L’Ontario compte 207 réserves, détenues par 127 des 128 Premières Nations de l’Ontario (voir aussi Premières Nations en Ontario). (La Première Nation de Beaverhouse a été reconnue par le gouvernement fédéral en tant que Première Nation en 2022 et ne possède pas de terre de réserve.) En 2020, 221 822 Indiens inscrits vivaient en Ontario, à peu près 44 % d’entre eux étant résidents des réserves. Les réserves ontariennes sont détenues par les peuples anichinabés, cri, oji-cri, haudenosaunee, delaware, utaouais et algonquin.
(Carte de l’Encyclopédie canadienne, avec les données de Ressources naturelles Canada offertes en vertu de Licence du gouvernement ouvert – Canada)
Géographie
Bien que tout l’Ontario soit le territoire traditionnel des Premières Nations, les réserves représentent moins de 1 % de la superficie totale de la province. En comparaison, les parcs provinciaux et les autres aires protégées de l’Ontario en totalisent plus de 9 %. La plus grande réserve de l’Ontario, d’une superficie de 426 km2, est Wiikwemkoong, située à l’extrémité est de l’île Manitoulin, dans la baie Georgienne. À titre de comparaison, London, en Ontario, est d’une superficie de 420 km2.
En général, les réserves cries et oji-cries dominent le nord de l’Ontario. Les réserves saulteaux se trouvent à l’est du lac Supérieur, près de la portion du sud de la frontière entre l’Ontario et le Manitoba. La Première Nation Nipissing se trouve près du lac du même nom, au centre de l’Ontario. Les collectivités des Chippewa, des Ojibwées, des Outaouais et des Mississauga sont concentrées le long des rives des Grands Lacs. Les réserves haudenosaunee, quant à eux, occupent les régions sud-ouest et est de la province. Les autres Premières Nations ayant des réserves en Ontario sont les Potawatomi, établis dans le sud de l’Ontario et l’est de la baie Georgienne, les Delawares et les Munsee-Delawares du sud de l’Ontario et les Algonquins de la vallée de l’Outaouais. Certaines collectivités ont plusieurs réserves. Par exemple, la Première Nation de Batchewana en a quatre : Goulais Bay, Obadjiwan, Rankin Location et Whitefish Island. De plus, 34 réserves – toutes situées dans le nord de l’Ontario – sont uniquement accessibles par avion ou par routes d’hiver.
Démographie
La majorité des réserves ontariennes sont détenues par les Anishinaabés, suivis par les Cris, les Haudenosaunee, les Delawares et les Algonquins. Les Six Nations de la rivière Grand représente la réserve la plus peuplée en Ontario. En 2021, cette communauté haudenosaunee dénombre 28 019 membres, dont 12 849 résident dans la réserve. Les Mohawks d’Akwesasne constituent la deuxième population en importance résidant dans une réserve : de leurs quelque 12 964 membres (en 2021), 10 120 vivent sur leur réserve.
Traités
Avant l’arrivée des Européens, les Premières Nations chassent, cueillent et cultivent partout en Ontario et dans les régions environnantes. À l’arrivée des Européens au début des années1600, les Premières Nations participent au commerce des fourrures et se battent parfois pour l’accès aux ressources, notamment pendant les guerres des Iroquois, des Renards et des Dakotas. Dès leur arrivée en Ontario, les Européens cherchent à créer des alliances avec les Premières Nations par le biais de traités; toutefois, ce n’est qu’à partir des années1850 que les traités incorporent le concept de réserves. Jusque-là, les traités ne mentionnent pas les réserves, bien que les terres des Premières Nations signataires ainsi que des montants d’argent et d’autres cadeaux fassent souvent partie de l’entente. Ces terres finissent par faire partie du système des réserves à la suite de la création de la Loi sur les Indiens en 1876.
Les premiers traités en Ontario qui mènent directement à la création de réserves sont les traités Robinson-Huron et Robinson-Supérieur de 1850. Connues collectivement sous le nom de traités Robinson, ces ententes sont signées avec les collectivités ojibwées de la rive nord des lacs Huron et Supérieur.
Les traités conclus en Ontario continuent d’appliquer le système de réserves jusqu’en 1923, année où le Canada cesse d’adopter des traités. Les ententes conclues au cours de cette période sont les traités no3, no5 et no9, signés avec les collectivités ojibwées et cries du nord de l’Ontario, ainsi que les traités Williams (les derniers à être signés en Ontario et au Canada), signés avec les Chippewas des lacs Simcoe et Huron, et avec les Mississaugas de la rive nord du lac Ontario et du centre de l’Ontario.
Plusieurs Premières Nations en Ontario vivent sur des terres non cédées, c’est-à-dire qu’elles n’ont jamais donné leur territoire au gouvernement fédéral. Ces Premières Nations font partie des signataires des traités Robinson. Contrairement aux traités leur ayant succédé, les traités Robinson ne prévoient pas la cession des terres choisies par les Premières Nations signataires pour leurs réserves.
En comparaison, les traités numérotés obligent les Premières Nations à choisir des réserves sur les terres qu’elles cèdent. En plus des signataires des traités Robinson, quelques Premières Nations habitent sur des terres non cédées, ayant refusé de signer les traités. La Première Nation de Wiikwemkoong, par exemple, refuse de signer le traité McDougall de 1862, qui porte sur les terres des Anishinaabés de l’île Manitoulin. En vertu de la Loi sur les Indiens, toutes les terres mises à l’usage d’une Première Nation sont traitées comme une réserve, qu’elles se trouvent sur un territoire cédé ou non. Cependant, le fait que ces terres n’aient jamais été cédées est une distinction importante pour les collectivités concernées.
Le saviez-vous?
Les enfants autochtones en Ontario, ainsi que partout dans les provinces et territoires du Canada, ont fréquenté les pensionnats indiens. Certains de ces pensionnats se situaient sur des réserves des Premières Nations, comme c’était le cas du pensionnat indien de St.Mary’s. Il se trouvait sur la réserve de la Nation Wauzhushk Onigum, près de Kenora, en Ontario. Entre 1948 et 1953, le gouvernement fédéral a mené des expériences de nutrition à St. Mary’s et dans cinq autres pensionnats indiens à travers le pays. Ces expériences font partie des nombreux abus soufferts par les survivantes et survivants des pensionnats indiens.
Revendications territoriales
Les revendications territoriales, aussi connues sous le nom de traités modernes, débutent après 1972. Les revendications territoriales tentent de faire reconnaître les droits des peuples autochtones qui n’ont pas signé de traités, comme la Première Nation de Wiikwemkoong, et de régler les griefs des Premières Nations signataires qui n’ont pas reçu ce à quoi elles avaient droit (voir Revendications territoriales globales: traités modernes et Peuples autochtones: Revendications particulières).
Il existe de nombreux exemples de Premières Nations en Ontario qui utilisent le processus de règlement des revendications territoriales comme moyen de réparer les torts causés par les traités. Par exemple, la Première Nation de Gull Bay, située sur la rive ouest du lac Nipigon, croit au départ que le traité Robinson Supérieur lui promet une réserve de 16 lieues françaises carrées. La lieue française était une unité de distance qu’elle a apprise des commerçants de fourrure français. Elle reçoit plutôt une réserve de 16 milles carrés. Ce genre de malentendu est un problème avec tous les traités Robinson. Bien que les traités décrivent la superficie des terres de réserve en milles, les Premières Nations supposent que les terres sont mesurées en lieues françaises – la seule unité de mesure européenne qu’elles connaissent. Étant donné qu’une lieue représente environ deux fois et demie la taille d’un mille et demi, les réserves sont beaucoup plus petites que ce dont les Premières Nations croient avoir convenu. Des problèmes surviennent également lorsque les arpenteurs et les Premières Nations ont de la difficulté à situer les limites des réserves énoncées dans les traités. De plus, les arpenteurs, avec l’aide de spéculateurs fonciers et miniers, veillent à ce que les frontières des réserves excluent les zones déjà peuplées ou qui contiennent des ressources minérales précieuses. En 2016, la Première Nation de GullBay présente une revendication territoriale, demandant une compensation de 150 millions de dollars pour les années où elle aurait pu tirer des revenus des activités minières et de foresterie, si la réserve avait été de la taille convenue.
Le processus de règlement des revendications territoriales crée également de toutes nouvelles réserves pour certaines nations. La Première Nation crie de Missanabie, par exemple, se voit promettre une réserve en 1906, en vertu du Traité n°9. Toutefois, les terres promises ne sont jamais arpentées ou mises à la disposition de la collectivité. En 1993, elle présente une revendication territoriale, demandant les terres de réserve auxquelles elle a droit. En 2010, 104 ans après la signature du Traité n°9 et 17 ans après le dépôt de la revendication territoriale, le gouvernement de l’Ontario consacre près de 39 km² de terres au nord-est de Sault Ste. Marie à la collectivité. En 2018, les terres deviennent une réserve.
Les Premières Nations de tout l’Ontario, comme les Six Nations de la rivière Grand, Fort Severn, la Première Nation crie de la Moose et Walpole Island, continuent de négocier avec le Canada pour régler les revendications en suspens liées à la perte et au retour des terres de réserve.
Gouvernance
En Ontario, comme dans les autres provinces, les réserves sont dirigées par des chefs et des conseils. La taille du gouvernement et la durée de son mandat varient d’une Première Nation à l’autre. Certaines sont gouvernées selon la Loi sur les Indiens, laquelle prévoit un chef ainsi qu’un conseiller pour chaque centaine de membres de la Première Nation. Une élection est organisée tous les deux ans pour désigner le chef et les conseillers.
Toutefois, la plupart des Premières Nations en Ontario suivent des formes de gouvernances considérées comme « traditionnelles ». Cela signifie que les Premières Nations concernées peuvent davantage décider du processus de sélection de leurs dirigeants. Dans les Premières Nations opérant sous des systèmes traditionnels, les chefs et les conseillers sont souvent élus pour des mandats prolongés. Par exemple, les Six Nations de la rivière Grand élisent un chef et deux conseillers pour un cycle de quatre ans. À part de ce système imposé par la Loi sur les Indiens, les Six Nations de la rivière Grand continuent également à utiliser leur système de gouvernance traditionnel, soit le Conseil de la Confédération.
De même, la Loi sur les élections au sein de premières nations permet des mandats prolongés. Introduite en 2014, celle-ci ne remplace pas la Loi sur les Indiens ni les systèmes de gouvernance traditionnels. Elle permet plutôt aux bandes de choisir une forme modifiée du système électoral prévu par la Loi sur les Indiens. En 2020, huit Premières Nations de l’Ontario adoptent cette forme de gouvernance.
À la fin des années 1800 et au cours des années 1900, le gouvernement fédéral s’immisce dans les affaires internes des Premières Nations, notamment en révoquant les chefs et en imposant des procédures électorales. Ces dispositions ont grandement endommagé la structure de plusieurs communautés. Dernièrement, le gouvernement fédéral se montre plus ouvert à l’égard des formes de gouvernance privilégiées par les Premières Nations. En outre, de nombreuses collectivités ont pris d’importantes mesures pour renouveler et restaurer leurs systèmes de gouvernement traditionnels, tant au niveau local qu’à l’échelle des Nations.
Difficultés
Les personnes habitant sur des réserves en Ontario font souvent face à des difficultés avec lesquelles leurs voisins non autochtones n’ont pas à composer. Il peut s’agir de niveaux d’éducation inférieurs, de possibilités économiques moins nombreuses et de logements inadéquats. On peut constater d’autres disparités lorsque l’on compare les réserves sur le plan géographique : les réserves au sud de la province ont tendance à jouir de meilleures conditions que les réserves situées au nord. Bien que le financement gouvernemental des réserves soit le même, peu importe leur emplacement, les réserves au sud sont plus près des grands centres urbains, ce qui leur offre de meilleures possibilités d’emploi et d’éducation.
De plus, les réserves au nord, en particulier les collectivités qui sont accessibles uniquement par avion, ont tendance à faire face à des crises du logement, ce qui n’est pas le cas des réserves plus au sud. Par exemple, le 28 octobre 2011, la Première Nation d’Attawapiskat, située sur la rive est de la baie James, déclare l’état d’urgence en raison d’une crise du logement. Au printemps 2018, 50 nouvelles maisons sont construites; cependant, 300 familles figurent sur la liste d’attente pour un logement et on estime que la collectivité aura besoin de 595 nouvelles maisons d’ici 2030. Par ailleurs, les avis à long terme d’ébullition de l’eau ont tendance à toucher les réserves du nord de l’Ontario plus fréquemment que celles du sud de la province. (Un avis d’ébullition de l’eau indique que l’eau est impropre à la consommation ou à l’hygiène personnelle. Le gouvernement fédéral définit « à long terme » comme un avis en vigueur depuis un an ou plus.)
La pollution environnementale a également des répercussions sur la santé et le bien-être des collectivités. Par exemple, les habitants de Grassy Narrows voient leur mode de vie traditionnel anéanti par la contamination au mercure de leur réseau hydrographique. Cette contamination décime la pêche vivrière de la collectivité et a des répercussions négatives sur la santé et le bien-être de plusieurs générations. Grassy Narrows cherche toujours les mesures appropriées pour lutter contre la pollution continue par le mercure sur leurs terres. De même, la Première Nation de Serpent River est touchée par la contamination des déchets nucléaires provenant des anciennes mines d’uranium d’Elliot Lake, une ville située au nord de la réserve. Les terres de la réserve et la santé de la population sont également touchées par la présence d’une usine d’acide sulfurique construite sur le territoire de la collectivité. L’usine a été construite en vue d’employer les Premières Nations locales et de fournir ce produit aux mines d’Elliot Lake. Au terme d’un long processus, le gouvernement fédéral accepte finalement de nettoyer l’usine d’acide sulfurique en 1988 et en 1989. Le site est alors transformé en terrain où se tiennent les pow-wow de la réserve. Lorsque les habitants découvrent par la suite que l’acide sulfurique résiduel érode les mocassins, le terrain de pow-wow est déplacé à une altitude plus élevée. La collectivité négocie à nouveau (en 2019) un nettoyage du site.
Arts et culture
Les réserves ontariennes produisent de nombreux acteurs, artistes et athlètes célèbres. Parmi les acteurs connus, mentionnons Jay Silverheels, originaire des Six Nations, qui est célèbre pour son rôle de Tonto dans The Lone Ranger (1949-1957) et GrahamGreene, également originaire des Six Nations, qui est connu pour ses rôles dans la série télévisée Red Green Show (1991-2006), ainsi que pour les films Maverick (1994), Il danse avec les loups (1990) et Clearcut (1991).
Parmi les artistes célèbres, notons Norval Morrisseau de la Première Nation de Sand Point (dorénavant la Première Nation Bingwi Neyaashi Anishinaabek). Il fond la Woodland School of Art et fait partie du Groupe indien des sept. La culture anichinabée, à laquelle il appartient, est une source d’inspiration pour son art et le pousse à créer des œuvres lumineuses et vibrantes qui sont reconnues dans le monde entier. Tout comme Norval Morrisseau, l’artiste DaphneOdjig, originaire de la Première Nation de Wiikwemkoong, fait partie du Groupe indien des sept. Une grande partie de son œuvre explore les mythes et l’histoire anichinabés ainsi que l’importance des relations entre les êtres vivants.
Les athlètes connus comprennent Tom Longboat (Six Nations) pour la course, Ted et Jordan Nolan (Garden River) pour le hockey et Tara Hedican (Eabametoong) pour la lutte.