Sheila North, chef, militante, journaliste (née en 1972 à Oxford House, au Manitoba, aujourd’hui Nation crie de Bunibonibee). En 2015, Sheila North est devenue la première femme élue chef de Manitoba Keewatinowi Okimakanak. Cette organisation représente 30 Premières Nations du nord du Manitoba. Elle a créé le hashtag #MMIW (Femmes et filles autochtones disparues et assassinées au Canada) en 2012 afin de conscientiser l’opinion publique à la crise nationale de la violence contre les femmes autochtones et d’y remédier. En tant que journaliste, Sheila North a travaillé comme correspondante pour les services de nouvelles de CBC et de CTV à Winnipeg.
Jeunesse et éducation
Sheila North grandit dans la Nation crie de Bunibonibee (auparavant Première Nation d’Oxford House), une communauté isolée du nord du Manitoba. Sa mère, Sadie, est originaire de Bunibonibee. Son père, Gilbert, vient de la Nation crie de Pimicikamak (anciennement Bande de Cross Lake). Ses parents possèdent et administrent ensemble une entreprise de construction de routes. Cette entreprise se concentre sur la construction et l’entretien des routes d’hiver dans leur communauté. En outre, son père est chef de Bunibonibee. Il a été un des premiers chefs du Manitoba à expulser de la communauté l’ agent des Indiens délégué par le gouvernement fédéral.
À l’âge de 15 ans, Sheila North déménage à Winnipeg afin de suivre des cours du secondaire qui ne sont pas offerts dans le nord du Manitoba. Alors que ses résultats scolaires étaient considérés comme excellents à Bunibonibee, elle constate qu’elle n’est pas au niveau des autres étudiants à Winnipeg. Sheila North attribue ce fait à la mauvaise qualité de l’enseignement qu’elle a reçu dans sa communauté d’origine. Elle remarque que la vie dans une famille d’accueil de Winnipeg comporte bien peu de supervision pour une jeune fille lancée dans une ville nouvelle. Au cours de ce séjour à Winnipeg, elle fait l’expérience d’un choc culturel, du racisme et de l’isolement.
Sheila North quitte l’école à l’âge de 16 ans. La même année, elle donne naissance à son premier enfant. Dans la vingtaine, elle complète un test d’équivalence pour recevoir son diplôme, puis elle reprend les études. Elle obtient des diplômes en comptabilité d’entreprise et en développement rural du Collège communautaire Assiniboine.
Journalisme
Sheila North s’intéresse au journalisme depuis son enfance. Elle entreprend une carrière dans l’industrie au début des années 2000. Durant cette période, elle étudie la radiodiffusion et la télédiffusion à l’Academy of Broadcasting Corporation. Elle travaille ensuite pendant trois ans comme animatrice radio de langue crie et anglaise pour Native Communications Inc., une station radiophonique autochtone de Winnipeg. Sheila North continue à y travailler à temps partiel tout en complétant le programme de communications créatives du Red River College. Tout en étudiant, elle effectue des stages à CBC Winnipeg et CTV Winnipeg. Après avoir obtenu son diplôme en 2006, elle travaille pour le service de nouvelles de CBC pendant sept ans. Elle devient ensuite correspondante pour le service de nouvelles de CTV à Winnipeg. Elle y demeure jusqu’à ce qu’elle soit élue chef de Manitoba Keewatinowi Okimakanak en 2015. En 2021, elle retourne à CBC. L’année suivante, elle devient animatrice de l’émission Winnipeg News Late Night de CBC.
En tant que journaliste, Sheila North remarque un manque de diversité culturelle dans le monde des médias. Elle fait pression pour que le point de vue des Autochtones soit plus présent dans les bulletins de nouvelles. En 2010, elle est en nomination aux Prix Gemini pour le meilleur reportage d’actualité locale.
Femmes et filles autochtones disparues et assassinées
Sheila North milite beaucoup pour que des actions soient prises face à la violence contre les femmes autochtones. Elle révèle publiquement la violence qu’elle a subie dans sa vie personnelle. Le fait d’être une survivante, dit-elle, a inspiré son militantisme. En 2012, elle travaille comme responsable des communications pour le grand chef de l’Assemblée des chefs du Manitoba. Alors qu’elle occupe ce poste, elle crée le hashtag #FFADA (Femmes et filles autochtones disparues et assassinées au Canada) afin de conscientiser l’opinion publique mondiale sur la crise actuelle et l’assassinat et la disparition de milliers de femmes, de filles et de personnes bispirituelles autochtones. Elle est aussi l’une des premières personnes à demander une enquête fédérale sur la crise. Elle exprime ses préoccupations au sujet du processus de l’enquête, qui est lancée en 2015. Elle s’adresse à la Commission de la condition de la femme des Nations Unies pour parler de la crise, et elle coproduit le film 1200+ (2015), un documentaire explorant le problème et ses causes.
Grande chef de Manitoba Keewatinowi Okimakanak
À la suggestion de quelques amis, Sheila North se présente au leadership de Manitoba Keewatinowi Okimakanak (MKO) en 2015. Créée en 1981, MKO est une organisation à but non lucratif qui représente les communautés des Premières Nations du nord du Manitoba. MKO défend les droits et les intérêts de ses citoyens, tout en promouvant l’autonomie gouvernementale des Nations membres. Sheila North est élue après deux tours de scrutin. Elle devient la première femme à exercer la fonction de grande chef de MKO. Toutefois, elle dénonce publiquement le sexisme, la misogynie et le harcèlement qu’elle a subis durant son mandat.
Un des principaux accomplissements de son mandat de trois ans est la reprise de contrôle par MKO de la Régie des services à l’enfant et à la famille des Premières Nations du Nord du Manitoba (souvent appelée Régie du Nord). Cet organisme est une entité administrée par le gouvernement provincial qui assure les services de bien-être de l’enfant dans le Nord du Manitoba. Avec d’autres chefs et organisations, Sheila North réussit à enlever le contrôle de cette entité au gouvernement provincial et à le remettre aux Premières Nations. Elle exige la reconnaissance des droits de traités et promeut l’autonomie des Premières Nations. Durant son mandat, elle pose des actions contre le profilage racial et la violence contre les femmes et filles autochtones. Elle intervient aussi au sujet de la crise de suicides qui frappe de nombreuses Premières Nations nordiques.
En 2018, Sheila North annonce qu’elle ne tentera pas d’être réélue grande chef de MKO. Plus tard dans l’année, elle se présente au poste de chef nationale de l’Assemblée des Premières Nations. Elle finit deuxième derrière le chef sortant Perry Bellegarde. En 2021 et 2022, elle se présente au poste de grande chef de l’Assemblée des chefs du Manitoba. En 2023, Sheila North se présente à nouveau comme chef nationale de l’Assemblée des Premières Nations. Elle arrive troisième lors des élections, ayant été éliminée au troisième tour de scrutin parce qu’elle a le nombre de voix le plus inférieur.