Peintres topographes
Les études topographiques remontent à l'intérêt que portait l'Europe du XVIe siècle au relief et aux détails dans la représentation du paysage. L'exécution devait être précise autant pour des raisons de fierté, de fidélité à la réalité observée, que pour des raisons stratégiques. Les artistes topographes se plaisaient également à évoquer des images poétiques qui ouvraient de nouveaux panoramas à l'imagination populaire. Il existe dans les collections canadiennes quelques rares paysages topographiques qui datent de la fin du XVIIe siècle au début du XXe siècle. Des dessins topographiques de certaines parties du Saint-Laurent ont été réalisés avant la construction de la voie maritime. Notons que les périodes les plus fécondes se situent à la fin du XVIIIe siècle et au XIXe siècle. À cette époque, les aquarellistes professionnels aussi bien qu'amateurs prolifèrent principalement en Angleterre. La topographie est enseignée par des artistes à l'Académie royale militaire située à Woolwich, ville des environs de Londres. L'un d'eux, Paul Sandby, dessine de remarquables paysages où s'allient la précision du rendu topographique et la vision poétique du paysage d'agrément. L'enseignement de ce maître influence les militaires qui reçoivent une formation en dessin topographique.
Des soldats et des colons britanniques installés au Canada s'adonnent à ce passe-temps et laissent un grand nombre d'oeuvres sur les paysages et les coutumes du pays. Par exemple, Hervey Smyth montre l'envergure des forces anglaises qui montent à l'assaut de Québec. Richard Short étale dans ses dessins de la ville conquise l'importance de la flotte britannique, la richesse de l'architecture et la nature bon enfant de ses habitants. Thomas DAVIES préfère les aquarelles représentant des scènes où l'homme et la nature vivent en harmonie. George HERIOT illustre Travels through the Canadas, qui connaît alors une grande popularité en Europe et en Amérique du Nord. James Pattison COCKBURN réalise une importante collection d'aquarelles sur Québec et ses environs. Il dessine les activités de la place du marché et le charme des rues étroites où se côtoient les militaires anglais et les Canadiens français. Il sait montrer le pittoresque des chutes Montmorency et la beauté de la campagne québécoise.
Les artistes topographes peignent des paysages idéalisés et souvent grandioses. Les CHUTES MONTMORENCY sont le sujet favori de plusieurs d'entre eux. Contrairement à d'autres artistes de la même période, Davies et Heriot estiment que tout dans la nature est digne d'être dessiné pour le plaisir des yeux et de l'imagination et ce, à la manière d'un grand parc anglais éloigné des soucis de ce monde. Leurs tableaux font ressortir le caractère pittoresque du pays conquis, des Canadiens français et des amérindiens en même temps que le raffinement et l'élégance des administrateurs coloniaux.
Cette période produit aussi des tableaux moins idéalistes tels ceux de John Webber qui accompagne James Cook sur son navire lors de l'exploration du Pacifique. Puisque les toiles, les aquarelles ou les dessins sont quelquefois gravés en Europe ou aux États-Unis, les peintres topographes contribuent à éveiller l'intérêt pour cette partie de l'Amérique du Nord britannique.
Ces artistes sont imités par des explorateurs comme George BACK, des aventuriers comme William HIND, des femmes d'administrateurs comme Lady Dufferin et Elizabeth SIMCOE, des femmes de pasteurs comme Henrietta Cartwright ou des ingénieurs comme William ARMSTRONG. Les oeuvres des peintres topographes ont permis de figer dans la mémoire collective, l'image des paysages et des habitants du Canada d'hier.