Walter Patterson, officier militaire, propriétaire foncier, premier gouverneur britannique de l’Île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), (né vers 1735 près de Rathmelton, comté de Donegal, Irlande; mort le 6 septembre 1798 à Londres, Angleterre). Walter Patterson a servi dans l’armée britannique durant la guerre de Sept Ans. En 1770, il a été assermenté en tant que premier gouverneur britannique de l’île Saint-Jean (renommée Île-du-Prince-Édouard en 1799). Son mandat de gouverneur a été marqué par la spéculation foncière et les troubles politiques.
Jeunesse et famille
Walter Patterson naît vers 1735 dans le comté de Donegal, en Irlande. (Selon l’historien de l’Î.-P.-É. Harry Balgole, Patterson serait né en 1735. D’autres sources situent son année de naissance en 1742.) Il est le fils aîné de William Patterson et Elizabeth Todd. En mars 1770, il épouse Hester Warren.
Carrière militaire et guerre de Sept Ans
Walter Patterson se joint à l’armée britannique en 1757 au rang d’enseigne auprès du 80th Regiment of Foot, dirigé par Thomas Gage. Le 80th est un régiment d’infanterie légère entraîné aux tactiques non conventionnelles et utilisé pour les escarmouches et la reconnaissance. Walter Patterson fait son service en Amérique du Nord dans le 80th Regiment durant la guerre de Sept Ans. Le régiment combat à Fort Carillon (Ticonderoga, New York) en 1758 et sur le Lac Champlain en 1759. L’année suivante, Walter Patterson est promu lieutenant. En 1762, il retourne en Europe en permission. Deux ans plus tard, le régiment est dissous et Walter Patterson est libéré de l’armée.
Spéculation foncière
Après avoir obtenu son congé de l’armée britannique, Walter Patterson, comme d’autres officiers libérés, se lance dans la spéculation foncière. En 1764, il s’adresse au gouvernement britannique, avec 19 autres pétitionnaires, pour obtenir des lots sur l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard). L’île est tombée sous contrôle britannique en 1763, à la fin de la guerre de Sept Ans. En 1767, des parcelles de terre sont distribuées par un système de loterie; la plupart sont obtenues par des officiers militaires. Walter Patterson et son frère John (le père du héros de la marine américaine Daniel Todd Patterson) deviennent copropriétaires du lot 19. Chaque titulaire, ou propriétaire foncier, doit payer des redevances (quitrents) à la Couronne. (Voir Question des terres de l’I.P.É.) Un an plus tard, Walter Patterson demande au gouvernement britannique de faire de l’île une colonie séparée, distincte de la Nouvelle-Écosse. Le gouvernement britannique accepte, mais décide que le nouveau gouvernement colonial devra se financer à même les redevances. Ce système entraînera des problèmes pour Walter Patterson, qui est nommé gouverneur de la colonie en 1769.
Gouverneur de l’Île-du-Prince-Édouard
Fin août 1770, Walter Patterson arrive à Charlottetown, île Saint-Jean [I.P.É.]. Son entourage comprend une vingtaine de serviteurs et sa femme, Hester Warren Patterson, qu’il a épousée plus tôt la même année. Arrivés dans la capitale, ils y trouvent bien peu d’habitants et de bâtiments. À l’époque, la colonie ne compte que quelque 300 colons européens (la plupart Acadiens) et quelques centaines de Mi’kmaq. (Remarquablement, Walter Patterson ne mentionne même pas l’existence des Autochtones dans ses rapports au gouvernement britannique.) La composition de la colonie se transforme peu après avec l’arrivée de colons venus d’Angleterre, dont beaucoup d’Écossais. Un millier de colons s’installent entre 1770 et 1775, quand l’immigration est interrompue par la Révolution américaine.
Walter Patterson se met au travail dès son assermentation comme gouverneur en septembre 1770. Il met sur pied un conseil exécutif et commence à créer des lois, notamment pour protéger la pêche au morse et réglementer la vente d’alcool. Le nouveau gouverneur nourrit des plans ambitieux de construction de routes et d’édifices publics, mais l’argent manque. Le principal problème est que les dépenses et salaires gouvernementaux sont entièrement financés par les redevances, et que certains propriétaires ne paient pas celles-ci, ou n’en paient qu’une partie.
La situation financière s’aggravant, Walter Patterson et le conseil cherchent des solutions au problème des redevances. En 1771, ils votent la première loi autorisant le gouvernement à saisir la terre de ceux qui n’ont pas payé leurs redevances. Les terres doivent être revendues localement par des enchères publiques. (Voir Question des terres de l’I.P.É.)
En 1774, Walter Patterson demande un congé pour faire un voyage en Angleterre. Il y demeure pendant presque cinq ans (1775-1780), pendant la guerre d’indépendance américaine. Durant son séjour, il fait des représentations auprès du gouvernement britannique afin que le Quit Rent Act de 1774 soit promulgué (ce qui est fait en 1776). En 1777, le gouvernement britannique accepte aussi de fournir 3 000 £ au gouvernement de l’île Saint-Jean.
Walter Patterson revient à l’île Saint-Jean durant l’été 1780. Un an plus tard, son gouvernement saisit des terres en vertu du Quit Rent Act. La plupart sont acquises par des membres du gouvernement, qui reçoivent les terres en compensation pour des arriérés de salaires. C’est le cas de Walter Patterson lui-même, qui obtient trois cantons complets et quatre demi-cantons (à peu près 100 000 acres), en plus de 70 000 acres additionnelles au nom de quatre personnes de son entourage.
Les titulaires originaux protestent auprès du gouvernement britannique, qui élabore un projet de loi leur permettant de récupérer leurs lots en payant les redevances. Walter Patterson connaît l’existence de ce projet de loi, mais la garde secrète durant l’hiver 1783-1784. Il déclenche une élection, espérant qu’une nouvelle assemblée rejettera la loi. Walter Patterson est soutenu par les colons loyalistes, dont plusieurs centaines sont arrivés au cours de l’été 1784 après la Révolution américaine. Cependant, cette tactique ne fait qu’accroître la colère et la frustration des titulaires d’avant 1781 et du gouvernement britannique. Finalement, cela amène le gouvernement impérial à lui retirer son poste de lieutenant-gouverneur en 1787.
Asservissement et Loi de 1781
Des recherches récentes ont révélé l’étendue de la pratique de l’asservissement dans les Maritimes et, plus généralement, dans ce qui deviendra plus tard le Canada. Des personnes d’ascendance africaine réduites en esclavage ont vécu sur l’île depuis le Régime français, bien que leur nombre soit relativement peu élevé. L’asservissement s’est poursuivi sous le régime britannique. Le gouverneur Walter Patterson était un esclavagiste. C’était aussi le cas de beaucoup de ses collègues, dont le juge en chef Peter Stewart, le procureur général Phillip Callbeck et le président de la chambre Walter Berry.
En 1781, tandis que Walter Patterson est gouverneur, l’île-colonie vote une loi sur l’asservissement affirmant que « le baptême ne doit pas exempter les esclaves de la servitude ». La loi comporte trois dispositions principales : le baptême ne libère pas de l’asservissement, les enfants nés de femmes réduites en esclavage sont asservis de la naissance, et les personnes réduites en esclavage ne peuvent être libérées que par leurs propriétaires.
La Loi semble avoir été votée afin de rassurer les colons et les immigrants éventuels à l’effet que l’asservissement est légal dans la colonie. Ceci inclut des loyalistes américains, dont des centaines ont immigré dans l’île à la suite de la Révolution américaine en amenant des personnes réduites en esclavage avec eux. Harvey Amani Whitfield et Barry Cahill soutiennent que la Loi pourrait aussi être liée à un événement qui s’est produit en Écosse. En 1778, des juges écossais ont déclaré que l’asservissement n’a jamais été légal dans ce pays et que la conversion et le baptême libèrent automatiquement les personnes asservies. Toutefois, certains immigrants écossais de l’île Saint-Jean sont esclavagistes. En votant la Loi de 1781, le gouvernement colonial de l’île Saint-Jean confirme le statut légal de l’asservissement et rejette explicitement l’idée que le baptême puisse apporter la liberté aux personnes asservies.
Lorsque la Loi est abrogée en 1825, l’asservissement est pratiquement disparu en Amérique du Nord britannique. En 1833, la Loi de l’abolition de l’esclavage interdit la pratique dans l’ensemble de l’Empire britannique.
Pauvreté
Walter Patterson perd son poste de lieutenant-gouverneur de l’île en 1787. Lorsqu’il retourne en Angleterre en 1789, il est en faillite. Ses immenses propriétés sont vendues pour rembourser ses dettes. Il meurt dans la pauvreté, dans son logement de Londres, en Angleterre, en 1798.