Pierre Falcon (dit Pierriche, Pierre le rimeur), poète, troubadour (né le 4 juin 1793 à Elbow Fort, dans la Terre de Rupert, près de l’actuelle Swan River, au Manitoba; décédé le 26 octobre 1876 à Grantown, la ville actuelle de Saint-François-Xavier, au Manitoba). Bien qu’il ait œuvré comme marchand de fourrures, fermier et magistrat, Pierre Falcon est surtout connu comme l’auteur de plusieurs poèmes et ballades qui racontent des événements et des expériences de premiers colons métis. Le lac Falcon, situé à la frontière entre le Manitoba et l’Ontario, est nommé en son honneur.
Jeunesse et début de carrière
Pierre Falcon porte le même nom que son père, un employé de la Compagnie du Nord-Ouest (CNO). Il est baptisé au Bas-Canada, à L’Acadie, le 18 juin 1798. C’est également à cet endroit, où il habite avec ses proches, qu’il apprend à lire et à écrire. À l’âge de 15 ans, Pierre Falcon retourne à la rivière Rouge, où il commence sa carrière de commis à la Compagnie du Nord-Ouest.
Pierre Falcon est connu pour avoir travaillé dans différentes régions, notamment dans les postes nordiques au Lac des Bois et à la Montagne à la Bosse, dans la vallée de la Qu’Appelle et au fort du district du lac William-Rainy. Il vit d’ailleurs un certain temps à Fort Pelly. Il occupe alors une multitude d’emplois, allant de commis à acheteur de fourrures itinérant.
En 1812, Pierre Falcon épouse Marie Grant, fille de Marguerite et de Cuthbert Grant père. Il devient ainsi le beau-frère de Cuthbert Grant fils, chef des Métis et surveillant des Plaines (Warden of the Plains en anglais) nommé par la Compagnie de la Baie d’Hudson. Cuthbert Grand fils jouera un rôle important dans sa vie et dans la Résistance de la rivière Rouge.
Pierre Falcon travaille à la CNO de 1808 à 1821, puis à la CBH de 1821 à 1825, après la fusion des deux entreprises.
Pierre Falcon suit Cuthbert Grant fils et plusieurs autres familles métisses à Grantown (aujourd’hui Saint-François-Xavier, au Manitoba), dans la prairie du Cheval-Blanc. Lors du recensement de 1838, il vivait à cet endroit, possédant 30 acres de terres. Il exploite alors sa terre, puis devient le magistrat de Grantown en 1855.
Pendant qu’il est à Grantown, la famille Falcon s’agrandit pour accueillir trois filles (Madeline, Isabelle et Marie) et trois fils (François, Pierre et Jean-Baptiste). Avant cela, de 1829 à 1837, Pierre Falcon et Marie Grant avaient déjà eu quatre autres enfants : Julie, Catherine, Emelie et Gregoire.
Poète et troubadour
Surnommé Pierriche (Pierre le rimeur), Pierre Falcon a le talent de composer spontanément des chansons que lui inspire tout événement local comme des aventures de chasseurs ou de voyageurs. La Chanson de la Grenouillère, par exemple, est une ballade composée à l’occasion du violent incident de Seven Oaks, le point culminant d’une longue rivalité entre la CNO et la CBH, qui entraîne la mort de 20 personnes. Les ballades de Pierre Falcon sont portées par les voyageurs métis dans tout l’ouest du pays et jusqu’au fleuve Saint-Laurent. Les airs sont alors chantés autour du feu et dans les communautés afin de célébrer leurs victoires et se rappeler leurs chefs.
Le dernier couplet de La Chanson de la Grenouillère va comme suit :
« Qui a composé la chanson? Pierriche Falcon, ce bon garçon.
Elle a été faite et composée
Chantons la gloire que nous avons gagnée.
Elle a été faite et composée
Sur la victoire que nous avons gagnée. »
Parmi ses autres chansons qui ont survécu, on trouve « La Danse des bois-brûlés » (1816), qui raconte la deuxième partie de l’incident de Seven Oaks. Bien que la paternité de la chanson ne soit jamais confirmée, on l’attribue à Pierre Falcon. La chanson « Le Général Dickson » (1837) parle quant à elle d’un aventurier qui quitte Grantown la même année et trouve un royaume autochtone en Californie.
Finalement, « Les Tribulations d’un roi malheureux » (1869), chanté sur l’air de « The Wandering Jew » de Fromental Halévy, proteste contre l’entrée de William McDougall dans la colonie de la rivière Rouge. Pendant la Résistance de la rivière Rouge de 1869-1870, Pierre Falcon, malgré son âge avancé, désire accompagner le groupe de Métis ayant comme objectif d’empêcher l’entrée du gouverneur William McDougall dans la colonie en octobre 1869. Il dit alors : « Pendant que l’ennemi s’occupera de moi, mes amis pourront frapper fort. »
Les ballades de Pierre Falcon sont chantées dans les Prairies par les Métis. Accompagnées d’un violon (crincrin), elles sont portées dans tout le pays par les voyageurs, du fleuve Saint-Laurent au fleuve Mackenzie. N’ayant pas été couchées sur papier, beaucoup de ses chansons sont aujourd’hui perdues, mais toutes les ballades qui ont survécu se retrouvent dans Songs of Old Manitoba (1960) de Margaret Arnett MacLeod. En 2009, l’Institut Gabriel Dumont lance un CD et un livre intitulés Pierriche Falcon : The Michif Rhymester, qui présentent des interprétations des chansons de Pierre Falcon en anglais et en français-michif. L’Institut Gabriel Dumont fait aussi paraître un essai, rédigé par Paul Chartrand, ancien membre de la Commission royale sur les peuples autochtones, sur l’importance des œuvres de Pierre Falcon, du nationalisme des Métis et de la langue michif.
Voir aussi : Musique des Métis; Métis, établissements; Résistance de la rivière Rouge.
Distinctions
Bien que la grande partie de son œuvre ait disparu, Pierre Falcon aurait composé de nombreuses autres chansons sur les triomphes et le quotidien des voyageurs métis. La chanson « The Buffalo Hunt » d’Agnes Laut est d’ailleurs une traduction romancée des paroles de l’une des chansons de Pierre Falcon.
Le lac Falcon dans le parc provincial du Whiteshell, à environ 150 km à l’est de Winnipeg, au Manitoba, est nommé en son honneur.