien que le but de sa visite est la chasse aux canards, Saunders est si étonné de voir autant d’oiseaux migratoires qu’il met sur pied le club d’ornithologie des Grands Lacs. Leur pavillon, connu sous le nom de « The Shack » est construit tout près de l’actuel centre d’accueil.
En 1913, Saunders convainc Jack Miner, un éminent écologiste, de visiter la Pointe-Pelée. « J’essayais de regarder dans toutes les directions en même temps », écrit-il plus tard dans le Leamington Post au sujet de sa visite. « J’y ai trouvé la plus grande variété d’arbres et d’arbustes jamais vue dans un même endroit en Ontario. » Miner regroupe d’autres hommes importants de la région de Leamington et ensemble, ils font pression pour que le gouvernement fédéral transforme la réserve navale en parc national. En 1918, le parc national de la Pointe-Pelée est officiellement créé.
Conservation
Bien qu’il soit protégé, le parc n’est pas à l’abri des menaces intérieures et extérieures. Cela est dû, en partie, à sa petite taille et au fait que le territoire environnant a été sévèrement modifié pour accommoder l’agriculture et le logement. En raison de sa surutilisation durant la saison printanière d’observation des oiseaux, la végétation y est souvent piétinée. La population du cerf de Virginie dépasse la capacité d’accueil du parc, ce qui affecte sévèrement la composition taxinomique de la forêt. Les espèces de plantes non indigènes menacent la végétation indigène. Au cours du 20e siècle, plusieurs espèces d’amphibiens et de reptiles disparaissent du parc. En outre, les populations restantes de reptiles et d’amphibiens sont isolées les unes des autres, ce qui annonce leur possible extinction.
Services
Les visiteurs du parc national de la Pointe-Pelée peuvent faire du camping, de la randonnée, de la baignade, de l’observation d’oiseaux, du canot et du kayak. Une promenade donne accès aux zones marécageuses qui constituent l’essentiel du parc, tandis qu’une piste cyclable longe le parc.