Syndicalisme et mondialisation
Les transformations majeures intervenues dans les échanges commerciaux entre les pays ont provoqué des changements importants dans la manière dont les différents acteurs sociaux s'organisent pour faire valoir leurs points de vue et défendre leurs intérêts. À cet égard, la mondialisation de l'économie a provoqué, dans le mouvement syndical, des remises en question comme il ne s'en était pas produit de la sorte depuis que les hommes et les femmes ont compris, au moment de la révolution industrielle, au X1Xe s., l'importance et la nécessité de l'action collective pour résister à l'arbitraire patronal et améliorer leurs conditions de travail.
L'organisation syndicale a pendant longtemps constitué ses lignes de défense à partir du lieu de travail, que ce soit l'usine, le chantier ou l'institution. Chacun de ces lieux jouissant, en règle générale, d'une relative autonomie, il était normal que les travailleurs établissent leurs stratégies en fonction de ce qui leur apparaissait comme le lieu où, normalement, se prenaient les décisions et étaient arrêtées celles susceptibles d'avoir des impacts sur leur vie.
Le mouvement de fond qui conduit aujourd'hui à une mondialisation et à une internationalisation, en même temps qu'à une diminution des lieux de décision est, semble-t-il, irréversible. Il va s'accélérant, consacrant malheureusement la mainmise du secteur financier spéculatif sur l'ensemble de la vie économique. Tous ces éléments ont chambardé complètement la manière privilégiée par les travailleuses et les travailleurs pour faire reconnaître leurs droits.
Les organisations syndicales dans les pays occidentaux ont réagi de multiples manières à cette nouvelle donnée. À peu près toutes les organisations s'entendent pour combattre la mondialisation des marchés qui représente la forme extrême du capitalisme en ce qu'elle soutient, ultimement, une logique et une concentration auxquelles aucune force sociale ne pourrait lui être opposée.
Par contre, l'attitude des organisations syndicales à l'égard de la mondialisation des marchés met en lumière des sensibilités qui diffèrent. Là aussi, dans un premier temps, les organisations syndicales ont unanimement combattu ce nouveau phénomène. Exclues des discussions de l'Aléna, par exemple, les organisations syndicales canadiennes ont refusé de cautionner cette nouvelle manière d'organiser les échanges commerciaux entre les pays. Au niveau canadien, plusieurs maintiennent encore aujourd'hui une attitude protectionniste, essentiellement défensive en somme, alors que d'autres continuent de rejeter toute forme d'accord international.
Mais prenant acte du fait que ce mouvement apparaissait irréversible, les organisations syndicales québécoises sont passées à l'offensive. Elles revendiquent plutôt l'introduction de clauses sociales visant à protéger les droits des travailleurs à l'intérieur de ce nouvel aménagement du paysage économique. L'exemple des syndicats européens, au moment des négociations menant à la signature du traité de Maastricht, a inspiré cette position syndicale. D'importantes protections sociales ont été introduites au moment de cette négociation.
Cette mondialisation des marchés a forcé les organisations syndicales à prendre la mesure de l'importance d'une action syndicale concertée au niveau planétaire. C'est ainsi que la Confédération internationale des syndicats libres, dont les effectifs ont beaucoup augmenté depuis le démembrement des pays de l'Est, est aujourd'hui appelée à jouer un rôle de premier plan à cet égard. Le Congrès du travail du Canada est affilié à la CISL et la Confédération des syndicats nationaux s'est jointe à cette centrale internationale en 1998.